La danse de la marinera en Île-de-France

La marinera est l'une des danses folkloriques du Pérou, identifiée pour beaucoup de Péru- viens comme la danse nationale

La marinera est l'une des danses folkloriques du Pérou, identifiée pour beaucoup de Péru- viens comme la danse nationale. Elle est inscrite, depuis le 30 janvier 1986, au patrimoine culturel du Pérou par l'Institut national péruvien de la Culture (auj. ministère de la Culture). La marinera est une parade d'amour entre un homme et une femme, qui peu à peu, par l'échange de regards séducteurs et de pas de danse, établis et coordonnés, se rapprochent.

La marinera est l'une des danses folkloriques du Pérou, identifiée pour beaucoup de Péruviens comme la danse nationale. Elle est inscrite, depuis le 30 janvier 1986, au patrimoine culturel du Pérou par l'Institut national péruvien de la Culture (auj. ministère de la Culture).

La marinera est une parade d'amour entre un homme et une femme, qui peu à peu, par l'échange de regards séducteurs et de pas de danse, établis et coordonnés, se rapprochent. La danse est structurée en deux moments différents marqués par la musique, traditionnellement jouée à la guitare et au cajon péruvien, accompagnés de la voix du chanteur. Ces deux temps sont marqués par une pause dans la musique, à la fin de la première approche du couple de danseurs. Par une série de pas de danse alternés, le couple montre au spectateur une première rencontre dans laquelle il s'approche et s'éloigne à plusieurs reprises, jusqu'au flirt de l'homme que la femme accepte parfois. Dans le second temps, avec plus de confiance entre les deux, la séduction est plus évidente. La femme a accepté le flirt de l'homme, les pas de danse s'accélèrent. Les danseurs ne se touchent jamais pendant la danse. Les costumes utilisés sont des vêtements traditionnels de différentes régions du Pérou, finement travaillés, pour créer un spectacle coloré. Les deux partenaires tiennent un mouchoir blanc de la main droite, qu'ils balancent au rythme de la musique, partie très importante du code de la danse.

La marinera est dansée dans toutes les régions qui composent le territoire péruvien, chacune imprimant certaines variantes que l'on peut percevoir dans certains pas de danse, la structure des chansons et les costumes traditionnels. Depuis son apparition, elle a fait l’objet d'une constante évolution et d’une professionnalisation. Des centaines d'écoles de danse et des professeurs, au Pérou et à l'étranger, se consacrent de nos jours exclusivement à l'exécution de cette danse. Les danseurs prennent activement part à cet apprentissage, dans le but de participer aux diverses compétitions tenues chaque année dans les villes du Pérou et à l'étranger, où réside la diaspora péruvienne. Les participants rêvent de devenir champions mondiaux. Cet élément culturel est un symbole de cohésion identitaire pour toutes les personnes d'origine péruvienne.

Il existe deux formes de danse selon le contexte : amateur ou professionnel. Pour la première, le plus important, selon les experts, est de danser selon le cœur. Tous les Péruviens qui ont déjà dansé à la maison ou dans une fête, ou qui ont assisté à un spectacle, sont porteurs de cet élément. La seconde forme, plus stricte, répond à la présentation de cette danse dans un spectacle, qui exige du danseur une qualité technique rigoureuse dans les pas de danse, les costumes et la coordination avec le partenaire de danse. Ceci est réalisé grâce à l'enseigne- ment dans des écoles spécialisées qui ont vu le jour au Pérou et dans différents pays du monde. En ce sens, les porteurs de l'élément sont les personnes qui apprennent cette danse de manière professionnelle, participent aux différents concours organisés et s'impliquent dans son exécution au cours des spectacles.

Lieu(x) de la pratique en France

Île-de-France

 

Pratique similaire en France et/ou à l’étranger

Ces dernières années plusieurs groupes de Péruviens se sont constitués en associations culturelles et diffusent activement cet élément culturel dans différentes villes de France comme Bordeaux,

Lyon, Toulouse, Nantes, Nice, Rouen.

En dehors du Pérou, cette pratique culturelle s'est développée grâce à l'ouverture de centres culturels (filiales du club Libertad de Trujillo), qui enseignent cette danse et organisent des compétitions sélectives pour participer au concours annuel que ce club organise dans la ville de Trujillo (Pérou). Ces filiales sont situées en France (Île-de-France), Espagne (Madrid, Barcelone, Valencia), Italie (Milan, Lugano, Turin, Rome), Suisse (Genève), Suède (Stockholm), Belgique (Bruxelles), Allemagne (Munich), Danemark (Copenhague), États- Unis (Orlando, Denver, Los Angeles, New Jersey, Austin Texas, Rhode Island, Las Vegas, Dallas, Miami, New York, Washington, Houston), Mexique (Mexico), Chili (Santiago), Argentine (Buenos Aires, La Plata), Canada (Ottawa, Toronto, Quebec, Montreal), Brésil (Sao Paulo), Japon (Osaka, Nagoya, Tokyo).

Le type de danse et ses variantes

La marinera est une danse de couple libre, identifiée au niveau national par ses propres caractéristiques. Elle est agile, gracieuse, élégante, libre, gaie et spontanée, montrant tout au long de son déroulement un colloque affectueux dans lequel la dame flirte avec espièglerie, ruse, intelligence et insinuation exprimant son affection, tandis que le galant masculin, accompagne, traque et conquiert sa partenaire. Le jeu des regards est très important. Les dames portent les robes de chaque ville, avec les caractéristiques uniques de la couture, de la broderie ou des tissus typiques de la région. « La marinera, d'abord, c'est une danse traditionnelle du Pérou, qui est présente partout sur le territoire, du plus au nord à Trujillo au plus au sud à Puno. C'est ce qui fait qu'il y a des va- riantes différentes, des versions, si on peut dire. C'est une danse qui existe dans tous les pays d'Amérique du Sud, sous d'autres noms. [...] il y a un lien très fort avec la Cueca bolivienne, la Cueca chilienne et encore d'autres danses. » [F. Seminario/2].

La danse du Nord est structurée par une séquence de moments : l'accueil (el saludo), la promenade (el paseo) et la fuite (la fuga) [B. Seminario/4]. Cette séquence varie dans certaines régions du Pérou.

L'accueil (el saludo) : le couple se tient face à face et les rouleaux de caisse claire commencent. Les deux danseurs affichent leur personnalité et leur costume et commencent à définir leur relation à venir tout au long de la danse. La marinera est une danse de complicité, de parade amoureuse, élégante, forte, heureuse. En ce sens, selon les sentiments de chacun, l'homme peut être élégant, audacieux, espiègle, ludique, etc. et la femme peut apparaître timide, coquette, pleine de panache, complice, etc.

La promenade (el paseo) : l'interaction entre le couple est directe : approches, insinuations, propositions, complicité, rejets et insistance, tout cela sans dire un seul mot, uniquement par le regard, les gestes et la communication corporelle. Dans un type traditionnel de marinera du Nord, la promenade peut être décrite séquentiellement comme suit : salutation (saludo), figure (figura), douce (dulce), permission (venia) et figure (figura).

La fuite (la fuga) : dans ce duel de performance, les deux danseurs ne cessent de se défier pour déterminer le « gagnant ». Tous deux utilisent toutes leurs ressources pour tenter de s'impressionner, sans négliger les flirts, les approches, les insinuations, etc. Finalement, l'homme finit par un geste de gentleman en « s'abandonnant » aux charmes de sa dame, qui accepte sa proposition de manière dissimulée et très sobre. Enfin, une marinera traditionnelle est composée de quatre fuites ou strophes : la première, bien connue, est qualifiée de triunfadora ; la seconde, de media luna ; la troisième, de cordinado ; la quatrième est un finale (el final). « Il n'y a pas de première sans seconde ! », dit-on habituellement, et la danse recommence en suivant la même séquence.

 

La posture est le principe le plus important. Les danseurs doivent se tenir les épaules en arrière, le menton relevé et afficher un grand sourire à tout moment. Les principaux pas de danse sont :

Les pas de côté (paso lateral) : pas de danse utilisé pour se déplacer sur la piste de danse. Il faut avoir de la coordination et du rythme, si on veut aller du côté droit, il faut mettre le pied gauche devant et le pied droit croisé. Pour aller à gauche, les danseurs mettent le pied droit devant et le pied gauche croisé.

Les pas vagues (paso ola) : le pas de danse se fait avec le mouchoir à la main droite, puis le tronc est tourné sur les côtés, en commençant par le côté droit ; le mouchoir est porté vers l'avant, le mouvement du côté gauche, le mouchoir est placé en arrière. Les pieds se dé- placent en trois temps, en commençant par la pointe du pied.

Le petit cheval (caballito) : réalisé en combinant le mouvement des pieds « demi-pointe, talon, demi-pointe », il est généralement complété par deux mouvements de jupe, l'un avec la jupe froncée et les mains sur la taille, et l'autre, avec la jupe ouverte et les bras tendus avec les paumes de main en arrière.

Le piétinement (zapateo) : dans ce moment le plus rapide de la marinera, il existe trois types de base de piétinement. Le brossage (cepillado) consiste à croiser le pied vers l'avant et à le croiser devant le pied opposé. La succession pointe-talon (punta y taco) doit amener la pointe vers l'avant, puis frapper le sol avec le talon. Enfin, la pointe à pointe (punta a punta) consiste à amener la pointe deux fois en avant, puis en arrière.

Le mouvement de la jupe est très important pour rendre la danse encore plus attrayante. Au moment du déplacement à travers la piste, elle est saisie à partir du quatrième pli et monte à la hauteur du menton. Au moment du piétinement, elle est tenue à deux mains, montrant davantage les pieds du danseur.

Bien qu'il existe un style propre à chacune des régions du Pérou, les plus répandues dans ce pays et dans le monde sont trois styles appelés « marinera norteña », « marinera limeña » et « marinera serrana ».

• La marinera de Lima (limeña)

La marinera est une danse traditionnelle originaire de la capitale du Pérou, Lima, d'où son nom de limeña. Cette variante est très élégante, beaucoup plus calme par rapport à d'autres. Elle présente quelques points de ressemblance avec la marinera norteña, mais est ressentie comme beaucoup plus chic et plus élégante [B. Seminario/7].

La marinera du Nord (norteña)

« La marinera norteña, c'est plus difficile à apprendre. Elle a évolué beaucoup du point de vue technique pour les danseurs. Elle est beaucoup plus rapide et elle a plus de pas. Il faut avoir une bonne condition physique, donc c'est un sport qui demande d'avoir un bon cardio. » [Cruz/1].

« Olga, la grande sœur de la famille Fernandez de la ville de Moche, a un jour l'idée, lors d'un concours, de s'enlever les talons [sic], pour que ce soit plus léger, au début des années 1970. Cet acte s'est répandu et maintenant, c'est devenu une norme. Dans la marinera norteña, toutes les femmes dansent sans chaussures. Dans la ville de Moche, les femmes et les garçons, tous les deux, dansent avec les pieds nus. Mais il y a aussi un style différent, qui est propre à Moche : c'est connu comme le style mochero, qui consiste à danser avec les pieds nus et un peu penché. C'est ce qui nous fait penser à la danse Tondero, qui vient de Piura, Pérou. » [F. Seminario/17].

« Le style de mocheros est beaucoup plus rapide, parce que, dans les autres styles, on a des chaussures qui sont assez spéciales, parce qu'on a un talon assez prononcé, qui permet de faire plus de bruit et que soit plus élégante la danse, alors que, quand on danse pieds nus, on est beaucoup plus libre, beaucoup plus souple, plus léger. » [B.Seminario/9].

La marinera de la sierra (serrana)

Dans cette variante, le rythme de la marinera est lent. Sa mélodie est profondément sentimentale. L’influence du huayno, danse considérée comme la danse andine caractéristique par excellence, dont les origines remontent à la période inca, est très forte.

De cette même catégorie relève aussi la marinera puneña, qui diffère de la marinera du nord et de Lima : il s’agit d’une danse de couple-collective, dans la quelle plusieurs couples dansent au même moment sur la piste de danse, tandis que les autres sont de couple-individuel, avec un seul couple sur la piste de danse. Cette danse est exécutée notamment durant la période du carnaval et dans les festivités de San Juan et San Pedro. L'air musical est métissé, pentatonique et andin.

• La marinera avec cheval de pas

« C'est une pratique qui vient d'entre Lima et le Nord, qui s'adapte plus à la marinera norteña, dans laquelle le chevalier, appelé chalan, est sur le cheval et la femme, elle, danse. On dit qu'elle danse plus avec le cheval, parce que le « cheval de pas » (caballo de paso) péruvien a une particularité, qui est qu'il est capable de se déplacer sur le côté, comme le danseur le fait. En fait, le danseur imite le cheval. » [F. Seminario/20].

 

La pratique musicale associée

« On n'est sûr de rien. On dit que la première marinera s'appelle la Concheperla, qui est une marinera très connue. Elle a été composée à l'époque, quand la marinera a été nommée.

Elle est proche de la Zamacueca. Il existe des théories qu'il y avait d'autres marineras, [...], qu'il y avait une marinera qui s'appelait Antofagasta, mais on n'a pas retrouvé la musique. On a retrouvé quelque part un peu de texte, mais on n'a pas la musique. Du coup, on ne peut pas affirmer qu'elle existe. En fait c'est un sujet très délicat, étant donné que l'origine de la guerre contre le Chili, c'est parce que, à l'époque, il y avait un port très important bolivien qui s'appelait Antofagasta et le Chili avait envahi ce port-là. Du coup, le Pérou, qui avait une alliance avec la Bolivie, a dû entrer en guerre. » [F. Seminario/22].

« L'instrument principal dans la marinera norteña, c'est la guitare, laquelle, dans la marinera Limeña, fait un jeu très particulier, qui s'appelle le bordón, le bordoneos (on fait trembler la corde et on déplace le doigt pour qu'elle fasse une espèce d'oscillation très particulière, très belle). Après, c'est le cajón péruvien qui serait le deuxième. Le troisième, c'est las palmas. C'est très important dans cette musique, parce que ça fait partie de la fête. Il faut s'imaginer qu'il y a un public qui vibre, qui vit avec les danseurs ; du coup, tout le monde participe en chantant et en tapant des mains. Pour la marinera norteña, la coutume a fait que les fanfares militaires jouent ; du coup, toutes les marineras sont une version chantée avec guitare et cajón et une version pas chantée, si non, instrumentale avec une fanfare, donc c'est des cuivres, des trombones, des trompettes, des tubas, des percussions, des cymbales, des grosses caisses, des caisses claires, etc. » [F. Seminario/24].

La marinera Limeña exige des règles strictes dans ses chansons et danses très élaborées. Sa structure littéraire est composée de trois strophes (première jarana, deuxième jarana, troisième jarana). À ces versets ils ont été ajoutés on ne sait pas quand, la resvalosa (la glissante) et las fugas (les fuites), qui étaient chantés et dansés avant indépendamment. Les deux « La glissant » et « les fuites » ont leurs racines dans les danses africaines et leurs danses sont plus rapides que la Marinera.

 

La première jarana se compose de quatre vers octosyllabiques, de préférence ceux avec une fin grave ; la rime peut suivre trois manières, dans chaque couplet, où les vers pairs riment et utilisent un langage familier, ou dans un quatrain, où le premier vers rime avec le quatrième. Dans la redondilla, le premier vers rime avec le dernier et le second avec le troisième. La seconde jarana comprend les quatre premiers vers de la combinaison métrique dite « séguedille » (seguidilla), composition littéraire et musicale espagnole en mesure ternaire, dont l'usage remonte au XVe siècle et qui reste encore très répandue sous forme de chanson et de danse populaire. La troisième jarana contient les trois derniers vers de la séquence et s’achève par une estrambote (ensemble de vers ajoutés à la fin d'un poème, en particulier un sonnet, pour l’achever, en général, sur un ton ironique). La « glissante » (resvalosa) ne présente pas de type particulier de vers. Précédée de l'appel (llamado), qui reprend générale- ment les deux premiers vers du premier jarana, la fugue est composée de quatre ou huit vers de quatre syllabes ou plus. Ils peuvent être joués dans les tons majeurs et mineurs, mais la première partie ne commencera jamais en majeur, tandis que la glissante ou la fugue sont en mineur. Sa mesure est de 6/8, à un rythme tranquille dans les trois premières parties. Dans la marinera norteña, les vers doivent garder le même mètre, mais ils sont plus fortement liés au style Tondero.

La marinera commence par un bordón de guitare, appelant le cajón, qui répond à la deuxième mesure, avec un roulement de trois ou quatre battements au centre du cajón et un à l'extrémité supérieure (cela peut varier). Un nouvel appel est fait, puis interviennent un roulement de cajon et las palmas et, après huit ou douze mesures, le chanteur commence.

Espagnol et français

La marinera est composée de deux éléments; qui sont intrinsèquement liés mais différents, la danse et la musique. Chacun d'eux utilise un langage technique, qu'il est nécessaire de connaître dans la recréation de la pratique culturelle, comme les noms des pas de danse et les différents moments qui composent la musique et le chant.

Patrimoine bâti

 

Sans objet

 

 

Objets, outils, matériaux supports

 

Le costume

« Les costumes n'étaient pas faits pour danser, sinon : c'était le costume qui était utilisé pour la vie quotidienne ou pour les fêtes. Les costumes ont connu une évolution forcée pour le concours. Une grande importance a été accordée au style pour le concours. Ils ont une influence européenne, principalement d'Espagne.» [Conférence de Renato Venavides, 6 octobre 2019].

Les costumes adoptent différents styles : « Le style mochero, on s'habille moins complexe, moins riche en élaboration, un peu plus quotidien, avec des habits traditionnels de chaque région du Pérou. Le style de Trujillo, c'est plus habillé ; les femmes vont utiliser plus de bijoux, les hommes utilisent un scapulaire très élégant avec des ornementations, avec un saint ou un motif religieux, un costume, parfois un poncho en laine bien cousu, de belles chaussures noires brillantes. La femme, elle, a une très belle robe, des ornements dans les cheveux; en-dessous, la robe, elle a un jupon, avec des broderies magnifiques.» [F. Seminario/17].

« On les achète au Pérou. De plus en plus, ici, il y a des couturiers qui les font, mais avant, on les ramenait du Pérou, parce que c'est un travail spécifique, la jupe : il y a 14 mètres, il faut le savoir-faire. Moi, je ne peux pas le faire. Il vaut mieux que ce soit comme ça, pour pouvoir faire les mouvements, parce que, si c'est trop léger, les mouvements, ils ne seront pas pareils. » [Meneces/57]. « Le plus cher et plus compliqué, ce sont les habits de la fille, parce que le garçon, c'est uniquement un costume, un chapeau et son mouchoir ; les chaussures, elles ne peuvent pas glisser et il faut qu'elles aient une semelle assez confortable. » [Meneces/58].

 

L’accessoire du mouchoir

« À l'époque, les marins, quand ils rentraient à leur port après soit une guerre ou autre, les femmes attendaient leur époux avec un mouchoir blanc qu'elles faisaient tourner. » [B. Semi- nario/5]. « La théorie, que j'ai le plus entendue, dit que les locaux, les Indiens et les Africains, se moquaient ou imitaient les Européens, qui avaient toujours un petit mouchoir blanc dans la poche ou à la main et que, en les imitant, en imitant leurs danses ou même leurs pratiques, leur façon de se comporter, ils ont continué à utiliser ce mouchoir blanc, et il est devenu un symbole. C'est un héritage européen, qui est devenu un accessoire principal dans cette danse. Quand j'enseigne la marinera, je leur dis que les deux mouchoirs blancs, ils dansent en- semble. Les danseurs dansent ensemble, mais les mouchoirs, ils dansent ensemble aussi. C'est une communication avec le mouchoir et ça fait partie du langage de cette danse. C'est très important. Dans la marinera au Pérou, on la danse toujours avec un mouchoir blanc. C'est plus élégant, c'est pour ça qu'on utilise cette couleur. » [F. Seminario/3].

Il existe deux exécutions distinctes de la danse de la marinera : l'une pour s’amuser au moment des festivités ; l'autre, pour devenir un danseur professionnel. La première, à l’instar d'autres rythmes latino-américains (salsa, merengue, cumbia, etc.), s’apprend en imitant les autres dans des moments de festivités. La seconde, au Pérou, s’apprend à la maison avec la famille ; certaines écoles primaires proposent des cours dédiés. En outre, des cours sont dis- pensés par des professeurs particuliers, champions dans les différents concours, ou au sein d’académies ou d’écoles dédiées aux danses folkloriques.

À Paris, les écoles de danses folkloriques et les associations franco-péruviennes jouent un rôle très important dans la transmission de la marinera. Elles favorisent d’abord les rencontres au sein de la communauté d'origine péruvienne, en alimentant le sentiment d'adhésion à une culture, en développant une identité culturelle et en permettant sa pratique. Les cours, les représentations et les concours, par ailleurs, peuvent propager cette danse parmi les nouvelles générations, qui ne sont pas forcément allées au Pérou, et servent donc à main- tenir le lien avec le pays d'origine de leurs parents et leur culture.

« Ici, c'est obligatoire d'aller aux écoles ou académies, parce que, sinon, on ne peut pas savoir comme apprendre. Il y a quand même certaines techniques ; on dit qu'il faut danser avec son cœur, mais toujours il y a des techniques. Si on veut participer au concours, il faut apprendre ces techniques. Après, si on veut danser juste dans une fête, on peut danser comme on le sent. Au Pérou, il y a justement des écoles pour la préparation, pour aller justement au concours. » [Meneces/40].

« Il y a le côté folklorique, dans lequel les gens pratiquent la danse pour une fête, comme le Huayno ou d'autres danses traditionnelles. Quand on entend la musique et on la chante ou on la danse, on tape dans les mains et on partage. Ça, c'est la véritable origine, les écoles sont venues après. On l'apprend comme on apprend une salsa ou un merengue, dans la plupart des fêtes latino-américaines, pareil. On l'apprend sans chercher trop de technique. » [F. Seminario/9].

De nombreuses personnes participent au développement et à la transmission de cette tradi- tion à Paris : les parents, à domicile, apprennent la danse à leurs enfants ; les associations se chargent de la diffusion et de l'organisation des divers concours et activités liées à la marine- ra, qui se déroulent à Paris depuis des années ; les commerces soutiennent, d'une manière ou d'une autre, ces activités. Il est impossible de recenser de façon exhaustive tous ceux qui per- mettent à la marinera d’être présente, non pas uniquement au sein de la communauté franco- péruvienne, mais aussi, parmi les Français, qui s'intéressent de plus en plus à cette tradition. Cette liste énumère par exemple les associations et écoles de danse, impliquées directement dans l'organisation des cours et concours de marinera :

• Association « Paris es marinera », dirigée par Brenda Pachas, Willy Maihuire et Sara Quiroz et Julio Quiroz

• « École Moche », dirigée par Mercedes Mellado et Wilfredo Fernández de la Rosa

• Association « Marinera nuestra pasión » : école récemment créée par un groupe de mères péruviennes engagées dans la pratique, dont Melissa Cipriano, Roxana Ro, Annie Rodriguez

• Association « Tradiciones peruanas Paris », dirigée par Patricia Montoya Herrera, qui gère l'école de marinera dite « Academia marinera Fernando Seminario »

• Association « Santa Lucia », dirigée par Patricia Meneces

• Association « culturelle franco-péruvienne de l'Essonne », animée par des danseurs Emma Querzola, Miguel Cornejo, Goya Snheider et Elvis Castillo

• Association « Los Chaskis de America Latina », gérée par Queta Rivero et Cato Caballero • « Club Libertad de Trujillo », filiale de Paris, présidé pour Frida Villanueva

• Association « Pérou Andino », dirigée par Mercedes Suarez et César Pimentel

• Association « Somos Peru », dirigé par Milagros et Luis Valdivia

• Association « Estampas del Perù », dirigée par Gloria Bellido • Association « La Libertad », dirigée pour Victoria Bobadilla • Association « Arequipa Manta » dirigée par Félix Chirinos

Les entretiens réalisés avec les informateurs et les porteurs de traditions de la communauté franco-péruvienne de danseurs de marinera à Paris, l'observation directe à l’occasion des festivités, des concours de danse, des expositions et des conférences et l’analyse bibliographique permettent de déduire qu'il n'existe pas une théorie unique, relative aux origines et à l'évolution de la danse au Pérou.

 

 

Les origines péruviennes de la marinera

 

Selon divers récits, la marinera tire son origine du métissage des cultures, présent depuis l'époque coloniale au Pérou, période durant laquelle cette danse était appelée Zamacueca.

« On attribue les origines de la marinera dans les années 1600. Il y a trois théories de la marinera : l'africaniste, la péruvienne et l'hispaniste. L'africaniste soutient que la marinera est une danse d'origine africaine. Ce courant dit que son origine est afro-péruvienne puisque les principaux danseurs ont été des métisses et des Africains, rappelant les danses africaines. La péruvienne soutient que la marinera est un mélange de la culture des Indiens du Pérou. L'historien péruvien Rómulo Cúneo Vidal indique, dans l'Encyclopédie inca (1977), que la zamacueca était une danse de repos, dont le nom vient du quechua zawani, qui signifie danse du jour de repos, et que zamiquiqui était le repos paysan après une semaine de travail pendant la vice-royauté du Pérou. Ses déclarations sont soutenues par des sculptures de la culture inca où la femme a la main sur sa taille et l'homme a la main sur le dos, de plus, tous deux tiennent un sac à main ou un mouchoir. L'hispaniste nous dit que la marinera est un héritage de la culture espagnole des danses de l'Europe, comme le fandango, le menuet italien et d'autres danses européennes [...] » [Villanueva/7].

Pour F. Seminario, dans les origines de la marinera, « il y a un lien avec la guerre contre Chili et la guerre d'indépendance d'Espagne. En fait, c'est pas une certitude, mais c'est une probabilité. La théorie la plus connue, c'est que la marinera, elle vient de la Zamacueca, une danse afro-péruvienne, mais en fait, c'est une théorie qui est assez superficielle. Elle arrête l'histoire de la marinera à la fin du XVIIe siècle et, moi qui ai étudié la musique, [je] ne suis pas d’accord. J'ai entendu la musique baroque ici, en France, et je sais que ce rythme, qui est très connu, est caractéristique de la marinera. C'est un rythme qui vient de l'époque médiévale en Europe et a été importé vers le Pérou. Elle a donné lieu à des danses qui se pratiquent en Es- pagne et bien sûr au Pérou. Elle se démarquait pour avoir de longues robes, se tourner au- tour et avoir un mouchoir blanc. Pendant les guerres d'indépendance, autour des années 1820, les armées de Saint-Martin sont parties d'Argentine, donc sont passées par le Sud pour arriver au Pérou ; celle de Bolivar est passée par le Venezuela et la Colombie, et elles sont arrivées aussi au Pérou par le Nord et elles se sont rencontrées au Pérou, parce que le Pérou, c'était le vice-royaume de l'Espagne. Lorsque le Pérou est libéré en 1821, les armées étaient conformées par des personnes de diverses nationalités de l'Amérique, qui ont connu le Pérou et [elles] ont partagé avec le peuple péruvien, donc, dès qu'ils sont revenus dans leur pays, ils ont exporté le mélange des cultures, entre la culture afro, la culture andine péruvienne autochtone et la culture européenne, qui était là depuis deux cents ans. À ce moment-là, il y a eu une exportation des coutumes culinaires, des rythmes, peut-être des langages et on pense que c'est à ce moment-là que le rythme, qui est la base de la marinera, s'exporte dans les autres pays d’Amérique latine du Sud. Elle a évolué et ça a mis soixante-dix ans, jusqu'au mo- ment [où], en 1879, la guerre entre le Pérou et le Chili éclate, qui est une guerre maritime d'abord. Miguel Grau Seminario, qu'on appelle le « chevalier de Mer » au Pérou, réussit des victoires impressionnantes contre un nombre plus important de navires chiliens. À ce moment-là, un journaliste péruvien Avelardo Gamarra, qu'on appelle le Tunante, a décidé de baptiser la danse qu'on appelait de différentes manières : à des moments, chilena ; à des moments, Zamacueca, et d'autres façons très différentes. Il a décidé qu'il fallait un nom très péruvien, un nom en hommage au patriotisme, au marin qui vient de mourir pour la patrie, donc on va l’appeler marinera. Donc, depuis ce moment-là, au Pérou, on a commencé à appeler toutes ces danses-là, et toutes les danses sœurs, la marinera. » [F. Seminario/21].

Cette diversité d’appellations, avant la fixation par le terme générique de marinera, est confirmée par Abelardo Gamarra : « La danse populaire de notre temps est connue sous différents noms : elle s'appelle tondero, mozamala, resbaloza, danse de la tierra, zajuriana et jusqu'en 1879, il était plus répandu de l'appeler chilena ; c'est nous qui avons jugé [...] inapproprié de garder un tel titre sur les lèvres du peuple et en période d'expansion et sans l'accord d'aucun Conseil des ministres et après avoir médité sur ce titre, nous avons décidé de remplacer le nom de chilena par marinera » [Gamarra 1899]

 

 

L’apparition et le développement de la marinera à Paris

 

« Le début de la marinera à Paris, c'est à peu près en 2005. Avant ça, il y avait des personnes qui ont dansé la marinera, des danseurs, des groupes folkloriques différents, comme le groupe folklorique de Milagros et Luis Valdivia, Somos Perú, ou associations comme Les Chaskis d'Amérique latine, dirigées par Queta Rivero et Cato Caballero et Perou Andino, dirigée par Mercedes Suarez et César Pimentel qui pratiquaient différentes danses du Pérou. Parmi celles-là, ils avaient des danseuses de marinera comme, Lita Deza, championne mondiale de marinera 1981, catégorie juvenil du Club Libertad á Trujillo et Patricia Montoya, danseuse reconnue et professeure de folklore.

En 2005, le Club Libertad, institution privée péruvienne dont le siège social se trouve à Trujillo, capitale de la marinera, confie pour la première fois en Europe la filiale Paris à Victoria Bobadilla. Elle organise plusieurs congres et le premier championnat sélectif de marinera en 2009. Depuis la marinera prend de l’ampleur et les évènements se suivent ; en 2007, l'association Santa Lucia organise le premier concours en Europe avec l'appui technique de Patricia Montoya, renouvelé en 2008 et 2009, sous l’auspice du Club Libertad de Trujillo. En 2010, Patricia Meneses est nommée présidente de la filiale du Club Libertad París et organise pour la première fois la traditionnelle fête du perol à l'Unesco. En 2014, l’association culturelle franco péruvienne organise le premier concours en Essonne ainsi que le premier flash- mob au pied de la tour Eiffel. La même année le club Libertad de Trujillo décide alors d’ouvrir une seconde filiale en Ile de France, dans l’Essonne à Courcouronnes. En 2016, l’association « Tradiciones Peruanas Paris » organise à son tour, son premier concours de Marinera et Tondero. En 2017, Cyril Jouany est nommé président de la filiale Paris et organise le dixième concours sélectif. Cette même année, le conseil d'administration du Club Libertad de Trujillo désigne la filiale de l'Essonne comme l’organisateur officiel du premier championnat européen de marinera. En 2018, le Club Libertad Trujillo décide de rassembler les deux fi- liales celle de Paris et de l’Essonne en une seule filiale dans un souci d’harmonie; depuis elle est représentée par Alfredo et Alicia Ruiz, par Lourdes Pluvinage, et Frida et Carlos Villanueva. » [Villanueva /1].

Depuis son apparition, au Pérou, puis dans la région parisienne, la danse de la marinera s'est adaptée aux changements socioculturels du XXe siècle. Les divers facteurs comme les concours, la migration, le perfectionnement des savoir-faire liés aux costumes entre autres, ont impulsé à la danse un autre niveau d'interprétation : les danseurs se sentent obligés d'améliorer leur technique et leurs costumes d'année en année pour une exécution plus performante. C'est pour cela que les techniques ont évolué de façon assez rapide.

« Déjà, les habits, ils ont beaucoup évolué parce que, maintenant, ils utilisent les capuches, les chemises. Les filles, elles ont une autre broderie. Ils se sont modernisés par rapport aux habits. Après, la technique a beaucoup changé aussi. Le côté que je n'aime pas, c'est que, maintenant, ils sont devenus très rigides dans la chorégraphie et [...] il n'y a pas cette spontanéité dans la danse. » [Meneces/64].

« Le Club Libertad de Trujillo, qui organise le concours mondial, a fait son premier concours en 1960, donc depuis cette date-là, même je crois bien avant, il y avait des concours. Petit à petit, il y a eu une évolution de la danse, parce que forcément il y avait une exigence différente pour le concours, donc, du coup, une technique qui s'est développée peu à peu. » [F. Seminario/10].

Vitalité

 

L'aspect démographique et l'activité associative sont deux facteurs à prendre en compte sur le plan de la recréation d'un élément culturel immatériel translocal. La communauté péruvienne en France compte 12 000 personnes (source : statistiques INSEE, 2016) : « Il y a eu une première vague dans les années 1970. Il me semble que les Péruviens, ils sont arrivés dans cet espoir d'étudier, de travailler. Il y a eu un vague surtout dans les années 1980, lors des problèmes avec le sendero luminoso, où il y a eu beaucoup de personnes qui sont venues pour demander l'asile. Après, c'est plutôt une émigration économique. » [Villanueva/4].

La communauté n’est donc pas très nombreuse. La majeure partie des migrants qui décident de venir en Europe privilégient pour des raisons pratiques des pays dont ils partagent la langue, ce qui, selon l'un des témoins interviewés, compte beaucoup pour le développement des actions artistiques et culturelles péruviennes à Paris : « Les problèmes sont les priorités. S’il y a quelqu'un qui vient ici, sa priorité va être d'apprendre la langue et, pour les autres, c'est faire ses études, avoir un travail, donc, du coup, ça ne serait pas la danse ; la danse serait vraiment en dernier. » [Meneces/62].

« C'est une question de migration. Ici, à Paris, il n'y en a pas beaucoup, comme en Italie, à Turin ou Milan, où il y a énormément de population péruvienne. Du coup, toutes les familles participent. Ces deux pays, pour moi, se sont développés ces dernières années et ils [y] pratiquent énormément la marinera. » [Meneces/61].

À la différence du Pérou, où la pratique est présente dans plusieurs espaces du quotidien (écoles, radio, nombreuses académies, concours), c'est, à Paris, grâce aux efforts des membres des associations que la marinera a vu le jour, avant que les nouvelles générations s’investissent dans sa reproduction et sa pratique.

 

 

Menaces et risques

 

Après la création d’une seconde filiale en France, le Club Libertad de Trujillo a décidé de réunir les deux filiales en une seule entité, chargée de la réalisation du concours et de la représentation du club en France. Cette démarche a divisé la communauté, qui travaillait depuis des années à l’organisation des concours dans la région parisienne.

Modes de sauvegarde et de valorisation

 

Le concours de marinera de Paris

Ce qui a commencé comme une danse pour s'amuser lors de festivités est devenu peu à peu une activité professionnelle, grâce aux concours apparus dans toutes les régions du Pérou. Chaque municipalité organise depuis les années 1950 un concours dédié uniquement à la danse de la marinera. Le premier concours dédié eut lieu en 1958 à Lambayeque. L'un des plus importants est organisé par le Club Libertad de et à Trujillo. Créé en 1960, le concours de Trujillo se tient en janvier au Colisée, dit gran Chimù, d’une capacité de 7000 personnes. Il accueille plus de 1400 couples venus de tout le Pérou et de tous les pays accueillant une filiale du Club Libertad. « Depuis de nombreuses années, dans la finale du concours de Trujillo, la musique y est jouée sur scène par la fanfare de la 32e brigade d'infanterie de l'armée péruvienne. » [F. Seminario/24].

Du fait de la forte diaspora péruvienne, le concours de Trujillo en a inspiré d’autres dans différents pays du monde. Plusieurs concours ont un caractère plus modeste. « À Lima, il y en a de plus en plus, un des plus importants, c'est le concours Plaza Norte à Lima, qui est l'un des plus connus. Il y a aussi des académies de danse qui organisent leurs propres concours, comme Somos independientes ou Todas las sangres, [...], comme aussi chaque municipalité, et même ceux qui ont gagné à Trujillo veulent y participer. » [F. Seminario/18].

En activité depuis plus de soixante ans, le Club Libertad est un club privé : « Ils ont commencé à diffuser à Trujillo, à faire les concours et, petit à petit, se sont fait connaître. Maintenant, ils font un énorme concours, auquel tout le monde veut y aller participer. Ils veulent gagner et rêvent de devenir champions mondiaux. C'est un concours qui est devenu très célèbre. Il y a des autres concours ; ils n'ont pas cette grande importance, dans le monde de la marinera. » [Meneces /23].

« Les catégories officielles sont celles-là que le Club Libertad de Trujillo nous impose ; les catégories la unité, pré-enfants, enfants, juniors, juvéniles, adultes, seniors, masters et or. En dehors des catégories officielles, nous pouvons créer d'autres catégories. Dans ce cadre-là, la catégorie « cœur » a eu lieu pour la première fois ici, grace à l'ancienne présidente du Club Libertad, filiale Paris : Mme Patricia Meneces. Cette catégorie représente la fusion dans la danse entre les parents ou les grands-parents et un enfant de la même famille [...]. C'est une catégorie qui inspire beaucoup d’émotion, autant pour les participants que pour le spectateur. Pouvoir danser avec son enfant, je pense que ça doit créer une émotion énorme. » [Villanueva/23].

« Le concours mondial représente une semaine de sélection: pré-éliminatoires, éliminatoires, demi finale et trois étapes de finale. Les champions des concours sélectifs comme ceux de la filiale parisienne bénéficient d'un passage direct à la finale. C'est une facilité pour leur donner la chance et l’opportunité de participer directement à la finale. » [Meneces/24]. « Pour tous ceux qui n’ont pas eu la chance de gagner un concours sélectif au Pérou ou à l’étranger, les lundi, mardi et mercredi se déroule l’étape pré-éliminatoire suivie de l’étape éliminatoire ; les demis finales ont lieu le jeudi et vendredi. Le samedi c’est une journée spéciale car c’est la journée dédiée aux chorégraphies. Le but de cette journée est de transmettre un message à travers la marinera. Le jour « J » c’est le dimanche, 36 couples s’affrontent afin d’obtenir le titre de champion mondial de Marinera en trois étapes de final. » [Villanueva/1].

La filiale de Paris du Club Libertad a pour objectif principal de diffuser la marinera à Paris et partout en France : « L'objectif directeur, c'est d'organiser le concours international de marinera à Paris. Pour cela, nous organisons la traditionnelle fête de perol. C'est une fête dans la- quelle il y a un code d'habillage. Tout le monde y est habillé en blanc : c'est une tradition de plus de cinquante ans. L'origine de cette fête, c'était de recueillir des fonds pour pouvoir organiser le premier concours de marinera à Trujillo. À l'époque se sont réunies les grandes familles trujillanas et ils ont organisé une fête pour recueillir des fonds pour l'organisation de ce concours, donc c'est resté une tradition et à Trujillo, tous les ans, il y a une fête de perol qui accueille beaucoup de monde. Donc à Paris, nous organisons cette fête, toujours avec les mêmes objectifs, de recueillir un peu de fonds pour pouvoir organiser le concours, normale- ment le lendemain ou deux jours après. Ici, à Paris, tout ça se passe durant un week-end. La fête de perol, traditionnellement, c'est organisé un vendredi soir. » [Villanueva/23]. « Ici, la première fête du perol, c'était à l'UNESCO en 2007. » [Meneces/66].

« Quand je vais choisir une personne pour le jury, j'envoie une liste à Trujillo. Ce sont eux qui valident si, oui ou non, ces personnes sont qualifiées et peuvent avoir ce rôle de juge. Donc j'envoie une liste de personnes que je considère qu'ils peuvent avoir ce rôle de juges et le Club Libertad de Trujillo valide. Normalement, ils sont cinq sur la piste. » [Villanueva/25].

« L'association Santa Lucia, c'était la seule à l'époque qui faisait la marinera. Après que j’ai créé l'association, c'était le club qui m'a demandé si je voudrais faire un concours mondial, ici, à Paris. Et c'est comme ça que j'ai fait partie de ce club et j'ai formé la filiale [de] Paris et c'est comme ça que j'ai commencé à faire les concours, sans aucun lien, juste le nom. Le seul lien que j'avais, c'était que les personnes qui gagnaient ici pouvaient aller danser au Pérou, s'ils le souhaitaient. » [Meneces/19].

Le concours prévoit aussi l’élection d’ambassadrices (« reines ») de la marinera : « Depuis très longtemps, lors de l’organisation du premier concours de la marinera à Trujillo, les organisateurs, ils ont décidé de choisir une ambassadrice, donc du coup, nommer une reine. C'est une tradition que chaque concours de marinera puisse être représenté par une reine de la marinera, donc, chaque année, dans chaque filiale, on choisit une jeune fille, une dame qui représente la marinera pendant une année. Donc, pour le premier concours européen réalisé à Paris, c'était Anaïs, [la] première qui a été choisie comme reine de la marinera. Le rôle, c'est un rôle d'ambassadrice, de représentation, mais je pense aussi que c'est un rôle de diffusion. Je pense qu'il y a beaucoup de choses à faire en tant qu'ambassadrice de la marinera, pour promouvoir la marinera dans l'endroit où on a été choisie reine. Par exemple, ici, à Paris, je pense qu'il y a beaucoup de choses à faire. Chaque filiale choisit une reine selon ces conditions. Moi, ici, à Paris, je choisis toujours une reine qui ne sait pas forcément danser la marinera, mais l'engagement, c'était d’apprendre et de transmettre la marinera. Donc, les reines de la filiale Essonne, elles ne savaient pas danser la marinera et, aujourd'hui, elles ont appris. Je ne choisis pas forcément des reines péruviennes ou d'origine péruvienne. Nous avons eu des reines, des jeunes filles nées en France de parents péruviens et colombiens, péruviens et chiliens, péruviens et français, donc on a eu des reines de différentes origines, et c'est ça qu'on cherche, parce que c'est un moyen de diffuser, de faire connaître la marinera. » [Villanueva/18].

 

 

Les autres performances publiques

 

Le concours de la filiale de Paris du Club Libertad de Trujillo n’est pas la seule occasion de pratiquer et de valoriser la marinera à Paris : « il y a également des présentations qui sont faites lors des fêtes d'Amérique latine ou pour la fête nationale du Pérou, qui est le 28 juillet, laquelle, des fois, a lieu à l'église de la Madeleine. La marinera est présente aussi à la procession qui s'appelle le señor de los milagros (qui est un saint au Pérou), qui dure tout le mois d'octobre. Il y a énormément de danses de la marinera, surtout le dernier dimanche du mois d'octobre, à la messe à Notre-Dame de Paris, et, chaque année, il y avait la marinera qui était présente, avec également d'autres danses. » [B. Seminario/15].

Chaque année, une performance dite « flash mob » réunit le plus grand nombre possible de danseurs au Trocadéro, en face de la tour Eiffel, pour exécuter une chorégraphie de la marinera. Cet événement a été coordonné par plusieurs associations et collectifs depuis quelques années, dont le dernier, organisé par Fernando Seminario et Brenda Pachas le 25 juillet 2020.

 

 

Actions de valorisation à signaler

 

Au Pérou, « Mme Susana Vaca, ancienne chanteuse, qui était à la direction du ministère de la Culture, a participé à l'instauration [du] 7 octobre comme le jour international de la Marine- ra, comme une manière de revaloriser le patrimoine péruvien. » [F. Seminario/27].

La date, proposée par la direction du Patrimoine immatériel contemporain, a fait l’objet du projet de loi n°1508/2012-PE, présenté par le pouvoir exécutif. Elle a été choisie parce qu'elle tombe la veille du 8 octobre, jour de la Marine de guerre péruvienne, et parce que le 7 octobre est le jour de naissance de don Augusto Áscuez Villanueva ( ), l'un des principaux interprètes de marinera.

 

 

Modes de reconnaissance publique

 

À Paris, les associations liées à cette pratique organisent chaque année des événements pour la journée nationale péruvienne de la marinera (fêtes, conférences, événements de danse).

Les divers acteurs impliqués dans la pratique de la marinera en Île-de-France prévoient de continuer l'organisation du concours, les événements lors du jour de la fête nationale du Pérou, dans les festivités del señor de los milagros à Notre Dame, et les différents événements liés au jour de la marinera.

Intéressée par la sauvegarde et reconnaissance de cette pratique, l’association île du Monde recommande la création d’un groupe de travail ou comité, qui réunirait toutes les associations et personnes intéressées par la marinera en France, avec pour objectif de faire des actions communes, favorisant la diffusion et la recréation de la danse à Paris.

Afin de sensibiliser le public français, il pourrait être envisagé la réalisation et la production de textes à diffuser en langue française, puisque presque toute l'information existante est en espagnol : « Il faudrait faire des choses nouvelles pour pouvoir attirer, sinon, d'autres façons, montrer au public ce que c'est, pas uniquement au travers du concours, sinon, des expositions et autre chose. » [Meneces/65].

Récits liés à la pratique et à la tradition

 

Les diverses théories sur les origines de la marinera sont soutenues par des récits qui essaient de mettre en valeur l'une ou l'autre des cultures présente dans le Pérou actuel. Aucune étude n’a démontré jusqu’ici avec certitude comment s'est constituée la marinera, ce qui incite chaque porteur à emprunter ce qui s'adapte le plus à son mode de pensée.

 

Inventaires réalisés liés à la pratique

La marinera a été incluse à l'inventaire du patrimoine culturel immatériel du Pérou le 30 janvier 1986 (Resolución Suprema n°022-86-ED).

 

Bibliographie sommaire

Aguilar C., La Marinera, Baile Nacional del Peru. Lima, Ministerio de Educacion, 1989.

Ahon, M., Didáctica Integral para el baile Folclórico por pareja, Lima, Universidad Ricardo palma, 1998.

Alvarez, F., Alvarez, V., Álvarez, S., Fierro, M., Odar Roncal, O., Consejo Nacional de Ciencia y Tecnologia, Danzas típicas del Perú, Lima, Video Impres, 1990.

Alza, L., Marinera Norteña. Separata, Lima, Escuela Nacional Superior de Folklore José María Arguedas, n°27-28, 1994.

Castañeda, L., Vestido tradicional del Perú, Traditional dress of Peru, Lima, Museo Nacional de la Cultura Peruana; 1a ed Edition?, Unknown Binding, 1981.

Cisneros, G., Nuestra Música antología Criollla del Perú, Lima, Librería Atlántida, tome 1, 2001.

Gamarra, A., El baile nacional, Lima, Rasgos de pluma, 1899.

Gamara, C., La Marinera, Lima, Antologica–Folklore, 1959.

Novoa, L., Canción Popular Costeña en el Norte Peruano, Trujillo, Escuela Nacional Superior de Folklore José María Arguedas, Trujillo, 2019.

Paniagua, F., Glosas de danzas del altiplano peruano, Lima, Los Pinos E.I.R.L., 1982.

Pineda, F., Puno Capital Folklórica del Perú, Los Andes, Puno, 1973.

Portugal, C., José. Danzas y bailes del Altiplano. Lima, Universo, 1981.

Quillama, E., El Tondero como expresión folklorica y artística del Perú, Lima, Lluvia Editores, 1990.

Rohner, F., La Guardia Vieja, Lima, Instituto de Etnomusicología PUCP, 2018.

Rómulo, C., 12. Enciclopedia incana, vol. 7 des Obras completas, Michigan, Université de Michigan, 1977.

Santa Cruz C., Nicomedes Santa Cruz Obras Completas II. Investigacion (1958-1991), Buenos Aires, Libros en Red, 2004.

Torres, M., Las Canciones de la Marinera Norteña y sus temáticas, Lima, Escuela Nacional Superior de Folklore José María Arguedas, 2019.

Venturo, E., « Sacachispas. Marineras de Luis Abelardo Takahashi Nuñez », Cancionero, n°32, 1989.

Vidal G., La jarana es Piurana. Canción y Tradición criolla, Piura, Centro de Promoción e Investigación del Campesinado, 1988.

Villanueva, L., « Canción Criolla ». Antología de la música peruana, Lima, Latina SA, 1987.

 

 

Filmographie sommaire

 

Avec les mots-clés «marinera à Paris», le moteur de recherche Google propose 58 000 résultats, assortis d’extraits vidéos.

• « Cours de Marinera à Paris sur TV28 », réal. Eric Minsky-Kravetz, prod. TVIDF et TVPEROU, 2011, durée 49 minutes.

https://www.youtube.com/watch?v=DCjLk-lXgbk

• « La Marinera à Paris », réal. Antero Moreno, prod. Amore Production, 2015, durée 35 minutes.

https://vimeo.com/113920581

 

 

Sitographie sommaire

 

• Le dépôt institutionnel de l'École nationale supérieure de Folklore José María-Arguedas (ENSFJMA) conserve et rend accessible le matériel numérique produit par la communauté académique de l'école (thèses, mémoires de diplôme universitaire).

http://repositorio.escuelafolklore.edu.pe/handle/ensfjma/129

• Revue Marinera y punto https://issuu.com/marineraypunto

• Foros Peru

https://www.forosperu.net/temas/la-marinera-nortena-y-su-historia.453575/

• Taller danzas folkloricas « Todas las sangres »

http://www.todaslassangres.com/marineranorte.htm

Dans une grande mesure, le contenu de la présente fiche a été alimenté par l’analyse qualitative de huit entretiens réalisées auprès des informateurs et des porteurs de traditions et lors d’une conférence organisée par Patricia Meneces, Miriam Maldonado et Antero Moreno pour les festivités du jour de la Marinera 2019, avec la participation, comme contributeurs, de Renato Benavides et Fernando Seminario et de la compagnie folklorique America-Andina, qui ont interprété différentes variantes de la marinera, ainsi que lors du concours 2019 du Club Libertad, filiale de Paris, de la fête du perol 2019 et d’une répétition du Club Libertad, filiale de Paris.

Les références au document de transcription de ces entretiens sont précisées dans cette fiche, sous la forme : [Nom de la personne interviewée / Section de la transcription]. Une section correspond en principe à une question de l’enquêteur. Les documents de transcription sont accessibles, pour les chercheurs intéressés, auprès de l’association île du Monde.

• Mélanie BLECH, reine 2019, Club Libertad, filiale de Paris

• Dr. Fernando BURMESTER LANDAURO, président du Club Libertad de Trujillo

•Norma Margarita CHAUCO CARRANZA, danseuse de marinera, championne 2019 catégorie Adultes, Club Libertad, filiale de Paris

• Alison COUVREUR, reine 2015, Club Libertad, filiale de Paris

• Miguel Angel CRUZ BAUTISTA, danseur de marinera, champion 2019 catégorie Adultes

• Lita DEZA, championne mondiale de Marinera 1981, catégorie juvenil du Club Libertad á Trujillo

• Patricia MENECES, présidente de l'association Santa Lucia

• Bradley SEMINARIO, danseur de marinera

• Fernando SEMINARIO, musicien, danseur et professeur de marinera à l'école Fernando- Seminario

• Anais VILLANUEVA, reine 2017, Club Libertad, filiale de Paris

• Frida VILLANUEVA, présidente du Club Libertad, filiale de Paris

Plusieurs entretiens informels ont été réalisés pendant les festivités. Toutes les personnes rencontrées ont donné leur soutien à la réalisation de cette fiche d’inventaire, en vue de l’inscription de l’élément à l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel, et leur consentement à utiliser les informations et les images tirées de ces entretiens pour l’élaboration de la fiche et du documentaire vidéo associé.

Rédacteur(s) de la fiche

ORTIZ AVILA Daniel, chercheur et responsable de la production audio-visuelle, Association île du Monde, daniel.ortiz@iledumonde.org

 

Enquêteur(s) ou chercheur(s) associés ou membre(s) de l’éventuel comité scientifique instauré

TORTORIELLO Simone, responsable scientifique du projet Inventaire du Patrimoine culturel immatériel translocal francilien, Association île du Monde

 

Lieux(x) et date/période de l’enquête

Paris et région Île-de-France, 2019-2020

 

Données d’enregistrement

 

Date de remise de la fiche : 17 septembre 2020

Année d’inclusion à l’inventaire : 2020

N° de la fiche : 2020_67717_INV_PCI_FRANCE_00480

Identifiant ARKH : ark:/67717/nvhdhrrvswvksn8

Comment contribuer à l'inventaire : la méthode : https://www.pci-lab.fr/images/pdf/Tutoriel.pdf

Contribuer Accéder à la fiche sur Wikipédia: https://fr.wikipedia.org/wiki/Marinera

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