Le Debaa des femmes (Mayotte)

Le Debaa des femmes à Mayotte à la fois un chant, une danse chorégraphiée, un ensemble esthétique et un moment social collectif stimulant, harmonieux où s'expriment puissance et sensibilité.

Le debaa des femmes à Mayotte est un art de vie qui désigne un ensemble qui intègre la décision d’organiser la manifestation, l'invitation, les créations, répétitions, déplacements et la cérémonie elle-même.

Le debaa des femmes à Mayotte est un art de vie qui désigne un ensemble qui intègre la décision d’organiser la manifestation, l'invitation, les créations, répétitions, déplacements et la cérémonie elle-même. C’est à la fois un chant (une soliste et des choeurs), animé par une Imam, rythmé par des percussionnistes (tari, dafu, kashakasha), une danse chorégraphiée, un ensemble esthétique, une émulation entre groupes de debaa et un moment social collectif stimulant, harmonieux où s'expriment puissance et sensibilité. C'est une pratique récente aux racines anciennes, créée par les femmes, et dont le répertoire principal est d’essence soufie. Le debaa des femmes est transgénérationnel, et s'ouvre aux hommes pour un appui logistique.

On retrouve la pratique pour célébrer plusieurs moments de la vie. Le jour du debaa, la cérémonie démarre en début d’après-midi et, selon un rituel partagé, s'achève en fin de journée. Une cérémonie peut réunir plus d'une centaine de femmes sous un ɓandra-ɓandra. Alignées et parées de leurs meilleurs atours, ces femmes chantent et exécutent des chorégraphies mobilisant des expressions du visage et tout le haut du corps. Chaque groupe participant, tour à tour, exprimera sa partition.
En tant que patrimoine vivant mis en visibilité, le debaa se confronte aux risques de folklorisation, marchandisation et les communautés dialoguent pour continuer à transmettre les valeurs fondamentales (faire ensemble, conscience et maîtrise de soi, dépassement) et auto-réguler le rythme des adaptations devenues inéluctables (performances artistiques, mise en économie marchande, nouveaux espaces de transmission, par exemple).
Le debaa magnifie la beauté des femmes, leur créativité, exigence et discipline dans un moment dévotionnel de communion. C'est un patrimoine culturel qui rassemble l'ensemble des Mahoraises

La communauté du debaa des femmes est constituée de l'ensemble de la population mahoraise soit environs 350 000 habitants, auxquels s'ajoutent les diasporas qui résident en France hexagonale, à La Réunion, Madagascar et ailleurs dans le monde.
Les femmes constituent le coeur de la pratique. C'est la communauté. Elles sont impliquées à différents titres, principalement en tant que praticiennes, ou amies de pratiquantes, ou encore proches ou voisines qui interviennent dans l’organisation des cérémonies. De fait, même quand certaines ne sont pas pratiquantes, les circonstances les font contribuer aux préparatifs, y compris dans les animations voire dans les pratiques occasionnelles. Elles sont également amenées à entendre, écouter, visionner, en longueur de journée, du debaa sur les différents médias. En
période de ramadan, cette mise en contact est omniprésente et quasi-inévitable.

Madrasati et zama, autres membres de la communauté

La pratique est collective et est structurée en zama (pl. de shama) c'est à dire des associations.
Celles-ci peuvent être déclarées ou pas. Elles gèrent l’organisation des évènements, les temps de répétitions et assurent la transmission par des apprentissages. Les madrasati (associations à vocation religieuse) participent également à la réalisation du debaa. Certains zama peuvent avoir la valorisation du debaa comme principal objet social.
En moyenne, chaque grand quartier de Mayotte a son shama qui, à un moment ou un autre, est concerné par le debaa. Dans le centre-ouest de Mayotte, la commune de Sada, avec ses 2 villages et 11 1561 hab., compte 5 associations de debaa ; Chiconi, la commune voisine avec 2 villages et 7.048 hab.2 en compte une dizaine. Il est estimé à plus de 300 les structures associatives qui pratiquent du debaa.

Diaspora des femmes à La Réunion, France hexagonale, Comores et Madagascar

Les communautés mahoraises qui quittent l’île pour s’installer à La Réunion et en France hexagonale continuent de pratiquer le debaa à différentes occasions. D’après certains témoignages recueillis dans le cadre de cet inventaire, on constate auprès des femmes de la diaspora, un regain d’intérêt à en faire. On estime à plus d’une centaine le nombre d’associations qui pratiquent le debaa en dehors de Mayotte.
L’approche faite en 2014 à travers l’article intitulé « le debaa des femmes : un patrimoine de Mayotte » (A. Ben Said (2014).) a révélé que 4 générations de femmes d’âges différents peuvent se regrouper dans les mêmes cérémonies ou relever du même shama.

Lieu(x) de la pratique en France

Le debaa se pratique sur tout le territoire de Mayotte, département région française du sud-ouest de l’océan Indien, une des quatre îles de l’archipel des Comores, situé au nord du canal du Mozambique. La pratique est présente de manière équilibrée sur l’ensemble du territoire, sans prééminence d’une zone géographique sur une autre. Il en va autant dans les villages kibushiphones (locuteurs du kibushi) ou shimaorephones (locuteurs du shimaore). Il s’agit d’une pratique sociale et populaire qui transcende la géographie physique et sociolinguistique de
Mayotte.

Pratique similaire en France et/ou à l’étranger

Il existe des pratiques similaires au debaa des femmes à Mayotte. Nous les présentons ci-dessous.

Pratique similaire affiliée au debaa Critère de rapprochement Pays
Daira Rifa'ii (cérémonie spirituelle) Lien confrérique, répertoire textuel, chant spirituel Mayotte, Madagascar, Comores, Madagascar, Zanzibar
Daira shadhuli (cérémonie spirituelle) Lien confrérique, répertoire textuel, chant spirituel Mayotte, Madagascar, Comores, Madagascar, Zanzibar
Mulidi (cérémonie spirituelle) Lien confrérique, répertoire textuel, lien historique Mayotte, Madagascar, Comores, Madagascar, Zanzibar
Mawlida shenge (cérémonie spirituelle) Répertoire textuel, lien historique Mayotte
Kaswida (chant spirituel) Répertoire textuel, chant religieux, chant spirituel Indonésie, Malaisie, Yémen
Hadra (troupe de femmes soufie) Pratique "genrée" féminine, lien confrérique, répertoire textuel, chant spirituel Maroc (Chefchaouen)
Tari (genre musical féminin) Pratique féminine Mayotte, Comores, Madagascar
Mawlida (célébration de la naissance du prophète Muhammad) Pratique populaire, répertoire textuel commun Mayotte, Madagascar, Comores, Madagascar, Zanzibar, Yémen, Indonésie, Malaisie, Egypte

La pratique se déroule également à La Réunion, autre île du sud-ouest de l’océan Indien, région française et dans les grandes villes en France hexagonale où les Mahoraises se sont installées.

Invitation et accueil des convives, mlalikio

Les préparatifs (invitations, achats divers et autres activités) se déroulent plusieurs jours voire plusieurs semaines avant le jour du debaa. Les invitations se font par différents canaux : annonce publique lors des précédentes manifestations ; rappel d’un calendrier partagé ; porte-à-porte pour convier directement les personnes ; appels téléphoniques et sms, diffusion via les réseaux sociaux, notamment sur des groupes thématiques. La personne concernée convie ses invitées directement ou délègue cette tâche à une proche (membre de la famille ou amie). 
On appelle cela mlalikio ou wulalika (acte d’invitation).

Déroulement d’une cérémonie de debaa

L’hôte ou ses représentants prennent soin d’accueillir les troupes conviées, en leur donnant à manger et, si le temps le permet, les laisse se reposer un peu avant le lancement de la cérémonie.
C’est à partir de ce lieu d’accueil (mlahikio), après avoir mangé, que les femmes se préparent pour se rendre dans le ɓandra-ɓandra (l’espace traditionnel qui a été monté par les hommes, décoré par les femmes, et où se déroulera la manifestation). Les femmes mettent leur vêtement, se parent et se maquillent de msindzano (pâte issue du frottement du bois de santal et du corail), souvent avec des motifs en dessin, ou de henné (ina), de rouge à lèvres (mlala) ou encore de bottes de fleurs parfumées (rose, jasmin…), appelées tampa. La troupe peut se rendre individuellement, mais souvent en groupe, jusqu’au lieu de la cérémonie. Sur place, elle sera accueillie avec des acclamations et expressions de « bienvenu », par une invitation à prendre place : marahaɓa, marahaɓa, namkariɓu (bienvenue à vous, bienvenue ! prenez place !). Cette démarche se fait souvent avec un rythme chantant et dansant. Elle se répète à chaque invitée ou groupes d’invitées nouvellement arrivée sous le chapiteau.
Chaque troupe a une place réservée. Selon fundi Missiki Madi (Madrasati Nidhoimya, 8 mai 2021), « la primauté du choix de l’emplacement revient à la première troupe accueillie au village et, ainsi de suite, selon l’ordre d’arrivée ». Sous le chapiteau, de forme carrée ou rectangulaire, les personnes en charge de la chorégraphie, sont installées en longueur sur des chaises (shiri) et, devant elles, l’ensemble de percussions qui est assuré par des personnes assises par terre sur une natte (djavi). Entre la ligne de percussions et celle de la chorégraphie, se placent la meneuse (Imam) et la soliste (mhedezi). 
Tandis que l'Imam sera mobile, faisant des allers-retours d'un bout à l'autre des lignes pour donner des consignes et veiller à la cohésion de l'ensemble, la soliste restera debout à la même place.
Sous le ɓandra-ɓandra, l’hôte fait un accueil officiel des convives, par un mot spécial de bienvenue. La cérémonie peut commencer avec en ouverture la troupe-hôte, suivie de celle arrivée la première. Sans estrade, la « montée en scène », se fera sur les mêmes emplacements requis à leur arrivée. La « montée en scène » consiste à mettre en lumière une troupe qui chantera du shadi (a capela) et/ou kaswida (poème chanté) dansant accompagné de percussions et de chorégraphie associée qui sera le chant de debaa. Selon Némati Mtsounga (Madrasati Nidhoimya, le 18/1/2021, à Sada), la durée du chant ne réponds pas à des règles pré-établies. Elle est laissée à l’appréciation de la chanteuse, en fonction de l’émotion qu’elle aura et ressentira avec sa troupe et l’assistance.
Un chant peut donc dépasser bien plus que 20 min. En revanche, depuis l’expérience issue de la programmation du debaa à l’échelle internationale par Zaman Production, avec le soutien du Conseil général de 2008 à 2013, « la tendance actuelle consiste à réduire la durée du chant autour de 10 mn ». Les chanteuses réservent les debaa longs pour les animations, où il est opportun de faire durer les morceaux qui font vibrer. Une cérémonie de Debaa peut ainsi durer quelques heures ou toute une après-midi.

Pendant le passage d'une troupe, les autres profitent du rythme pour réviser des chorégraphies spécifiques, improviser des mouvements de danse ou simplement pour se dégourdir les membres.
En dehors des moments forts en spiritualité tels que le voeu pieux, le lever du deuil, les chanteuses des troupes inaugureront leur cérémonie par la fatiha (1ère sourate du Coran, signifiant “ouverture”), puis alterneront psalmodie de shadi (a capela), kaswida rythmé de percussions et animé de chorégraphies (mɓadzio).
Le plus souvent, on retrouve les jeunes femmes pour assurer les chorégraphies, tandis que la percussion est jouée par des femmes moins jeunes, des « mamans » voire des « grands-mères ». Ce jeu de rôle est beaucoup apprécié par les jeunes. Elles peuvent alors exprimer leur matshatshari (animations vivantes).

Les circonstances d’organisation d’une cérémonie de debaa

Toutes les occasions fastes ou de manifestation de joie sont un prétexte pour organiser un debaa.
Certains debaa ont une vocation spirituelle, d’autres répondent à des mondanités, d'autres encore pour des moments solennels tels qu’une commémoration par exemple. Souvent, s’adosse aussi à ces célébrations, un besoin de bénédiction divine. Ci-après, listées les circonstances les plus courantes de célébration du debaa :
- félicitations (maferesheyo, masherefeyo) à la suite de l’accomplissement d’un acte : cérémonie spécifique organisée en un lieu donné, pour honorer une personne, en raison de son mariage, de son retour du hadj (pèlerinage),
- acquittement d’un nadhara (voeu pieux) réalisé : comme quelqu’un qui promet de remercier Dieu s’il donnait naissance à un enfant, ou s’il était reçu à tel examen ou concours, supposément compliqué,
- félicitations à la suite d’une réussite : à un examen, un concours, etc. Ici, il ne s’agit pas d’acquittement après une promesse mais d’une simple célébration,
- accompagnement honorifique (mahishimio, hishima) d’une mariée, d’un(e) hadj(a), d’un émissaire de l’Etat, ou d’une personnalité importante et considérée. Il s’agit là d’accueillir un-e invité-e avec les honneurs, en cortège déambulant sur la voie publique, jusqu’au lieu où il-elle est attendu-e,

Autres circonstances de debaa :

- réponse à une invitation pour un debaa personnel, associatif ou villageois (organisé à tour de rôle),
- cérémonie de lever d’un deuil, notamment à l’occasion de l’arbayini (quarantième jour) ou du hawli (cérémonie annuelle),
- divertissement, notamment pour l’Aïd, les vacances, pour la récréation,
- cérémonie de félicitations après avoir remporté des élections,
- animation pendant les campagnes électorales où on fait appel au debaa pour la présentation des candidats, ou encore pour ponctuer les prises de paroles (c'est déjà le cas avec une autre pratique profane et religieuse, le Mawlida shenge),
- à l'occasion de festivals à Mayotte, exemple le Festival des arts et traditions de Mayotte (FATMA) en mai,
- apprentissage, préparation aux cérémonies, tout ceci fait l’objet de rencontres sous la forme de répétitions. Celles-ci se déroulent au moins une fois par semaine, en début de soirée ou l'après-midi durant les week-ends. Les jours fériés sont aussi mobilisés pour ces entraînements.

Quant au chant de debaa, hors cérémonie, on y fait aussi appel, comme pour le shadi :
- bercer un enfant,
- s’encourager lors des tâches quotidiennes (cuisine, semis, plantation, moisson…),
- à des moments passifs comme dans les embouteillages,

Le debaa est partout. C'est un mode de vie et il crée pour les Mahorais-es un sentiment très fort d'appartenance et d'identité culturelle.

La créativité artistique

Pour chaque chant mis en scène, une chorégraphie est dédiée par la troupe. Il est important d’être présente lors des répétitions pour retenir les gestes et assimilé leur déroulé. Une personne qui n’aura pas pu suivre régulièrement les répétitions se trouvera en difficulté lors de l’exécution, même avec les indications de l’Imam. Aussi, à supposer un même chant, avec la même musique, chaque groupe peut avoir sa propre création chorégraphique. Même si les commandes sont claires, le passage d’un geste à un autre, d’une posture à une autre nécessite de saisir les phases intermédiaires.
Il existe aussi une volonté d’innovation dans les chorégraphies qui s’améliorent et s’affinent.
Autant, chaque chant de debaa a une chorégraphie dédiée, autant cette dernière peut évoluer selon la volonté du groupe, avec de nouvelles touches et retouches, après de constants réajustements.
La créativité est tout aussi présente dans la recherche de nouveaux chants, pour ne pas être répétitifs. Dans le projet de Zaman Production, les troupes souhaitaient qu’il y ait régulièrement un nouveau chant de debaa pour chaque représentation suivante. Il était difficile de faire admettre que ce qui avait marché au festival précédent pouvait encore rencontrer du succès au prochain. Les artistes étaient prêtes à relever, constamment, le défi de la nouveauté tant pour les textes et la chorégraphie.

Une cérémonie sous un chapiteau (le ɓandra-ɓandra)

En dehors des répétitions qui peuvent se dérouler dans la cour d’une maison, sous une véranda voire dans un grand salon etc., les cérémonies de debaa s’organisent sous un ɓandraɓandra, chapiteau de forme rectangulaire, généralement tenu dans un espace public, avec des murs de séparation faits de tshandaruwa. Celui-ci est traditionnellement brodé de divers motifs par l’artisanat du petakufe. Devenu de moins en moins disponible, les communautés ont tendance à le remplacer par des draps et des rouleaux de tissus achetés dans le commerce pour réaliser cette séparation.

Plan type d'organisation spatiale d'un ɓandraɓandra
Plan type d'organisation spatiale d'un ɓandraɓandra dans le cadre d'une cérémonie de debaa.

Le ɓandra-ɓandra crée un périmètre sanctuarisé et réservé aux femmes, dans un espace public ouvert. Les femmes y sont autorisées sans limite. Des invités masculins le sont aussi en marge, des photographes également. Les curieux sont tolérés. Les regards flatteurs des hommes y sont même « attendus », à condition de faire preuve de discrétion.

Les percussions

Trois instruments sont utilisés dans le debaa des femmes : le tari (percussion sur cadre), le kashakasha (sortes de cymbales) et le dafu (percussion dotée de cymbales). Certains types de tari assureront le rythme et la cadence pendant que d’autres influeront sur le ton.

De ces trois instruments, seule la percussion le tari est de fabrication locale. Il se fait le plus souvent à partir d’une peau de bouc, et quelque fois avec la peau d’une chèvre. Les Tari sont vendus par des artisans locaux (sur commande). Parfois, certains tari sont ramenés par des commerçants, depuis Dubaï ou d’autres pays qui en font l’usage.

Les kashakasha ou les dafu sont plutôt des produits d’importation depuis la péninsule arabique, et parfois d’Asie (Inde, Indonésie).

Le vao (costume)

Le saluva (sorte de lamba) et le kishali (châle) constituent le costume traditionnel de la femme mahoraise. Ils sont portés au quotidien, pendant les rituels et en cérémonie.
Dans le debaa, toute la troupe porte la même tenue qui a été validée par tous les membres ou ses représentantes. Les tissus choisis peuvent provenir directement de la boutique d’un commerçant, ou sur commande auprès de commerçants, dans la région même ou d'ailleurs. Parfois, certains membres sont elles-mêmes des commerçantes et se déplaceront spécialement hors de Mayotte pour faire leur choix. Les motifs sont multiples, variés et de divers coloris. Parfois, sur le tissu il y a aussi un message écrit dont la teneur varie, entre déclaration, proverbe ou message politique. On y utilise autant le shimaore, le kibushi et le français. 

Les valeurs éducatives du debaa

Les praticiennes s'accordent à faire ressortir que la pratique du debaa est porteuse de valeurs éducatives et participe à une bonne cohésion sociale voire au développement de (sa) personnalité.
Le debaa est une pratique intergénérationnelle qui offre un espace d’échange entre les plus jeunes et les anciennes. Ces dernières vont pouvoir partager et transmettre les valeurs qu’elles considèrent essentielles, pendant que les plus jeunes vont exprimer leur façon de vivre le debaa, leur créativité et capacité à faire évoluer chants et chorégraphies. Espace de saine confrontation au service du
collectif et de la performance.
La pratique du debaa est un support de transmission de connaissances. Une approche qui suscite la connaissance de soi, de l'environnement historique, socio-linguistique, culturel et cultuel de Mayotte et la prise de conscience de sa propre interaction à cet ensemble. Les praticiennes y apprennent des chants, leur signification, des danses et surtout des gestuelles chorégraphiées.
Elles y apprennent aussi à développer leur sensibilité, notamment par le choix des couleurs, des tissus, elles apprennent à développer leurs goûts pour s'habiller, se maquiller. Enfin, elles apprennent à se connaître, à s'affirmer par la mise en dehors de soi, l'exposition. Avec sa dimension « théâtrale », le debaa des femmes est un mode d’expression et d’extériorisation des émotions. Il est par ailleurs qualifié d’ode et d’hymne à la joie1.C'est une pratique exigeante qui apprend à ces praticiennes la discipline, le goût de l'effort, de la recherche de l'excellence, le plaisir de l'émulation voire de la compétition tout en développant la solidarité, le faire ensemble. C'est un espace sécurisé pour développer l'esprit critique et l'altérité car chaque cérémonie est une surprise, une rencontre unique avec l'Autre. Se « donner au maximum » pourrait être le leitmotiv des praticiennes de cet art féminin.
Si l’utilisation du saluva est de mise dans cette cérémonie, le kishali (châle) est diversement utilisé.
Son emploi est laissé à l’appréciation de la troupe. Jusqu’à l’aube des années 2000, son utilisation était optionnelle. D’aucuns soutiennent que le port de ce couvre-chef est complètement étranger au debaa. (cf. https://www.facebook.com/yaz.naz.5)

Pour sa part Fatima Boinali (entretien audio, le 9/01/2022), bientôt septuagénaire, qui a pratiqué le debaa depuis son jeune âge, considère que le kishali a toujours fait partie de l’esthétique de la femme mahoraise, et ce, en toutes circonstances, culturelles et cultuelles. Elle précise que jamais dans sa pratique du debaa, sa troupe n’a eu à se dévoiler la tête. Ce témoignage rejoint celui de
Hadidja Mze Ali (par visio le 24/04/2023,) qui considère le non-port du kishali dans le debaa, comme un simple phénomène de mode. Les deux pratiquantes renvoient la découverture de la tête à des traditions sectorielles, et spécifiques à des zones géographiques ou à des initiatives privées d’associations.
En revanche, le kishali traditionnel a été remplacé par un foulard blanc s’enroulant autour du cou et laissant apparaître les oreilles.

Actuellement, nous assistons à un regain du kishali, avec un usage multiforme. Celui-ci est porté sur la tête, couvrant tout ou partie, sous-forme de turban (kemba) à l’africaine, ou encore posé sur l’épaule.

Occasion d’honorer une personne chère ou de l’encourager

Ces moments de partage de la joie sont aussi des occasions de choix pour encourager les apprenantes en les honorant par une décoration de billets de banque, de bonbons ou de bottes de fleurs. Les colliers en or sont souvent honorifiques et sont rendus après la cérémonie. C’est le cas des belles-familles qui s’honorent mutuellement en se décorant et en faisant des gâteries à une personne qui participe à leur cérémonie.

Les thématiques des textes de debaa

Les textes de debaa ont été traduits sur la période 2008 à 2013. Le travail a concerné le répertoire de cinq associations2 qui faisait partie de la tournée internationale. Il en ressort en synthèse :
- récits de naissance du Prophète Muhammad (32 textes),
- amour (18 textes),
- sagesse, éthique et spiritualité (15 textes),
- éloge des maîtres spirituels (10 textes),
- invocations (9 textes),
- personnalité et la mission prophétique (6 textes),
- sources et fondements (5 textes),
- les panégyriques de Dieu (3 textes),

Il convient de noter que les textes de debaa font partie d’un patrimoine textuel partagé avec les cérémonies de mulidi, kandza ou encore daira à Mayotte et dans les zones swahilies. Ceci est de plus en plus évident, lorsqu’on compare les pratiques locales entre elles ; puis, les pratiques locales avec les régionales.
Au-delà de la poésie du texte, il y a la poésie du chant et de la chorégraphie. Le debaa des femmes est un mode d’expression qui permet le vécu et le partage d’un socle de valeurs qui structurent la société mahoraise. La rencontre de différents zama, dans le cadre de solidarité (masada) ou d’entraide (msaidiano), de renforcement de liens sociaux, familiaux (udjama) ou amicaux (wandzani), consolide lesdites valeurs communautaires issues des traditions, us et coutumes (âda na mila) et les revivifie. Ceci se conjugue avec les codes vestimentaires (mpindrio) et l’esthétique des costumes (vao) et leur cohérence avec les bijoux (daio). Comme dans toutes les cérémonies populaires (shuhuli pl.mazuhuli), l’art de la réception (mulahilikio) est de mise, avec tout un socle de codes (kawaida) et de savoir-faire (maârifa) et de savoir-vivre (adabu).

 

1. Site Officiel de la Commune de Chiconi -i (villedechiconi.fr) , le 31/12/2021
2. Madrassati : Madania et Salamia, dans la commune de Bouéni (Sud), Nourania dans la commune de Chirongui (Sud), Toyaria dans la commune d’Acoua (Nord) et Nidhoimya (Nord).

L'arabe est la principale langue des chants du debaa. Il s’agit, selon Mariata Said Ousséni, d’un « héritage » que les praticiennes du debaa perpétuent, au même titre que cela se fait dans le daira
et le mulidi. Les chants du debaa sont religieux et l'arabe fait sens pour la pratique. (Entretien du 04/07/2021, à Sada)
Ainsi, la langue du debaa récitée, ou psalmodiée est une forme de ré-appropriation, d’une manière singulière, de multiples registres de la littérature arabo-musulmane « maorisée ».
L’arabe est également employé pour donner les consignes. Ainsi, pour exécuter des mouvements, faire tenir des postures, l’Imam fera usage d’expressions « arabes ». C’est ainsi qu’Antufati Ayouba (2021), Imam de Madania, donne les instructions suivantes (liste non exhaustive) : 

Expression "arabe" utilisée Traduction approximative de l'expression utilisée La consigne transmise Equivalents corrects

Dhwarbu dufufi
Frappe de la percussion "Frappez la percussion" - Darba d-dufûfa
- Idribn d-dufufa
- Idribû d-dufûfa
Yadayni 'ala sama'i Les 2 mais sur le ciel Levez les mains au ciel Al yadayni ila s-sama'i
Arshillahni Trône Dieu Levez la tête/regard vers le Trône de Dieu Undhuru ila arshi llahi

En fait, il s’agit d’expressions censées relever de l’arabe. Néanmoins, elles ne respectent pas toujours les règles de la langue, mais leur usage « codé » est compris par toutes les praticiennes tant pour communiquer et faire les chorégraphies.
Le shimaore et le kibushi, langues vernaculaires de la communication à Mayotte, sont peu utilisées dans le debaa.
Cette faible utilisation des langues locales tient au fait que la composition demande à la fois des savoir-faire et de la disponibilité, tant cela est exigeant. Les fundi ne s’y consacrent pas. Mariata S.
Ousséni, présidente de l’association Sania à Sada, illustre cette situation par ce propos : « la composition est une grande affaire » (« utrunga trongo bole »)1, à travers laquelle on doit éviter les erreurs (kosa), viser à parler correctement (swaha).»
Ce qui n'empêche pas certaines troupes d'avoir quelques debaa en shimaore et kibushi, pour tout ou partie, et qui en font leur fierté. Ils se chantent dans le cadre d'animations et peuvent aussi être partagés dans des cérémonies publiques. La célèbre kaswida « dunia ranu samunta » (le bas monde, en grandes marées) en kibushi en est un exemple.
C’est un long texte du cheikh Abodo Boana Hery (1896-1978), de la confrérie de la Rifa’iyya à Madagascar, que Chamsidine Kordjee (dignitaire de la confrérie à Mayotte) se propose d’éditer 2. Aujourd’hui, l’auteure, compositrice et interprète Zily3 l’interprète avec un grand succès auprès des publics.

Le shimaore intervient en complément des expressions « arabes » utilisées pour donner les consignes. On aura des expressions du genre :
-Expression où se mélange shimaore et arabe : « Taratibu madufufi » (« coordonnez bien les daf »), avec taratibu (en arabe tartib ترتيب ), « ma » le préfixe mahorais pour le pluriel ; dufuf, « percussions » dont le singulier est daff دفّ (dafu en shimaore).
-Expressions en shimaore : « mvosheleo » (reprenez en choeur) ; « tayari » (soyez prêtes) pour amorcer un changement dans la chorégraphie.
-Parfois, en cassant le rythme du debaa, interviennent des expressions en shimaore non mélangées. Par exemple : « iriwalia nuru ya mutrume Muhamadi iriwalia » (la lumière du prophète Muhammad nous a éclairé). On les retrouve aussi dans les expressions d’accueil des convives (« marahaɓa », merci, bienvenue), ou dans des chants d’éloge des parents qui ont éduqué leur enfant jusqu'au mariage.

Globalement, le kibushi et le shimaore seront utilisés dans les situations où on a affaire à davantage d’animation qu’à des prestations chorégraphiques, pour mettre l’ambiance, sous le rythme du chant de debaa. Cela s’y prête mieux, comme le disent nos interviewés de l’association Sania.

La langue française peut, dans des contextes particuliers, être utilisée par certaines associations.
Nous citons l'exemple de Madarassati Madania de Bouéni et Sania de Sada qui ont participé à une commande de Rediab Ylang, une association de lutte contre le diabète. Le cahier des charges du projet prévoyait une restitution publique et la création de messages de sensibilisation à faire passer, en langues locales ou en français.

1. Madrassati : Madania et Salamia, dans la commune de Bouéni (Sud), Nourania dans la commune de Chirongui (Sud), Toyaria dans la commune d’Acoua (Nord) et Nidhoimya (Nord).
2. Document sous presse
3. https://www.youtube.com/watch?v=veR0jhwDW8Y

Patrimoine bâti

Cérémonie regroupant plusieurs villages, le debaa est organisé le plus souvent en plein air, sur les places publiques ou encore sur la terrasse couverte d’une mosquée. La zone est délimitée par une installation éphémère, composée de tissus placés de telle sorte à faire un grand carré ou rectangle qu’on appelle le ɓandra-ɓandra. Cette structure restera en place le temps de la cérémonie. Ses dimensions varient entre 20 et 30 m2, ou carrément 100 m2, si l'ampleur du debaa l'exige.
Parfois, les cérémonies ont lieu dans la cour des maisons, les vérandas, voire les salons. Il s’agit alors le plus souvent de répétitions ou de petites cérémonies. Les salles communes peuvent être utilisées, notamment dans les pays où résident les diasporas et où l'occupation de l'espace public est autrement réglementée.

Objets, outils, matériaux supports

Plusieurs outils et instruments interviennent dans la pratique du debaa des femmes.

Image Nom Typologie et information
  Kashakasha Cymbale : instrument circulaire ou demi-circulaire de la famille des idiophones, comportant un ensemble de disques métalliques.
  Tari Percussion circulaire uniface, sur cadre
  Dafu Cymbale : instrument circulaire ou demi-circulaire de la famille des idiophones, comportant un ensemble de disques métalliques et une peau de type tari.
  Safina

Répertoire de textes écrit en arabe et qui sert de base aux chants. Il est soit édité, soit manuscrit et recopié.

 

Costumes et esthétique

Image Nom Typologie et informations
  Bodi Vêtement porté sur le haut du corps par les femmes. Il fait partie du costume
  Bonbon Botte de bonbons, utilisé comme hishima, moyen d'honorification et placée de façon visible.
 

Bwe la msindzano

Mdjanfari

Mortier de corail dont le frottement du bois de santal contre lui crée une pâte appelée msidzano, utilisé, entre autres, dans l'esthétique des femmes. 

Bois de santal qui donne la couleur jaune/rouge au msindzano.

  Daiyo Ensemble de bijoux, parures d'une femme.
  Kabwa Chaussure, plutôt ouverte.
  Kishali Morceau de tissu de forme rectangulaire (châle) porté sur la tête, une épaule ou les deux épaules.
  Marke Billet d'argent utilisé comme hishima, moyen d'honorification et placé de façon visible.
  Saluva Tissu cousu, de forme circulaire, attaché autour de la hanche ou de la poitrine. Il est fait de tissu en coton (nambawani) ou synthétique (megalini). Il est souvent porté avec un kishali.
  Tampa Botte de fleurs de jasmin accroché à une épingle (kilabu).
  Vao Ensemble fait de saluva (lambe circulaire), kishali (lambe ouverte), body (haut) et kabwa (chaussure).

Outils et décorations

Image Nom Typologie et informations
  Ɓandra-ɓandra Chapiteau de forme carré ou rectangulaire, fait avec le soutien de la communauté. Aujourd’hui, on peut louer les services d’un prestataire pour installer des chapiteaux.
  ɗalo Natte faite de feuille de phénix tressées. Aujourd'hui, on utilise de plus en plus des nattes d'importation, faites de matières synthétiques.
  Djavi Natte faite de feuilles de coco ou de koma (palmier sauvage) tressées utilisée pour s'asseoir au ras du sol ; désormais, ce terme désigne aussi les nattes synthétiques d'importation.
  Tshandaruwa Rideau en tissu pour séparer l'espace cérémoniel de l'espace public. Celui-ci est anciennement (et traditionnellement) brodé de motifs de la vie quotidienne, de la nature ou du monde imaginaire. Aujourd'hui, on se sert de tous tissus amples pouvant servir.

L'acquisition des connaissances liées à la pratique du debaa des femmes à Mayotte se fait très tôt, à la fois au sein de la famille et des structures normatives telles que le pa lashio, la Madrasati, les Zama, ainsi que dans les confréries. L'enfant est en contact permanent tant avec le répertoire et les modalités de mise en oeuvre de la pratique. Dans ces différentes sphères, il apprend au fur et à mesure selon des règles bien codifiées.

La famille

Le debaa étant une pratique polymorphe, présente dans la vie quotidienne, les enfants, filles et garçons, écoutent, entendent, chantent des kaswida (chant religieux). Depuis qu'ils-elles sont petits-es. Ils-elles observent et s'approprient presque naturellement le phénomène social qui irrigue et structure la vie de la famille, du quartier et du pays tout entier. Les garçons et les hommes peuvent être associés activement à la pratique par la recherche des fagots, la mise en place du ɓandra-ɓandra, et tous-tes peuvent participer très jeunes à la confection des mets et des présents. Ils-elles vivent le debaa comme quelque chose de naturelle, faisant corps avec eux-elles.

Le pa lashio

Au pa lashio, expression qui signifie « maison des livres », aussi appelé shioni, « lieu des livres », s’organise l’éducation sociale et religieuse, à partir de l’enseignement du Coran et d’autres éléments de la culture. Le rôle de cette institution éducative est central dans l’instruction, même si son fonctionnement peut varier d’une contrée à l’autre, d’une expérience à l'autre.
Par ailleurs, les enseignements du pa lashio s’étendent au social, et notamment, dictent ou orientent les normes sociales. L’initiation à la lecture et à l’écriture est le champ quasi-exclusif de l’école coranique, avant l’obligation à l’instruction publique. L’adabu, qu’il soit décliné en « règles de conduite », « savoir-vivre » ou façon de faire dans les différentes circonstances de la vie, sera aussi l’un des thèmes de prédilection qu’assume le fundi (maître) dans le système d’apprentissage de cette institution. Des concepts comme musada (solidarité), msaidiano (entraide), hishima (respect honorifique), mastaha (respect révérenciel), font aussi partie des valeurs transmises par cette institution. Ainsi, préparé, chaque Mahorais-e pourra mieux assumer son rôle dans la vie quotidienne et faire face aux aléas. Il en va ainsi de l’apprentissage des textes chantés dans le debaa.
Les mercredis et jeudis sont les jours dédiés pour la psalmodie du Twaybal-Asmai et du Barzandji.
Concernant le Twaybal-Asmai, il s’agit d’une série de vers chantant les louanges de Dieu. Ils sont organisés sous-forme de mukhammasa, groupement de cinq strophes.
Le contact avec la kaswida se fait à travers le programme de l’enseignement de l’école coranique, il se produit à travers l’apprentissage et la psalmodie de ces poèmes sur les louanges à Dieu et des
éloges du Prophète.
Au-delà, le pa lashio participe aussi à l’initiation de l'enfant au chant soufi, même si cela n’est pas général, ni systématique. Il y a plusieurs titres qui sont chantés à l’école coranique et dont le refrain retentit dans les daira ou mulidi, autres cérémonies soufies locales. S’il n’est pas évident d’avancer lequel du shioni et des pratiques soufies ont influencé l’autre, le lien entre les deux est manifeste. Il est donc clair que l’initiation au chant à travers le programme du pa lashio est à prendre en compte dans la genèse de la création et la transmission du debaa.

Les confréries

Une autre voie de transmission de la kaswida est celle de l’école confrérique. Les cheikhs, leur halifa ou encore les fundi contribuent aussi, depuis longtemps, à diffuser les chants spirituels. Par ailleurs, bien que les manifestations soufies publiques soient réservées à la gent masculine, le debaa et le shenge semblent avoir déjoué le système en permettant l'accès aux femmes à cette forme de l’expression de la kaswida. Des témoignages lient cette initiation des femmes aux familles où on pratiquait le mulidi. L’observation du corpus chanté dans le debaa est lui aussi un témoin de cette parenté, puisqu’un certain nombre de textes sont issus de la Kaswida al-witriyya, la source première de la twarika du mulidi.

Les madrasati de debaa

La popularité croissante de la pratique du debaa, coïncide, depuis les années 70 et 80, à la création de zama, appelés madrasati ou madarasati et dont l’objet est l’enseignement du debaa.
Ces madrasati sont parfois le corolaire des pa lashio ou d’écoles d’apprentissage des kaswida confrériques. Ici, ce sont les femmes, elles-mêmes fundi coraniques ou épouses de cheikhs, qui dirigent ces organisations. Quelques fois, elles sont constituées de façon indépendante, et parfois divergente ou dissidente d’une association mère.
Ce sont ces madrasati qui ont la charge de la composition des chants, de la chorégraphie et des participations aux différentes manifestations de debaa des femmes.
Nous présentons ci-après trois madrasati qui oeuvrent activement pour la transmission du debaa.

Madrasati Nidhoimya

Nidhoimya est une association créée par Missiki Madi au début des années 80 du siècle dernier, avec l'objectif de répondre à un besoin d’organisation de la transmission de la pratique du debaa, et
de sa diffusion. Comme la fondatrice a été initiée, dans les années 50 par son père, Madi Issoufi Saïd Abdallah Be (Mtsamboro), fundi de mulidi, ses sources de debaa sont celles de cette congrégation, à savoir la compilation de divers poèmes réunis sous le titre al-Hamzia (poème avec rimes en hamza1). Elle s’est inspirée d’autres sources aussi comme les Hikam (sagesses) d’Ibn Atallah as-Sakandari (XIIIeS). Mme Madi estime qu’on doit apprendre de la naissance à la mort, et c’est la raison pour laquelle, elle continue ses lectures de divers textes pour renouveler sa culture générale.
L’association a été lauréate à un concours organisé en 2008, par le Conseil général de Mayotte, en vue de représenter Mayotte au festival les Orientales. Suite à cela, l’association a pu parcourir plusieurs festivals internationaux avec son art.
Aujourd’hui, l’association comprend plus d’une soixante-dizaine de membres, dont une partie est en dehors du territoire. La structure est très dynamique dans son domaine d’actions. Elle continue l’encadrement des jeunes et leur initiation, organise des cérémonies et répond aux différentes sollicitations dans la mesure du possible.

Madrasati Madania

L’association Madania a été fondée par Moinecha Malidi, femme de Madi Ali Dziki (1911-1991) qui était fundi de Kaswida. Le nom de l'association a été donné en référence à Médine (Madania signifiant médinoise). Elle et son mari dirigeaient un shioni très fréquenté tant pour l’apprentissage du Coran que pour les chants religieux. L'association a récemment été déclarée mais existe depuis les années 40 et a formé de nombreuses personnes, dont leur propre fille, Hikima Madi Ali (aujourd’hui octogénaire)-, ou encore Roukia Ansoya (sexagénaire) ) qui fréquentait un autre shioni coranique mais y bénéficiait de l’initiation aux kaswida. Les darasa (séances d’apprentissage) étaient ouverts à toutes et tous, même à celles et ceux qui n'étaient pas « inscrits » officiellement. En plus du Barzandji commun à tous, la référence principale dans l’apprentissage est al-Ka’s ar-rawiyya fi-lmada’ih i-n-nabawiyya (la coupe désaltérante sur les éloges prophétiques). Cette référence est aussi celle de la confrérie de la Rifa’îRifa’iyya .
Aujourd’hui, Madania compte une centaine de membres, parmi lesquels figurent des jeunes, différentes catégories socio-professionnelles, y compris des cadres. L'association continue d'oeuvrer pour le debaa.

Madrasati Sania

L’association Sania tire sa filiation de deux grandes figures du debaa, Kasabou Sidi (1887-1980) et Fatima Boinahery (1917-2016), deux fundi coraniques qui étaient des voisines. Elles initiaient les
femmes à la kaswida à travers leurs enseignements. Elles étaient actrices de la cohésion sociale et du rapprochement des communautés par leur pratique du chant religieux. Fatima Boinali évoque dans l’enquête, les rencontres qu’elle a nommé « madjilis » qui consistait à regrouper, dans les années 60, des élèves de Moinamkou, une autre fundi d’un autre quartier. A tour de rôle, chaque groupe invitait l'autre et pouvait à la fois échanger sur leur pratique et entretenir une saine rivalité.
En termes de références, c’était le Barzandji qui était utilisé, ainsi que d’autres textes manuscrits.
Là encore, l'association a été récemment déclarée (2003). Elle estime avoir une centaine de membres dont une partie n'est pas à Mayotte. Elle reste très active sur le territoire et également en dehors. Elle revendique d'être l’une des premières organisations de debaa à s'être produite en France hexagonale (dès 2004), avec le soutien de la mairie de Paris et la chaîne de télévision France O. L'association a aussi eu l'occasion de se produire à Mohéli, en Grande Comores et à Madagascar.
Actuellement, l’association est très active dans les mariages où elle fait des animations. Des répétitions régulières sont assurées en soirée dans la semaine et en journée durant les week-ends.
L'association prône l'ouverture, au point, si nécessaire, d'être à l'aise pour chanter du debaa en français.

Les pratiques pédagogiques

Dans tous ces zama, les apprentissages commencent tôt pour les apprenantes, bien avant l’adolescence. L’accès aux enseignements se fait dans le cadre de relations familiales, de voisinage et par affinités. En effet, les filles commencent dès l’âge de 5 ans à être sensibilisées à la pratique du debaa. Elles sont accueillies dans les répétitions, deux fois par semaine, en soirée (vendredi et samedi après 18 heures). Les apprentissages se font par étape :

Période d'observation, de 4 à 5 semaines où les apprenantes regardent, écoutent et essayent de s'imprégner des sons de la percussion et de l'ambiance chorégraphique (propos recueillis auprès d'Halima Attibou – membre de Madrasati Sania, le 19 février 2023).
Durant cette période « passive », l’encadrement observe la réaction des filles, se met à l'écoute des souhaits de leurs apprenties et teste leur potentiel pour les différentes expressions du debaa à savoir le chant, la chorégraphie, la percussion ou juste des qualités de leadership. Il leur sera possible d'expérimenter le tout, même si c'est la chorégraphie qui les attire davantage le plus souvent. C'est une phase de mise en confiance et d'apprentissage interactif.
La madrasati n'est pas une « garderie ». L'enfant est accompagné soit par la famille soit par une personne proche de la famille. Cette personne reste et assume un rôle de tuteur. Cette disposition crée les meilleures conditions de sécurité tant pour l'enfant et sa famille, compte tenu des horaires pour les apprentissages et favorise la participation de l'environnement de l'enfant. Cela a pour effet de créer également les conditions de solidarité, de partage collectif auxquelles la fille sera éduquée.
Les séances peuvent être filmées pour permettre un visionnage et avoir un support concret de discussion pour améliorer l'acquisition des savoirs. La fille peut continuer à travailler chez elle. Le support écrit est également utilisé. On encourage alors l'apprenante à privilégier la copie des textes en arabe.
Il existe souvent un safina, support de textes, auquel les membres reviennent, et qui leur sert de référence. Celui-ci peut être soit le Barzandji ou une autre compilation de kaswida, manuscrits ou édités : Mawlid ad-Dayba’i, al-Hamzia, al-Ka’s ar-Rawiyya, pour ne citer que les principaux. En cas de besoin, on s’y réfère. Il peut aussi y avoir plusieurs sources, notamment audio-visuelles.
Une fois un chant maîtrisé, il peut être présenté en public, lors d’une invitation à un debaa ou une cérémonie de l’association. C’est ainsi que font les fundi, elles-mêmes formées « à faire ». Cette méthode, légèrement revisitée, par les moyens modernes de stockage et de diffusion, est utilisée par les fundi du chant, de la chorégraphie ou de la percussion.
Dans ces madrasati, surtout les plus traditionnels, l’enseignement est fait par une fundi qui a développé ses compétences, souvent de façon empirique, durant plusieurs années de pratique.
Enfin, des modes de valorisation des compétences acquises et des performances accompagnent cet apprentissage. Ils passent par des expressions d’encouragement sous forme d'applaudissements pendant les répétitions, avec des « bravo », istawi (c’est beau), ikiri swafi (c’est bien réussi), ou encore ma sha Allah (loin de toi le mauvais oeil), etc Les costumes offerts pour les spectacles font aussi partie des moyens convoqués pour encourager les petites filles.

1. La hamza est la première lettre de l'alphabet arabe.

Personne ressource Présentation
  Missiki Madi est la fondatrice de la populaire association Nidhoimya située à Hamjago (Commune de Mtsamboro). Elle pratique depuis plus de 50 ans.
Elle a été initiée par son père, un fundi de Mulidi. Egalement pratiquante de shenge et du debaa, elle incarne le trait d'union entre ces pratiques confrériques. Elle reste encore très active dans l’enseignement du debaa, la création de nouveaux chants et participe aux différentes manifestations. C’est une véritable encyclopédie de savoirs sur les chants de kaswida et leur mise en debaa. En 2009, par la qualité de ses prestations, elle a ébloui le public des « Orientales » (Festival de Saint-Florent-le-Vieil où Mayotte était à l’honneur).
  Némati Mtsounga est une professionnelle du social et mère de famille très occupée.
Mais, elle est très impliquée dans le debaa.
C'est une affaire de famille. Sa grand-mère, Missiki Madi, est la fundi de l’association Nidhoimiya de Hamjago. Sa mère, comme ses tantes ont aussi baigné dans les kaswida mis en debaa. Dans l'association, elle joue les rôles de soliste et danseuse mais aussi d’animatrice de la troupe. Elle fait partie de la génération intermédiaire qui fait tout pour contribuer à la promotion de cet art féminin. Elle a une expérience de plus de 30 ans dans la pratique du debaa.
  Hikima Madi Ali est issue d’une famille de praticiens. Fondatrice de la madrasati Madania, elle a plus de 50 ans de pratique du debaa.
Elle a été initiée, depuis toute petite, par son père Madi Ali, dans les darasa (séance d’apprentissage) de son shioni (école coranique). Ensuite, elle a poursuivi son apprentissage auprès de sa propre mère,
Moinécha Malidi, fundi historique du shama Madania (commune de Boueni, au Sud) dont la troupe du même nom perpétue la transmission des héritages.
  Zabibou Madi Ali est une quinquagénaire qui, après plusieurs formations professionnelles, exerce en qualité de gestionnaire d’un commerce d’artisanat.
Aujourd’hui, elle jouit d’expérience de plus de 40 ans dans le debaa.
Son père, Ali Madi et sa mère Moinécha Malidi géraient un shioni. C'est là que Zabidou Madi Ali a appris les kaswida de la confrérie de la Rifa’îRifa’iyya et où elle a été initiée au chant de debaa. Anciennement soliste, elle reste très disponible pour l’accompagnement de la jeunesse qui veut découvrir et apprendre le debaa.
  Roukia Ansoya est une membre active de la madrasati Madania depuis sa plus tendre
enfance. Avec une expérience de plus 40 ans dans le debaa, elle transmet à la nouvelle génération. Elle travaille aux Finances publiques. Elle a fait son école coranique auprès de fundi Zanabou, qui l’a
initiée au debaa depuis son adolescence.
Elle a approfondi son chant auprès de Moinécha Malidi et son mari Ali Madi, grâce aux darasa du mois de Ramadan où on apprenait la burda ou d’autres kaswida issus du Barzandji. Depuis une quarantaine
d’années, elle participe aux activités de Madania (Commune de Bouéni, au Sud), dont elle a contribué à la structuration administrative. Aujourd'hui, elle y joue encore de la percussion et encourage les jeunes apprenantes.
  Antufati Ayouba, est professeur de français au lycée. Elle fait partie de l’association Madania, spécialisée dans le debaa.
Elle participe aux activités depuis son plus jeune âge (vers 8 ans). Elle a une expérience de plus de 20 ans dans le debaa.
Aujourd'hui, elle est l’imam et ses consoeurs la définissent comme « une boule d’énergie » qui propage l’enthousiasme et la gaieté dans le groupe.
  Radal-Houyouri Chadhuli, est professeure des écoles. Dès l’âge de 12 ans, elle assume le rôle de jeune imam dans la troupe de Madania. Elle a suivi le parcours de sa tante Chamsia Chadhuli, alors guide dans les chorégraphies du debaa. Son apprentissage s’est fait à travers la fréquentation du shioni de cette dernière. Sa pratique lui a enseigné les chants et permis de dépasser sa timidité. Aujourd’hui, elle jouit d’une expérience de plus 20 ans dans le debaa.
  Houroulaini Chanfi était directrice adjointe des Finances du Conseil départemental. En 2022, elle intègre le centre hospitalier de Mayotte toujours dans le domaine des finances.
Depuis sa plus tendre enfance, elle « baigne dans les pratiques confrériques », tant du côté de sa famille paternelle par le mulidi et le daira, et maternelle par le debaa. C’est tout son quartier qui est partie prenante des animations de debaa. Elle est la trésorière de l’association Sania, dans laquelle elle
joue aussi le rôle de soliste et d’animatrice d’ambiance. Aujourd’hui, elle capitalise une expérience de 30 ans dans la pratique du debaa.
  Mariata Attoumani est formatrice et présidente de l'association Sania, fondée par sa grand-mère, la célèbre Fatima Boinahéry.
Mariata a une expérience de plus de 30 ans dans le debaa.
Dès l'âge de 9 ans, elle a été initiée au debaa par sa mère. Elle a poursuivi et aujourd'hui joue les rôles de soliste, imam et chorégraphe. Son premier debaa a été enregistré dans les médias alors qu'elle était
une adolescente au collège. L’association est très active sur le terrain grâce à l’engagement de plusieurs membres qui contribuent aussi à l’encadrement des nouvelles générations et assurent la cohésion du groupe.
  Salima Salimini est au début de la trentaine et pratique le debaa depuis l’âge de 7 ans pourtant elle a déjà une expérience de plus de 25 ans du debaa.
C’est Echati Hila, sa maman et ancienne membre de Sania qui l’a initiée. Elle en garde encore le souvenir du premier saluva porté à l’occasion de son premier spectacle.
Aujourd’hui, cette infirmière de métier y joue le rôle d’imam et gère la chorégraphie qu’elle pratique par ailleurs. Le debaa est son premier centre d’intérêt : elle le vit au quotidien et le partage avec beaucoup d’engouement, à travers les cérémonies, les animations mais aussi dans l’encadrement des jeunes apprenantes.
  Halima Attibou est membre de la
madrasati Sania. Elle y pratique du debaa depuis plus de 30 ans.
Elle ne se reconnaît pas une compétence particulière, ni dans le chant, ni en tant qu’imam, malgré le fait qu’elle est fille d’une imam. Elle assume des fonctions administratives et logistiques dans
l’organisation. Elle ne raterait rien pour vivre sa passion pour le debaa. D’ailleurs, toutes les répétitions se déroulent chez elle.
Elle est l'une des pierres angulaires du bon fonctionnement de l’association.
  Hadidja Mzé Ali, est une native de la commune de Sada (au Centre). Non scolarisée, elle s’est initiée au debaa très tôt (à 10 ans) auprès du fundi Amina Boinamani. C'est une période qui l'a profondément marquée. Cela fait 48 ans qu’elle pratique du debaa.
En 1993, elle va vivre à La Réunion. Son activité professionnelle vise à promouvoir l'artisanat et la couture de Mayotte. Elle est également très active dans le milieu associatif. Elle fonde Espoir des îles qui a pour but de valoriser les richesses culturelles des îles du sud-ouest de l’océan Indien, pour favoriser une meilleure connaissance des différentes cultures. Ses
créations et ses ventes sont bercées dans le chant de debaa, la passion de sa jeunesse.
Elle veut faire découvrir l’art du debaa des femmes, à la fois à la diaspora mahoraise à La Réunion et aux Réunionnaises elles-mêmes.
Elle crée pour cela l'association Madrasati Watoinia. Elle anime des journées culturelles et des mariages, participe à des évènements multiples, échange avec d’autres associations de debaa, accueille des officiels mahorais et des institutionnels, etc. Son association a même fait « irruption » dans une campagne électorale.
Elle est présente auprès d'une dizaine d'associations réunionnaises qui pratiquent l’art du debaa un peu partout dans l'île.
  Echati Maanrifa est cadre de la collectivité départementale où elle a déjà occupé des postes à responsabilités. Elle est originaire de Kani Be, dans le sud de Mayotte.
Depuis sa plus tendre enfance, elle pratique le debaa, grâce à sa grande-soeur, fondatrice avec d’autres femmes, de madrasati Soifounia. Grâce à sa mère, elle a baigné dans le mawlida shenge. Elle en a recueilli un manuscrit de chants. Elle a elle-même composé des chants de debaa pour son shama. Forte d’une expérience de plus de 40 ans dans le debaa, elle continue à motiver les femmes de son village pour valoriser cette pratique.
Comme beaucoup de mahoraises, elle a dû quitter son île pour poursuivre ses études en France métropolitaine. Elle est revenue dans les années 1990. Passionnée de culture mahoraise, elle décide alors de mobiliser les femmes de son village avec la volonté de restructurer leur association par son
officialisation. Afin de sauvegarder le patrimoine, elle a fait broder des tshandaruwa (drap brodé) à Nosy Be pour décorer leur ɓandra-ɓandra.

AUX ORIGINES ÉTYMOLOGIQUES ET HISTORIQUES DU DEBAA DES FEMMES

Les origines du debaa des femmes à Mayotte continuent de faire l’objet de discussions. Nous tentons ici d'exposer une approche sous trois angles : celui des origines étymologiques, puis, sa genèse en mettant en perspective avec le debaa des hommes et les pratiques soufies, et enfin, sous l'angle des caractéristiques d’un genre nouveau.

Sur l’étymologie

La première hypothèse lie l’appellation « debaa », du point de vue étymologique, à l’anthroponyme Abdurrahmân b. Daybaa (886h/1461)1. En effet, le recueil de poèmes et de textes en prose, contenu dans sa compilation connues sous al-Mawlid al-Dayba’î2, (le mawlid d’al-Dayba’î) donne lieu à des nashid (chants liturgiques), appelés kaswida à Mayotte et dans l’archipel des Comores et dont la notoriété a pu servir de nom à un genre musical. Cette généalogie du debaa ne fait pas l'unanimité.
Nous ne disposons pas d’éléments historiques qui connectent les pratiques, à A. ad-Dayba’î. Mais, le recueil de mawlid (répertoire de textes sur la biographie du prophète Muhammad) est mis en chant, à travers différentes façons, dans le monde musulman de l’Afrique de l’Est jusqu’en Indonésie en passant par la Malaisie, notamment pour et par des enfants3.
Dans ces contrées, le Mawlid d’ad-Dayba’î côtoie la compilation du Mawlid https://www.youtube.com/watch?v=7WVh4F_hh1Mal-Barzandji (autre compilation d’éloges du prophète) et d’autres ressources confrériques, pour des célébrations par la psalmodie de poèmes, leur mise en chant ou leur mise en musique.
Cette hypothèse de la connexion à Abdurrahmân b. Daybaa se base sur le fait que ce terme est utilisé pour désigner une catégorie de textes mobilisés dans la cérémonie de chant et danses des hommes (dont on parlera plus bas), tant dans le mulidi (ou mreda) que dans le daira rifâ’i, mais aussi chez les femmes. Beaucoup de ces textes se retrouvent dans le recueil évoqué.

DU DEBAA DES HOMMES

La connexion du debaa à la Kadiriyya et au mawlida shenge

Ahamed Boinahéry (aujourd’hui octogénaire) originaire de Sada (au Centre) compte le debaa des hommes parmi les pratiques vivantes dans sa jeunesse, au même titre que l’a été le Mawlida shenge, bien antérieur (Entretien du 26/06/2021, à Mbouanatsa). Il faut comprendre par debaa ou Mawlida shenge, non pas seulement des répertoires chantés, mais aussi des évènements publics et des moments populaires. Dans les années 40-50, ce debaa des hommes concerne tout le territoire, avec une prééminence à Sada, Tsingoni et Mtsangaboua. Il s’agit de cérémonies nocturnes qui se déroulent sous un chapiteau comme le fait le mulidi aujourd’hui. Le protocole est d’ailleurs sensiblement, voire exactement, le même que dans ce dernier : à commencer par la fatiha (Acte d’ouverture d’une cérémonie ou une invocation), la psalmodie du Barzandjijusqu’à la partie chorégraphiée. Les chorégraphies se font autant debout qu’assis, comme le fait le mulidi. Même le hula (rythme du chant) est le même que celui du mulidi. Parmi les personnes qui ont marqué le debaa des hommes, il y a Sidi Abdou (alias, Ba-Riffay, père de Riffay) (1917-1987), qui est le propre beau-frère d’Ahmed Boinahéry. En revanche, la cérémonie s’arrête avec la prière du Fajr (aube), vers 5h du matin.
Selon M. Boinahéry, cette cérémonie de debaa masculin a existé jusque dans les années 1959/60, à la fin de l’indigénat. Ainsi, le dernier debaa des hommes qui a marqué le village de Sada s’est fait vers 1948, en présence de Mwen Charif (m. 1949 ?), célèbre cheikh de la Twarika shadhuli. Mais, « avec le debaa des hommes, on n’avait pas le temps de faire durer la cérémonie longtemps », martèle-t-il. Il fallait aller travailler le lendemain. C’était la période de l’indigénat. Avec l’avènement de la liberté, est venu le temps du développement du mreda. On ne parle pas encore de mulidi, mais de mreda. L’appellation mulidi est postérieure. En effet, le mreda a existé en parallèle au debaa des hommes. Le mreda, plus solennel, a été plus « côté », mais moins accessible. On y faisait appel pour des cérémonies d’une plus grande importance qui nécessitent de mobiliser les grands fundi (maîtres), comme le dénommé Abdouldjabar, originaire de Hagnoundrou (au Sud). En revanche, la cérémonie villageoise simple est honorée, avec des fundi locaux, par le debaa masculin. C’est le cas de l’acquittement de nadhara (voeu pieux) réalisé.
A. Boinahéry confie que sa propre mère (née en 1899) a dû s’acquitter d’un debaa masculin pour honorer la naissance de son seul garçon, lui-même, dont elle a attendu la venue désespérément, après déjà une dizaine d’accouchements. Ce témoignage conclut que le debaa des hommes est le mulidi lui-même, d’autant que les chorégraphies sont si proches.
Cette connexion du debaa des femmes à la confrérie du mulidi, est la voie par laquelle Missiki Madi s’est initiée. Celle-ci (née dans les années 40) est fille d’un fundi de mulidi de la commune de
Mtsamboro, au Nord de Mayotte. Elle témoigne y être introduite par son propre père aux chants issus du mulidi (de la confrérie kadiri), en privé. Mais elle reconnait que parallèlement à sa pratique, le debaa des femmes était déjà une réalité dans différentes localités qu’elle a citées : Sada, Pamandzi, Labattoir, Boueni, Mzouazi, Kani, mais aussi à Koungou et Majicavo. Elle deviendra par la suite fundi de debaa à Hamjago (commune de Mtsamboro). Or, on peut se questionner sur le type de confréries présentes au Centre et au Sud de Mayotte, de Sada à Kani. La réponse nous permettra de connecter le debaa à un parent, soit-il la Rifa’iyya ou la Kadiriyya, voire le shenge.
Or, A. Boinahéry a une position ferme sur ce sujet concernant l’ancrage de la twarika du mulidi, avec les manifestations de debaa des hommes et le mawlida shenge mixte. Missiki Madi, pour sa part, elle-même pratiquante de ce dernier, explique que le debaa des femmes est très influencé par la percussion de ce dernier, qui lui est antérieur. Dans cette hypothèse, le debaa aurait une connexion au mawlida shenge, par sa percussion.

La connexion à la Rifa’îRifa’iyya

Il existe, enfin un répertoire appelé « debaa d’homme » dans les pratiques confrériques de la Rifa’iyya. Mais, la connexion avec le debaa des femmes n’est pas évidente, car la chorégraphie y est tout à fait différente, chez les hommes et les femmes. Si la paternité avec cette confrérie est encore à l’étude, la parentalité est confirmée par plusieurs autres facteurs, comme les textes.
Chamsidine Kordjee, dignitaire de la confrérie Rifa’î, soutient aussi le lien entre le debaa des femmes et le « debaa des hommes ». Pour lui, cette transmission s’était faite à travers l’école coranique, dans le cadre d’une coopération avec des fundi venus d’Anjouan, dans les années 1920-30. Il s’agit du Sheikh Ahmad In Muhammad Khamis AL-Hadrami (m.1945). La diffusion des kaswida, selon cette hypothèse, s’est faite en Petite Terre (et principalement à Pamandzi) et à Mtsapéré. Ce qui appuie l’hypothèse petite-terrienne, c’est le fait que certains témoignages relèvent la pratique du chant religieux, depuis les années 20 du siècle dernier. Cette hypothèse connecte Pamandzi à Mtsapéré (commune de Mamoudzou). En revanche, nous n’avons pas d’indication précise sur l’initiation aux femmes, ni sur la transformation de la chorégraphie du Kandza, principale déclinaison du debaa masculin avec des chorégraphies des pieds, en chorégraphie des mains dans le debaa féminin . Mais, nous savons néanmoins que plus tard, dans les années 50, les femmes de Bouéni en sont initiées par Bacar Deba , originaire d’Anjouan et, dans la même lignée, par la suite en collaboration avec Madi Ali Dziki , fundi coranique et de kaswida. C’est ainsi qu’a témoigné les élèves de ces premiers fundi du sud.
L’enseignement des kaswida par Madi Ali Dziki à Bouéni, était donc d’abord le fait d’hommes.
Petit à petit, l’enseignement a été ouvert aux femmes. C’est ainsi que la génération de ses filles, Hikima Madi Ali (aujourd’hui octogénaire) 5 et ses ainées, ont pu en bénéficier, encore très jeunes.
Selon Boura Ali Hadhurami, petit fils de fundi Dziki, il y a eu une collaboration très intense entre son grand-père et Bacar Deba. Celui-ci est nommé ainsi « Bacar wa debaa » (Bacar du debaa), en raison de sa voix d’or, très appréciée dans la psalmodie des kaswida. Il a aussi enrichi les ressources avec de nouveaux textes. C’est dans ce contexte que Moinécha Malidi (épouse de Madi Ali Dziki) et sa cousine Amina Madi Charif ont trouvé un terrain d’innovation pour exceller dans les chants.
Cette collaboration se faisait aussi avec le fundi coranique de Kani Bé, Ousseni Papali (issu de Kadiriyya), avec une ouverture du chant à la femme. Tout ceci explique la genèse du debaa des femmes dans ces zones.
Dans un article récent très court sur « l’origine du debaa », il y a une reprise de cette hypothèse d’une origine Rifa’iyya, mais de façon exclusive.6 Ceci, comme vu plus haut, est tout à fait discutable, au vu de la pratique et des témoignages recueillis ainsi que les récits de vie. L’influence de la Rifa’iyya est réelle, notamment en Petite Terre comme le rappelle Rabouba Jr Al Shahashahani7, mais le debaa des hommes a bel et bien existé en dehors de cette confrérie, à travers le Mulidi des hommes. Cette cérémonie relève de twarika kadiriyya, essaimée dans tout Mayotte, du nord au sud. De fait, même si l’initiation des femmes au chant s’est faite à travers les différentes confréries, rien ne vaut l’influence du mulidi qui lui a inspiré sa chorégraphie, de façon définitive, sinon durable.


1. Les dates renvoient au décès. Avec la mention « h », elles relèvent du calendrier hégirien. Sans mention, elles relèvent du calendrier grégorien.
2. Maktabat Ishâ’at al-Islam, New Delhi, 69p. (sd)
3. Malaysian Islamic Nasheed for children - YouTube
5. Entretien de 25/05/2021
6. L'origine du debaa_Mourissoidi Yaankoub_2021.
7. Histoire du debaa aux Comores – Muzdalifa House

Le debaa des femmes, une pratique trans-soufie libérée ?

Même si les interactions sont possibles, dans une culture qui puise dans les mêmes sources, le debaa est le chantre de l’éclectique et de la synthèse. Il puise dans les sources confrériques de façon indifférente, en fonction des ressources disponibles et des inspirations des praticiennes.

Mais, le debaa des femmes, du fait même qu’il dépasse ses liens avec les confréries, s’est libéré du rituel, pourtant très caractéristique des cérémonies soufies, comme cela se retrouve dans le Mawlida Shenge, et de façon assez proche, avec le Daira ou le Mulidi. Seuls les usages spirituels « purs » continuent de faire appel aux pratiques confrériques sources.
Cette libération originelle, permet une évolution naturelle de la pratique qui suit sa genèse et se distingue par l'innovation constante (A. Ben Said, 2014). Dans le debaa, les femmes ont une autonomie dans la création musicale (ce qui n'est pas le cas dans le Mawlida Shenge, bien que pratique mixte). La chorégraphie du debaa, largement inspirée du mulidi, évolue sous d’autres influences telles que l'observation de la nature ou la danse indienne (Bollywood)...
L’absence d’autorité spirituelle unique fait de la pratique du debaa des femmes une caisse de résonance de toutes les influences culturelles issues du soufisme, mais aussi des autres formes d’expressions culturelles. Le debaa est une sorte de résultante, schématique, d'un processus de créolisation. Si, ici, le cadre contraint n'est pas externe, il n'en reste pas moins que la rencontre des différentes pratiques par les femmes, elles-mêmes, les a conduit à créer une nouvelle pratique en perpétuelle évolution.

Debaa et adaptation scénique

Le debaa a également su évoluer d'une pratique locale à un spectacle artistique répondant aux règles d'une tournée internationale pour participer à de grands festivals. Sous l'impulsion du conseil départemental, de 2008 à 2013, plusieurs troupes de debaa des femmes se sont déplacées en France métropolitaine, en Europe et ailleurs dans le monde. Les praticiennes ont saisi cette volonté de promotion de leur art comme une opportunité pour se confronter aux enjeux d'adaptation qu'impliquait cette diffusion scénique : répétitions, fiche technique, répertoire défini à l'avance, durée des chants, durée du spectacle, organisation, nombre de personnes sur scène...
Une expérience riche, réussie dont toutes continuent, aujourd'hui encore d'en parler comme une « aventure » qui a fait évoluer positivement la pratique.
Les praticiennes du debaa l'ont adapté, en développant les capacités pour la scène dont illustre très bien le schéma ci-dessous. Elles sont passées du jeu pour soi et entre soi au spectacle pour un public, le plus souvent non averti. C’est ainsi que nous sommes passé d’un « face à face » entre la percussion et la chorégraphie dans les cérémonies entre soi et une présentation où les deux regardent face caméra pour être, mais aussi pour être filmé, ou vu par les spectateurs en cas de « spectacle ». Des évolutions assumées par les praticiennes. Cette nouvelle configuration a été adoptée, depuis que le debaa se produit pour être diffusé. Ainsi, en 2008, la production du debaa à l’échelle internationale a consacré des adaptations aux scènes, aujourd’hui devenues « normales », comme le montre le schéma suivant :

Fiche technique des scènes de Debaa

Aujourd’hui, ce modèle est unanimement adopté et/ou réajusté si nécessaire, notamment lorsque le debaa se réalise hors d’un contexte d’usage rituel, par exemple pour une diffusion.

Debaa/créativité

Du fait de sa position, pratique nouvelle qui emprunte aux autres, les praticiennes du debaa sont en permanence dans un processus créatif voire d'innovation. On observe plusieurs initiatives :
–la madrasasti Watoinia de Sohoa au centre-ouest de l’île n’a pas hésité à collaborer avec un dénommé Saïndou Sidi Djoumoi connu également sous le nom Saïndou Colo Be, un fundi de mawlida shenge. De cette collaboration est née le debaa « Marahaɓa » mélangeant la sonorité du debaa et celle de shenge avec l’introduction du azulahi c’est-à-dire le ngoma joué au rythme du shenge,
–l’artiste féminine Zily innove avec des reprises de chants de debaa travaillés en studio. Le format se résume à la chanteuse, un scénario et la production de clips de très grande qualité,
–les associations s’inspirent des danses indiennes afin de proposer de nouveaux gestes pour la composition de leur chorégraphie.
–de nos jours, le ɓandra-ɓandra dit traditionnel est remplacé par des chapiteaux en bâche. Ces derniers apportent un confort. Le paysage du debaa s'en trouve modifié. Cette apparente modernité invalide l’autonomie et les capacités que les praticiens avaient dans le montage du ɓandra-ɓandra. Le contenu du debaa n'est pas affecté, mais la réalisation des conditions de la pratique s'adapte à un environnement de plus en plus urbanisé.
Plus globalement, on observe une immersion des femmes du debaa dans les pratiques jusqu'alors exclusivement masculine, tant dans le milieu profane que religieux : c’est le cas pour le Mulidi, mais on le constate aussi dans le shigoma, ou encore le daira... Cela augure de nouvelles adaptations pour toutes les pratiques à l'instar du debaa.

Vitalité

Le debaa des femmes est omniprésent sur tout le territoire de Mayotte et là où il y a la diaspora. Il s'impose à tous les moments de la vie, des plus simples aux plus fastes en passant par le spirituel et le solennel. Il célèbre la vie. Il intervient même dans des espaces naguère réservés au Mbiwi (expression féminine profane), dans les animations ou les célébrations de mariage. Quelle que soit la taille de la commune en nombre d'habitants, il y a toujours plusieurs zama (associations) actifs.
La pratique est portée par les femmes qui occupent tout à la fois les rôles de présidente, de fundi, d'imam, de chanteuse, de percussionniste, d'organisatrice, de gestionnaire pour que la pratique soit transmise et poursuit sa trajectoire de pionnière, notamment en allant sur le « terrain » des pratiques masculines. Toutes les générations sont concernées. La tournée internationale du début du 21ème siècle a été profitable et constitue encore un levier de vitalité. Le debaa est « l'ambassadeur » patrimonial de Mayotte, conforté par le prix France music des Musiques du Monde, reçu en 2009.
Le debaa se modernise en utilisant les nouveaux outils de communication tels que les réseaux sociaux. Cette mise en visibilité attire les jeunes. C'est un espace d'expression où il est possible d'exister, d'avoir sa place, d'être utile, de s'épanouir et de montrer ses talents, y compris ses beautés. Les jeunes s'y retrouvent et intègrent les zama pour découvrir et apprendre le debaa qui reste, pour autant, toujours exigeant en appui sur les fondamentaux de la tradition.

Menaces et risques

Le debaa contient les risques de sa vitalité. Dans plusieurs associations, la présence des « anciennes » ne laisse pas – encore – de la place aux plus jeunes pour prendre des responsabilités, notamment pour la création de contenus et le management des troupes. Les jeunes femmes sont là mais manquent de confiance en elles et « s'abritent » derrière les anciennes. Le temps fera le chemin mais il y a tension dans certains zama où le départ de fundi primal se fait durement sentir.
Autre aspect de risques intimement lié à la vitalité du debaa, la pratique repose sur des femmes de plus en plus instruites, qui apportent leurs compétences en matière de structuration mais il est nécessaire pour elles de trouver l'équilibre entre leur emploi, la vie de famille et l'implication qu'exige le debaa.
La libre circulation des biens « pas chers » profitent au commerce d'importation. Cela impacte ce patrimoine culturel immatériel. Il y a risque de perte des savoirs liés à la fabrication des instruments (le tari), du ɓandra-ɓandra car de plus en plus les praticiennes achètent en magasin et louent des chapiteaux. De manière générale, l'ensemble des accessoires relatifs à la pratique sont de moins en moins issus des artisans alors qu'ils en vivaient (exemple de la broderie du petakufe, du tshandaruwa...).
Le debaa n'échappe pas aux phénomènes associés à la mise en visibilité : marchandisation et transformation intéressée. Certains zama négocient et monnaient des prestations télévisées, faisant ainsi monter « des enchères ». Pour les « gardiennes » de la pratique, il y a là un risque de perte des valeurs intrinsèques au debaa. Les initiatives des artistes, notamment pour les clips où il n'y a plus la notion de collectif, de solidarité, de mise en commun mais essentiellement la maîtrise artistique et technologique inquiètent aussi les membres de la communauté. Les mêmes initiatives où le debaa interpénètre d'autres espaces des expressions soufies interrogent également une partie de la communauté qui se demande si c'est toujours du debaa

Modes de sauvegarde et de valorisation

Le conseil départemental a engagé plusieurs actions en faveur du debaa :
- l'accueil d'une installation artistique du debaa durant deux ans (2015 à 2017) au MuMA (musée de Mayotte). Cette exposition a permis de faire de la médiation culturelle en faisant découvrir le champ musical du debaa, en initiant les jeunes visiteurs au chant du debaa et à la chorégraphie.
Dans une prochaine exposition prévue en 2025 sur les pratiques soufies, une autre valorisation du debaa est prévue aux côtés des autres pratiques du genre.
- le soutien de la tournée internationale visant à faire découvrir le debaa des femmes sur les scènes françaises, européennes et ailleurs dans le monde de 2008 à 2013. C'est également dans ce cadre qu'a été réalisée l'étude des textes chantés (une approche prosodique, thématique et un essai de traduction en français de ces textes). La traduction de ces textes s’est étoffée et enrichie d’autres textes chantés par les autres pratiques soufies dans l’objectif de les éditer, dans le cadre de l’exposition à venir.
- à travers une résidence artistique financée par la DAC Mayotte, une installation de debaa a été réalisée par les chercheuses et artistes Elena Bertuzzi et Laure Chatrefou (voir infra installation artistique) et la production d’un ouvrage dans la série « Patrimoine caché », avec le titre « au coeur du debaa : un chant soufi chanté par les femmes» (2015)
Les communautés réalisent régulièrement des debaa et différentes animations qui visent à faire découvrir de façon ludique la pratique (exemple des concours).
L'utilisation des médias constitue aujourd'hui l'un des plus puissants leviers de visibilité et de mise en contact de la pratique avec le plus grand nombre. Ce qui a pour effet de contribuer à l'attrait des jeunes pour la pratiques (diffusion toute l'année sur les chaînes locales, publiques et privées, création de dvd promotionnels, diffusion sur des réseaux sociaux).

Actions de valorisation à signaler

Médias et production:

-CD « Chant des femmes soufies », France musique des Musiques du monde (2010) / Concours de debaa à la TV : debaan-ni - Mayotte la 1ère. (francetvinfo.fr)
-Deba- Les femmes de Mayotte au festival les Orientales (2008)
-De 2008 à 2013 : 5 associations (2 du nord de Mayotte : Nidhoimya et Toyaria, et 3 du sud : Salamia, Nourania, Madania) ont été programmées par Zaman Production sous la direction de Jean-Hervé Vidal sur des scènes internationales (France, Europe avec le Royaume-uni, la Suède, Norvège, Suisse, l'Espagne…et ailleurs dans le monde tel qu'à Shanghai, en Turquie, Inde et au Maroc).
-Accompagnement du Conseil départemental des 5 troupes par un encadrement et des préparations, ainsi que par la constitution d'un dossier comprenant les textes chantés dans la tournée (2008-2012)
-Participation d’associations à différentes manifestations au niveau régional (Madagascar, Zanzibar, La Réunion…)

Installation artistique

-Salle d’immersion de debaa, dans le musée de Mayotte, avec 10 TV, présentant différentes prestations (2015-2017)
-« Au choeur du debaa » est une installation immersive d’Elena Bertuzzi et Laure Chatrefou permettant la projection de debaa de façon immersive (2017) ; Installations artistiques à Mayotte,
La Réunion, au Brésil et ailleurs.

Prix autour du debaa

-Prix Rémy Leveau pour la thèse d’Elena Bertuzzi, « s'imposer en dansant », 2023.
-Premier prix Arte Laguna Prize 2017 à Venise, Institut du monde Arabe à Paris, Mucem à Marseille, Biennale d’art contemporain à Rabat, Cité des arts à St Denis à La Réunion, Institut français de Maurice, Projet Ose à Montréal.

Modes de reconnaissance publique

-Prix France music des musiques du Monde, reçu à Babel Med, en mars 2009.

La principale mesure vient de la communauté elle-même. Il y a une auto-gestion. Les occasions de réaliser du debaa sont constantes puisque la pratique s'inscrit dans la vie réelle. Les responsables des structures déjà en place sont animées de la volonté de continuer leur travail de transmission et valorisation, y compris en allant vers les évolutions à caractère technologique, économique.
Le maintien du dispositif classique qui a fait s’implanter le debaa est néanmoins privilégié pour la pratique générale et la transmission à tous les âges : l’apprentissage des chants auprès d’une fundi.
Le cas échéant, et en l’absence de fundi, les « assistantes d’office » prendront le relai, comme cela se fait déjà dans les faits.
Les rencontres intergénérationnelles et inter-villages sont plébiscitées par la communauté comme moyen efficace pour les échanges culturels et le partage des expériences.
Sur le plan institutionnel, le conseil départemental va continuer son accompagnement, soutien à travers ses missions et dispositifs. Plusieurs actions sont déjà en cours à des degrés variables d'avancement :
- organiser des festivals à Mayotte et en dehors, là où les diasporas sont structurées et prennent des initiatives,
- réaliser l’exposition « La musique : corps et âmes » ou « les voix soufies », en 2025, au musée de Mayotte,
- publier les textes du debaa qui ont été traduits pour mieux les rendre accessibles,
- soumettre cet inventaire au ministère, en 2024, pour un versement dans l'Inventaire national du patrimoine culturel immatériel,
- Faire vivre la délibération n°2018.00133 du conseil départemental visant à solliciter l'Etat pour porter la candidature du debaa des femmes à Mayotte auprès de l'Unesco pour une inscription de la pratique sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité,
- Créer une organisation pour piloter et animer ce projet d’inscription avec en chef de file le MuMa.

Récits liés à la pratique et à la tradition

Antufati Ayouba : « Ce que j'apprécie dans le debaa, c’est sa touche liée à l’élégance des gestes, l’harmonie des sons et l’agencement des couleurs. Pour moi, le debaa est un tout, un charme total qui mobilise tous les sens ».
Echati Maanrifa : « Le debaa n’est pas juste un chant et une danse. C’est également une école de la vie ». Elle lançait des défis aux jeunes filles pour les encourager à exceller dans les études. Et comme réponse pour les bonnes notes, celles-ci pouvaient chanter comme soliste. A travers la pratique, les filles travaillaient sur leur timidité, les expressions (corporelle, prendre la parole en public). Pour elle, grâce au debaa, chacune sait occuper sa place et reconnaître à l’autre la sienne.
Fatimati Nazariou, adolescente. A force d’accompagner sa mère au debaa depuis 4 ans, elle est aujourd’hui une Imam (encore apprentie). Elle considère que les matshatshari font partie des moyens qui vont permettre aux jeunes de s’intéresser davantage au debaa. Cela veut dire qu'il y a des activités d’animation proposées. Les jeunes ont besoin de sortir et surtout de sentir qu'il y a du dynamisme. Ils peuvent s'y reconnaître. « Lorsque cela est ainsi, le debaa va toujours continuer ».
Hikima Madi Ali estime que les nouvelles générations ont trop délaissé la connaissance des anciens et ne s’en préoccupent pas, à son grand regret. Elle a une vision d’un debaa actuel, dénaturé par rapport à sa propre jeunesse.
Houroulaini Chanfi « Je ne me soucie guère du sort du debaa. Il est entre de bonnes mains avec la jeunesse ». « On doit être swag (avoir du style) tout en gardant ses origines », dit-elle. Elle voit un avenir aussi dans l’ouverture aux autres modes d’expression artistiques et confrériques, la promotion par les concours, ainsi que les modes de diffusion modernes. Elle souhaite la création d'un conservatoire qui proposerait l'apprentissage du debaa.
Mariatta Attoumani se donne comme mission la « pérennité et la transmission » du debaa (ri itahidi ya sulawe), car « le debaa est plus qu’une affaire de familles. C’est une valeur communautaire qu’il faut préserver », selon elle.
Missiki Madi est une véritable encyclopédie de savoirs sur les chants de kaswida et leur mise en debaa. Initiée dans le mulidi, pratiquante de shenge et fundi de debaa, elle connecte les trois pratiques et dit, nous citons « le debaa doit sa percussion au Mawlida shenge et sa chorégraphie au Mulidi ».
Naëlie-Anna Achirafi, adolescente, est la fille de Mariata Attoumani qui baigne dans le debaa depuis sa plus tendre enfance. Contrairement à sa mère, elle considère que le debaa a de beaux jours devant lui. Pour cela, il convient de maintenir ce qui fait « socle » qu’elle résume en trois choses : 1/ faire du debaa un « truc » de famille ; 2/ maintenir les rencontres intergénérationnelles ; 3/ continuer à se référer aux livres comme le Barzandji et apprendre la percussion auprès des fundi.
Némati Mtsounga qualifie la programmation internationale, consécutive au concours de 2008, comme étant « une belle aventure » qui a propulsé le debaa de Mayotte dans l'espace public médiatique et a permis de faire prendre conscience de sa valeur. ». Elle croit en l’avenir du debaa et souhaite que les autorités continuent de prendre conscience de son intérêt et qu'elles mobiliseront les moyens pour permettre une meilleure connaissance et valorisation du debaa.
Radal-Houyouri Chadhuli se dit avoir « le debaa dans le coeur et le rythme dans la peau ». « C’est aussi un art qui anime ma vie ».
Roukia Ansoya « Le debaa m'apporte gaieté (ujividza) et plaisir (ladha) ». Elle en use à gré pour accompagner ses activités du quotidien et trajets professionnels.
Zabidou Madi Ali : «Le debaa est une affaire de famille et un patrimoine à sauvegarder». Elle ne se voit pas vivre en dehors de cet héritage dont elle a hérité de son père et sa mère et qui anime son quotidien.

Bibliographie sommaire

En français

Ben Said Abdoul-Karime, « Le debaa des femmes, un patrimoine mahorais », Taarifa (revue des Archives départementale de Mayotte », N°4, p. 29-43
Ben Said Abdoul-Karime, Randrianari Victor, « Debaa ; chant des femmes soufies », Ocora Radio France, prix France musique des musiques du monde, 2009.
Bertuzzi Elena et Chatrefou Laure, Au coeur du debaa ; un chant soufi dansé, coll. « Les patrimoines cachés », Direction des Affaires Culturelles, août 2015, 63p.
Bertuzzi Eléna, S’imposer en dansant : créativité et prestige des femmes de Mayotte, Thèse de doctorat en lettres et sciences humaines, anthropologie générale soutenue le 21 octobre 2021 à
l’Université Paris Nanterre
Chanfi Ahmed, « Introduction : le renouveau de l’islam soufi », Archives des sciences sociales des religions, n° 135, juillet-septembre 2006, Réveils du soufisme en Afrique et en Asie, p. 9-15.
D’Herouville Pierre, « Maulidi Ya Homu, dit « Mulidi » : une goutte dans un océan », v. 14.0, décembre 2010, 39 p.
Penrad Jean-Claude, « Religieux et profane dans l’école coranique : le cas de l’Afrique orientale et de l’océan Indien occidental », Cahiers d’Etudes africaines, XLII (1-2), 167-170, 2003, p. 321-336.
Randrianari Victor, Ile de Mayotte : Musiques, danses et instruments traditionnels, Pôle des Musiques Actuelles, La Réunion.
Samson Guillaume, « France-Mayotte. Debaa. Chant des femmes soufies », Cahiers d’ethnomusicologie, 24 | 2011, 291-292.

En arabe : (référence en arabe, puis traduction de son titre)


مولود الديبعي، مكتبة إشاعت الإسلام، ثني دلهي، )الهند( د.ت، 96 
Al-Dayba’i, Le nouveau-né d’al-Dayba’î, Librairie Ishâ’at al-Islam, New Delhi, Inde (SD), 96p.
أبو بكر البغدادي، القصيدة الوترية، مكتبة إشاعت الإسلام، ثني دلهي، )الهند( دت، 326 ص
Abu Bakr al-Baghadadi, Le poème aux vers impairs, Maktaba isha’at al-Islam, New Delhi
(Inde), 326p (sd)
علي أبو بكر بن عمر، الكأس الروية في المدائح والصائد الرفاعية، دار إحياء الكتب العربية، عيسى البابي
الحلبي وشركاه، )مصر( 1977 م، 374 ص
‘Ali Abu Bakr b. ‘Umar, la coupe désaltérante sur les éloges prophétiques, Dar ihya al-
Kutub al-Arabiyya, éd. ‘Isa al-Babi al-Halabi et Co (Egypte), 1977, 374p.
إسماعيل بن السيد محمد سعيد القادري، الفيوضات الربانية، مكتبة إشاعت الإسلام، ثني دلهي، )الهند( دت، 223 ص
Isma’il b. Sa’id al-Qadiri, les effusions seigneuriales, Maktaba isha’at al-Islam, New Delhi
(Inde) 223 p (sd)
نور الدين بن حسين بن محمود ، السفينة الشاذلية اليشرطية، دار الصناعة للكتابة والطبعة، مروني )جزر
القمر(، 1987 م، 184 ص
Nuruddin b. Husayn b. Mahmud, Le recueil shadhili yashruti, Dar as-Sina’a lilkitaba wa ttab’a,
Moroni (Comores), 1987, 184p.
مجموع مولد شرف الأنام، مولد برزنجي مكتبة إشاعت الإسلام، ثني دلهي، )الهند( د.ت، 216 ص
Compilation de mawlid de la meilleure créature, mawlid de Barzandji, Librairie Ishâ’at al-Islam,
New Delhi, Inde (SD), 216 p.
التخميسة المنظومة: أسماء الله الحسنى، مكتبة إشاعت الإسلام، نثى دلهي)الهند(. 31 ص
Le cinquain poétique : les meilleurs noms de Dieu, Librairie Ishâ’at al-Islam, New Delhi, Inde
(SD), 31 p.

Complément de documentation

-Documentation en lien avec l’exposition de debaa de 2015 : feuilles et cartels de salle liés à l’exposition sur le debaa, 2015-2017 ; texte traduit des chants de l’installation mise en scène, 2015 ; « le debaa » in le MuMA s’expose, 2018, pp.16-24
-Suivi de l’accompagnement des troupes de debaa, dans le cadre de la programmation à l’échelle internationale de 2008 à 2011 (fonds de la Direction de la Culture et du Patrimoine)
-Entretiens semi directifs réalisés par Mohamed Mtrengoueni avec des praticiennes du debaa, en2012-2013 (fonds de la Direction de la Culture et du Patrimoine)
-Entretiens menés dans le cadre de la rédaction de cette fiche PCI (fonds du Musée de Mayotte) : Némati Mtsounga, (Sada), Missiki Madi ( Hamjago) ; Hadidja Mze Ali (Saint André, Réunion) ; Hikima Madi Ali (Bouéni), Roukia Ansoya, (Bouéni) ; Saloua Abaine (Bouéni) ; Zabibou Madi Ali (Bouéni) ; Houroulaini Chanfi (Sada) ; Salima Salimini, (Sada) ; Mariata Attoumani (Sada) ; Fatima Boinali (Sada) ; Halima Attibou(Sada) : Radal Houyouri Chadhouli (Bouéni) ; Antufati Ayouba (Bouéni)
-Captation audiovisuelle de la réalisation de la broderie petakufe (fonds du Musée de Mayotte, 2023)
-Documentation sur les animations de Shime : sur les textes de debaa en animation (Houlam Boinaidi, Anssifati Halidi)
-Traduction en français d’une centaine de textes de debaa et de shadi (fonds du MuMA)
-Captation audiovisuelle d’entretien de femmes de 5 groupes accompagnés par le Conseil départemental pendant 5 ans. (fonds de la Direction de la Culture et du Patrimoine, 2008-2012)

Filmographie sommaire

Debaa traditionnel qualifié de « nostalgigue » : https://www.youtube.com/watch?v=w3mRnZZpNsM
Mayotte au festival Les orientales (2008) : deba - les femmes de Mayotte - les Orientales - 2008 - Vidéo Dailymotion
Debaa de Nidhoimia et Madania sur un CD promotionnel : https://www.dailymotion.com/video/x6asx3 ; https://www.dailymotion.com/video/x6av71
Debaa en marge du festival des arts sacrés (Fès, Maroc) : Déba des femmes de Mayotte - Festival des musiques sacrées de Fès 2009 – YouTube
Appropriation du debaa par l’artiste Zily : https://www.youtube.com/watch?v=veR0jhwDW8Y
Mulidi féminin : 418) Moulidi Femme maoraise – YouTube

Sitographie sommaire

Extrait de debaa de debaa à écouter :

Deba (Mayotte - France) par Zaman Production (soundcloud.com)

Des pages Facebook de shama (association)

(7) Madàrassati Màda n iia | Facebook
(6) Madrassati Sania Sada | F a cebook
(7) Madarassati Laïnya de Lorient 56100 Bretagne | Lorient | Facebook

Sur la tenue et costume

Le Salouva : tenue traditionnelle mahoraise – Afroculture.net
Le Salouva vous va si bien , 2015. DIAPOCLIP 1 – YouTube

Praticiens rencontrés et contributeurs de la fiche 

Prénom Nom Fonction Coordonnées postales Courriel
Saloua Abaine Membre de l'association Madania 8 rue Abaine
97620 Bouéni, Mayotte
salouaabaine@gmail.com
Naëlie-Anna Achirafi Jeune membre de l'association Sania, apprentie imam    
Roukia Ansoya Membre de l'association Madania, Bouéni (Sud) 2 rue Abdou Moussa, 97620 Bouéni, Mayotte baba.rasmya@gmail.com
Halima Attibou Membre de l'association Sania ; Sada (Centre-Ouest) Quartier Gnambotiti, 97640 Sada, Mayotte kifkidm@hotmail.fr
Antufati Ayouba Membre de l'association Madania, Bouéni (Sud) 5, rue du Mont Cornet
60590 Labosse
ayouba.antufati@gmail.com
Ahmed Boinahery Dignitaire de Sada Quartier Kavani
97640 Sada
 
Fatima Boinali Membre de l'association Sania, ancienne soliste ; Sada (Centre-Ouest) Ancienne rue du Dispensaire,
Gnambotiti, 97640 Sada,
Mayotte
 
Radal-Houyouri Chadhuli Membre de l'association Madania, Bouéni (Sud) 8 chemin Bia Hassani,
97620 Bouéni, Mayotte
radalchaduli@gmail.com
Hourouliayni Chanfi Membre de l'association Sania ; Sada (Centre-Ouest) Rue Chanfi, Mtsangamtiti
97640 Sada, Mayotte
hourou.chanfi@hotmail.fr
Echati Maanrifa Membre de
l’association
Soifounia, Kani Be
6 rue Bandari Yamzoungou
Kani-Bé
97625 Kani-Bé
echati.maanrif
a@gmail .com
Missiki Madi Fondatrice et fundi
de debaa de
Madrasati
Nidhoimiy ; Hamjago
(Nord)
Rue Ma Halima, Hamjago,
97630 Mtsamboro, Mayotte
 
Hikima Madi Ali Membre de
l’association Madania
Route de la Plage
97620 Bouéni, Mayotte
   
Zabidou Madi Ali Membre de
l’association
Madania ; Boueni
(Sud)
14 chemin Moussa Baco,
97620 Bouéni, Mayotte.
 
Némati Mtsounga Membre de
l’association
Nidhoimya

41 Rue Ma Halima
97630 Hamjago
nematimtsoun
ga@yahoo.co
m
Fatima Nazariou Jeune membre de
l’association Sania,
apprentie imam
Impasse Mavadzani (quartier
Kamicase), 97640 Sada,
Mayotte
 
Mariata Saïd Ousseni Membre de
l’association Sania,
ancienne soliste ;
Sada (centre Ouest)
Impasse Mavadzani (quartier
Kamicase), 97640 Sada,
Mayotte
mariatasaid77
4@gmail.com
Salima Salimini Membre de
l’association Sania,
ancienne soliste,
Sada (centre Ouest)
Quartier Gnambotiti, 97640
Sada, Mayotte
saliminisalima
@yahoo.fr

Métadonnées de gestion

Rédacteur(s) de la fiche

Abdoul-Karime Ben Saïd, Directeur du Musée de Mayotte, chercheur en patrimoine
06.39.69.95.25/abdoulkarime.bensaid@cg96.fr

Achoura Boinaïdi, Cheffe de service de la conservation et de la recherche, Anthropologue, Musée de Mayotte
06.39.69.77 .35/ achoura.boinaidi@cg976.fr

Eric Alendroit, chargé de mission inventaire et patrimoine immatériel, Région Réunion – Direction culture et sports
alendroite@gmail.com / eric.alendroit@cr-reunion.fr

Enquêteur(s) ou chercheur(s) associés ou membre(s) de l’éventuel comité scientifique instauré

Victor Randrianary, Ethnomusicologue, membre du conseil scientifique du Musée de Mayotte
victorandrianary@yahoo.fr

Chamsidine Kordjee, Dignitaire de la confrérie de la Rifâiyya, membre du conseil scientifique du Musée de Mayotte
kordjee.chamsdine@gmail.com

Hakim Saïndou, chef de bureau audiovisuel et multimédia, Musée de Mayotte
hakim.saindou@cg976.fr

Naouir Hassani, technicien audiovisuel, Musée de Mayotte
naouir.hassani@cg976.fr

Arnauld Martin, Conservateur du Patrimoine, Conseiller musée et référent PCI, Dac-Mayotte
arnauld.martin@culture.gouv.fr

Houlam Haladi, Membre de l’association Shime
haladi@live.fr

Anssifati Halidi, Gérante de MayPat culture, pratiquante de debaa
contact@maypatculture.com

Faissoili Maliki, ancien Directeur de la Culture mairie de Pamandzi (Mayotte)
faissoili.maliki@gmail.com

Eric Alendroit, Chargé de mission inventaire et patrimoine immatériel à la Région Réunion – formateur (2021, 2022 et 2023), suivi de l'inventaire, encadrement dans la rédaction de la fiche et relecture
alendroite@gmail.com / eric.alendroit@cr-reunion.fr

Lieu(x) et date/période de l’enquête

Mayotte- 2008-2013
Mayotte 2021 - 2023

Données d’enregistrement

Date de remise de la fiche : Décembre 2024
Année d’inclusion à l’inventaire : 2025
N° Ministère de la Culture : 2025_67717_INV_PCI_FRANCE_00547
Identifiant ARKH : <uri>ark:/67717/nvhdhrrvswvksrt</uri

Comment contribuer à l'inventaire : la méthode : http://pcilab-new.huma-num.fr/contribuer
Accéder à la fiche sur Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Debaa

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