Au cœur du Parc du Luberon et d’un paysage de collines, de villages perchés, de champs de lavande et d’oliviers, la ville d’Apt (Vaucluse) recèle, outre des moulins d’huile d’olive et des fabriques d’ocre ou de céramique, des fabriques de fruits confits présentes depuis le Moyen-Âge. Cette tradition séculaire provient de la situation géographique exceptionnelle du territoire, bénéficiant de la vallée du Calavon, où prospèrent les arbres fruitiers, favorisant ainsi l’expansion de l’industrie du fruit confit.

Au cœur du Parc du Luberon et d’un paysage de collines, de villages perchés, de champs de lavande et d’oliviers, la ville d’Apt (Vaucluse) recèle, outre des moulins d’huile d’olive et des fabriques d’ocre ou de céramique, des fabriques de fruits confits présentes depuis le Moyen-Âge. Cette tradition séculaire provient de la situation géographique exceptionnelle du territoire, bénéficiant de la vallée du Calavon, où prospèrent les arbres fruitiers, favorisant ainsi l’expansion de l’industrie du fruit confit. Apt, renommée « capitale mondiale du Fruit confit », perpétue l’art du confisage, pratique de conservation des fruits par le sucre, avérée en Italie puis en Provence, alternative à la technique de la conservation, attestée dès l’Antiquité, des fruits immergés dans du miel. Les savoir-faire du confisage sont toujours scrupuleusement respectés dans les chaudrons en cuivre ou en étuves pour produire des fruits confits, translucides ou glacés : cerises, abricots, figues, melons et autres fruits des vergers, mais aussi des fruits exotiques tels que les ananas, les oranges et les citrons. Quelques artisans confiseurs et deux usines de confiserie du Pays d’Apt perpétuent ce savoir-faire rare et raffiné.

Depuis le Moyen-Âge à Apt (Provence), des corporations d’artisans travaillent dans le domaine de la confiserie, dans la fabrication des fruits confits, des nougats, des confitures, des calissons grâce aux productions de fruits de la vallée de la Durance, mais aussi dans les domaines de la poterie alimentaire, de la tabletterie pour les coffrets en bois, de la vannerie et de la chaudronnerie pour les bassines.

Les communautés ont évolué et sont représentées aujourd’hui par les artisans confiseurs, les industriels du fruit confit, la coopérative « Coopfruit Luberon », rassemblant 70 producteurs de fruits de la vallée du Calavon (entre Cavaillon et Apt), les producteurs de fruits de la vallée de la Durance, le syndicat interprofessionnel de la Confiserie, la confrérie du Fruit confit, qui regroupe les personnalités impliquées dans la promotion du fruit confit, les artisans chocolatiers, pâtissiers, boulangers et les épiceries fines, les restaurateurs, les hôteliers, les médiateurs culturels (musée d’Apt notamment) et touristiques (office du tourisme), les chambres d’agriculture, les ingénieurs agricoles et agronomes, les techniciens du Bulletin de santé végétal (BSV), les lycées agricoles, le réseau des Maisons familiales et rurales et l’INRA Monfavet à Avignon (Vaucluse).

Lieu(x) de la pratique en France

 

Le confisage est une pratique de conservation des fruits ancrée en Provence dès le Moyen-Âge. Elle se perpétue essentiellement à Apt (Vaucluse) au cœur du Luberon. Le développement du fruit confit y tient aux conditions environnementales propices à sa fabrication : une terre de vergers produisant d’abondantes variétés de fruits, une terre argileuse pour la fabrication des terres cuites vernissées et de la faïence, en particulier des faisselles à égoutter les fruits, la présence de soufre pour la conservation des fruits en saumure, la présence de cuivre pour la dinanderie et la fabrication des bassines (baselles), la présence de peupliers pour le bois des coffrets fabriqués par des layetiers et l’influence déterminante de la papauté d’Avignon dans l’introduction du confisage et de la commande liée à cette pratique locale.

 

 

Pratique similaire en France et/ou à l’étranger

 

La conservation des fruits se pratique grâce au miel depuis l’Antiquité au Moyen-Orient et dans le Maghreb. La pratique du confisage, sans doute importée d’Italie, se retrouve en France en Provence, en particulier à Saint-Rémy-de-Provence (confiserie Lilamand), à Carpentras (confiserie Clavel et confiserie du Mont-Ventoux), à Niort (angélique confite), à Clermont-Ferrand (fraise confite), ou encore à Nice.

Les variétés de fruits à confire

 

Pour confire, il faut utiliser de beaux fruits. Certaines variétés sont particulièrement adaptées et destinées au confisage, pouvant être entièrement imbibés de sucre et, devenant translucides et lumineux, atteindre cet aspect unique du fruit confit :

- abricots : « abricot rosé de Provence » du Pays d’Apt et de Roussillon ;

- poires : « poire Cérésine », « poire des Alpes Sarteau » et « poire Martin-Sec » ;

- figues : « figue Petite Marseillaise » ;

- prunes : « prune de Brignoles » et « prune Perdrigonne » ;

- ananas du Kenya et de Martinique ;

- angélique de Clermont-Ferrand

- cerises : griotte et bigarreau Hedelfingenen du Vaucluse

- « melon Prescott » de Saint-Martin-de-Castillon, au goût plus prononcé que le « melon charentais » ;

- clémentine ;

- « 'chinois »' de Corse (variété de petits pamplemousses).

Certains fruits ont des goûts plus doux, tels que la figue, le melon et la prune, ou avec plus d’amertume, tels que les agrumes. Parmi ces fruits, 75% proviennent du Vaucluse et seulement 25% de l’import.

 

 

La production des fruits

 

Un grand nombre d’agriculteurs locaux sont investis dans la production de fruits destinés à la confiserie. Environ 200 agriculteurs représentant 1000 ha de vergers travaillent avec l’usine d’Aptunion pour la transformation de 10 000 tonnes de fruits. En termes de poids économique, 18 millions d’euros sont reversés à l’agriculture locale. La plupart de ces agriculteurs sont fédérés par la coopérative Coopfruit autour d’un cahier des charges visant à entretenir les vergers dans la pratique d’une agriculture raisonnée. Ils sont notamment contrôlés au regard des taux de pesticides autorisés. La modernisation des vergers avec replantation est soutenue par des primes de 5 ans par an et par ha. Dans ce cadre, 70 producteurs sont engagés dans une démarche d’accompagnement avec la coopérative visant à améliorer le respect de l’environnement, la qualité, le respect de la règlementation et des plafonds de fertilisation. Afin de s’orienter vers un marché bio et de limiter l’utilisation de produits phytosanitaires, les agriculteurs conseillés par une ingénieur agronome de la coopérative sont encouragés entre autres, à améliorer les nichoirs dans les vergers, à ne pas trop arroser, à ne désherber qu’au niveau des arbres et non aux abords des champs etc.

Dans la plupart des vergers, la cueillette est mécanisée, surtout pour les bigarreaux, pour améliorer le rendement et rester compétitifs sur le marché européen et international.

 

 

La récolte des fruits et la coopérative « Coopfruit Luberon »

 

Les fruits sont cueillis juste mûrs. Pour les bigarreaux, la tradition provençale est de produire des fruits destinés au confisage. Les trois variétés qui se prêtent le mieux au confisage sont la cerise bigarreau Napoléon, la bigarreau Camus de Venasque et la bigarreau Rainier, blanches ou bicolores selon leur exposition au soleil. Les plus précoces sont récoltées du 5 au 25 juin environ.

Les bigarreaux sont ramassées mécaniquement et ne le sont pratiquement plus manuellement, à l’exception d’environ 200 ha de petits vergers du territoire. Le ramassage se fait grâce à un tapis placé sous les arbres, relié à des caisses spéciales pour l’agriculture, les « palox » fournis par la coopérative, où les cerises sont déversées dans un bain de saumure à base de soufre permettant de les conserver jusqu’à un an, puis transportées dans les sites de réception de la coopérative. Chaque palox a une contenance de 300 kg de bigarreaux. La récolte est évaluée à 10 tonnes par ha, les plus gros vergers étant de 40 ha. Les fruits peuvent alors être stockés pendant près d’un an : en saumure ou congelés.

 

L’équeutage et le calibrage

 

Une partie des cerises stockées à la coopérative sont équeutées, dénoyautées, calibrées puis expédiées, pour partie à l’export (Espagne, Italie, Algérie et Maroc). Le calibrage mécanisé permet de trier les fruits jusqu’à 24 mm de diamètre. Les plus gros fruits sont destinés à des produits de luxe.

Les deux usines de fruits confits Aptunion et Marliagues, ainsi que les artisans confiseurs récupèrent le reste des fruits dans les sites de la coopérative ou chez d’autres producteurs puis préparent les fruits avant de les confire : ils équeutent, dénoyautent, calibrent les bigarreaux, les abricots et les prunes, piquent les clémentines, pèlent et découpent les melons, etc., selon la nature des fruits. La préparation peut être manuelle ou mécanique.

 

Le confisage

 

La confection d’un fruit confit ou confisage consiste à remplacer l’eau contenue dans le fruit par du sucre cuit qui en assurera la conservation, tout en lui conservant le plus de sa saveur [définition du Congrès international pour la répression des fraudes, 1909]. C’est le phénomène d’osmose.

Les étapes du confisage sont les suivantes, qu’il s’agisse d’une production artisanale ou industrielle :

* La « blanchie » : les fruits (sauf les fraises) sont blanchis à l’eau bouillante pendant quelques minutes puis rafraîchis dans plusieurs bains d’eau claire, pour éliminer les microbes, les levures et toute trace de soufre, mais aussi pour dilater les fibres végétales afin de préparer le fruit à la mise au sucre, en détendant ses fibres, et de laisser passer le sucre vers l’intérieur du fruit. Les fruits sont suffisamment blanchis lorsqu’une aiguille plantée dans ceux-ci ressort sans difficulté. Ils sont ensuite refroidis et égouttés. * L’étape la plus délicate est ensuite le confisage, qui consiste à plonger les fruits dans un sirop, léger au départ (12 % de sucre), dont la teneur en sucre augmente au fur et à mesure du temps et en particulier des « cuites ». Les techniques et contenants ont évolué au fil du temps, qu’il s’agisse de production artisanale ou industrielle.

* À l’origine, les fruits étaient confits au miel, plus fort en sucre, ensuite au raisiné (jus de raisin auquel on a fait subir par chauffage une évaporation pour obtenir une teneur en sucre suffisante), puis au sucre de canne. Chez l’artisan confiseur, on les plonge d'abord dans un sirop léger et on porte à ébullition. On les y laisse refroidir. Puis ils passent dans un bain de sirop plus concentré et sont réchauffés. Et ainsi de suite très lentement. Il faut quelques passages, environ sept pour les petits fruits confits, mais une douzaine pour les gros, ce qui prend un ou deux mois. Cette opération est appelée la « façon ».

* Dans l’usine d’Aptunion, la première opération est la « mise au sucre » dans des bacs contenant 250 l de sirop peu concentré pour être ensuite introduits dans des étuves. La fabrication du sirop se fait actuellement en étuve avec du sucre de betterave et du glucose pendant dix jours ; les fruits sont ensuite refroidis pendant deux jours. L’augmentation de la concentration en sucre se fait progressivement et la « façon » pratiquée artisanalement n’est pas nécessaire. Ce procédé actuel d’étuvage en usine permet de confire en une seule façon, en mettant les fruits en sucre dans des cuves afin qu’ils ressortent confits. La fabrication se fait en continu, lentement, sans enlèvement des fruits pendant dix jours pour environ 200 kg de fruits par cuve, soit 120 tonnes de fruits confits au total (Aptunion).

La présentation finale des fruits confits est de deux sortes : égouttés ou glacés.

* L’égouttage, jadis à la passoire (passadouira), et aujourd’hui pendant au moins 24 heures sur des grilles en métal, qui étaient autrefois en vannerie ou dans des faisselles en terre vernissée. Lorsqu’ils sont égouttés, le tri des fruits se fait à la main et sur des tapis roulants en usine.

* Le glaçage : le glaçage au sucre massé est une opération délicate : dès que le sirop commence à cristalliser, en contact avec les parois froides du chaudron, le confiseur passe la spatule sur les parois pour ramener le sucre massé, glacé. Les fruits sont alors enrobés d’une fine couche de sucre, ce qui leur confère une esthétique parfaite, tout en préservant leur moelleux et leur saveur, et empêche qu’ils ne collent aux doigts. « Les anciens ne vendaient que des fruits glacés », a-t-on entendu durant l’enquête. La pratique est courante pour la plupart des fruits, sauf pour les cerises. Selon les confiseurs, les fruits glacés sont les « fruits nobles ».

* L’emballage se fait dans des coffrets en papier, en plastique ou en bois. Une dizaine de layetiers installés à Apt fabriquaient des coffrets en bois. Le musée de l’Aventure industrielle du Pays d’Apt, ancienne usine du confiseur Marliagues, possède une grande variété de boîtes en papier, carton, métal, bois et leurs étiquettes, marques de reconnaissance du XIXe siècle des fabriquants et des produits. Autrefois, les boîtes en fer blanc étaient aussi utilisées.

* La transformation : les pâtissiers, boulangers, chocolatiers et restaurateurs sont les premiers utilisateurs de fruits confits pour les préparations culinaires ou décorations, compte-tenu de la beauté et de la conservation des fruits confits.

* L’application :

les pâtisseries provençales et aptésiennes en premier lieu, tels que la tarte aptésienne, qui récupérait les fruits explosés du confiseur cuits en confiture, répartie sur une pâte brisée recouverte de croisillons, le « colombier », la brioche aux fruits confits, le gâteau Calendal aptésien, le gâteau des Rois, mais aussi dans toutes sortes de cakes. Chaque pâtissier d’Apt a sa propre spécialité : le galapian d’Alain Bouchard, la tarte du Luberon et le grafillon de la pâtisserie du Pierrot blanc, l’Aptésien et l’Amarena de Jean-Christophe Rousset. Faire du confit de confit est interdit.

* La commercialisation : les principales ventes sont au profit des transformateurs déjà cités, mais aussi aux épiceries fines et pour 5 % à la grande distribution. Les principaux pays demandeurs à l’export sont l’Angleterre, les États-Unis et l’Asie. Aptunion vend 70 % de sa production à l’export vers 15 pays.

Français

Provençal

Patrimoine bâti

 

Sans objet

 

 

Objets, outils, matériaux supports

 

L’évolution des outils, matériel et contenants, liée à la fabrication des fruits confits apparaît comme liée à l’invention au fil du temps des procédés de chauffage et du type de pratique industrielle ou artisanale. Le témoignage des interlocuteurs locaux, confiseurs et médiateurs du musée de l’Aventure industrielle d’Apt retrace cette diversité. Le musée présente les machines de préparation des bigarreaux, mécanisée depuis les années 1930 et parmi elles :

- l’« équeuteuse » : les bigarreaux sont logées dans un tambour à alvéoles, où les queues sont couchées, pliées, tirées afin que les cerises tombent ;

- la machine à peler les pommes, fabriquée en Angleterre ;

- la « dénoyauteuse » : les fruits sont placés dans un tambour à alvéoles percées pour que les noyaux enfoncés par des « pointeaux » passent et tombent dans un récipient. Dans la boutique de la confiserie Le Coulon, on blanchissait dans des « baselles » en terre vernissée, aujourd’hui en plastique, et l’on chauffait dans les bassines en cuivre, puis dans des bassines double fond, extérieur acier et intérieur cuivre, puis en aluminium, puis en inox : les « tulipes ».

Dans les fabriques jusqu’au XIXe siècle, les chaudrons étaient chauffés au bois sur des fourneaux maçonnés en briques réfractaires, recouverts d’une plaque en fonte. L’arrivée du chauffage à la vapeur dès le début du XXe siècle a permis d’équiper les confiseries d’Apt en un ensemble de petites bassines à double fond pouvant contenir 5 kg de fruits et 3 kg de sucre, reliées entre elles et alimentées par de la vapeur, permettant un rendement bien supérieur.

Le matériel utilisé (cuillères, louches, bassines et emballages) provenait de l’écosystème des métiers artisanaux (potiers, layetiers, cartonniers, vanniers, chaudronniers), remplacés en partie dès le XXe siècle par des fabricants industriels pour les bassines, cuves en inox et emballages en plastique, même si les emballages traditionnels ne sont pas abandonnés dans les épiceries, confiseries ou pâtisseries de luxe.

La transmission reste principalement familiale, ainsi que le montre l’histoire des quelques confiseurs en activité mais aussi l’apprentissage chez les maîtres confiseurs d’Apt. Monsieur Ceccon père, de la confiserie Le Coulon à Apt, une des trois confiseries artisanales du Vaucluse (confiserie Marcel Richaud à Apt et confiserie Saint Denis aux Beaumettes), a appris chez un des plus anciens confiseurs d’Apt puis a créé sa propre confiserie, acheté une boutique, puis construit un atelier en zone industrielle pour la fabrication. Son fils a hérité du goût pour la confiserie et travaille aujourd'hui à la place de son père en retraite. Le petit-fils de monsieur Ceccon père, après des études en lycée hôtelier à Marseille et au lycée professionnel du Beaucet, est devenu chocolatier. Après un apprentissage chez le chocolatier parisien Patrick Roger, il travaille depuis quatre ans avec ses parents à Apt et pratique son métier de chocolatier. Le nom de la chocolaterie Le Coulon provient du nom de la rivière passant le long de la boutique (« Le Caulon » ou actuellement « Le Calavon »).

La formation délivrée par le réseau des lycées agricoles et des Maisons familiales et rurales est également déterminante dans l’accès au métier de confiseur. Enfin, le rôle des conseillers agricoles, des médiateurs culturels et touristiques est déterminant dans la sensibilisation et l’éducation à ces métiers rares, au goût et à la qualité des produits. L’action du musée d’Apt et de l’office du tourisme du Pays d’Apt Luberon participe à la préservation et au développement de cet art provençal séculaire.

La communauté de communes du Pays d’Apt Luberon Pont-Julien

La confrérie du Fruit confit

Le musée de l’Aventure industrielle du Pays d’Apt

L’office du tourisme du Pays d’Apt Luberon Pont-Julien

L’association des Sites remarquables du goût

La pâtisserie Alain Bouchard

Le syndicat régional des Pâtissiers

L’art de la conservation par confisage a évolué avec la technique de l’étuvage, avec une production industrielle qui côtoie l’activité artisanale. C’est le cas pour deux usines d’Apt (Aptunion et la Maison Marliagues), motrices dans le développement et la préservation de la pratique, les artisans confiseurs étant de leur côté dépositaires du savoir-faire ancestral et de la valeur ajoutée qui leur est propre.

Dans l’Antiquité, les Romains faisaient confire les fruits dans du miel, jusqu’à à ce que la canne à sucre, introduite pendant les Croisades, permette d’améliorer la technique. Au Moyen-Âge, Nostradamus trouve la recette idéale du fruit confit, qu’il publie dans son ouvrage Le Traité des fardements et des confitures. La conservation par confisage apparaît également en Provence dès le bas Moyen-Âge ; selon Olivier de Serres, dès les années 1500, les artisans connaissaient et maîtrisaient la technique du confisage.

Le confisage étant très répandu en Italie, il est probable que lors de l’établissement des papes en Avignon, les Italiens ont exporté leur technique. La confiserie commence à se développer au XIVe siècle. En 1342, le pape Clément VI choisit le confiseur aptésien Auzias Maseta, escouyèro en counfisarias (écuyer en confiserie). Plusieurs textes attestent alors la présence de fruits confits à Apt : la remise d’offrandes faites chaque année à Clément VI et à Urbain V (« 50 setiers de fruits confits avec du raisiné »), la nomination par Benoît XIII d’un autre Aptésien, Battarelli, son écuyer.

Au XVIe siècle, l’amorce d’une industrie de la confiture est observée à Apt ; au XVIIe siècle, Madame de Sévigné, dans une des ses lettres à sa fille, Madame de Grignan, compare la ville d’Apt à « un chaudron de confiture ». La présence de corporations est mentionnée au XVIIIe siècle dans les procès-verbaux municipaux, qui mentionnent l’existence de 6 artisans-pâtissiers en 1752.

L’arrivée des machines à vapeur puis de l’électricité profitent à l’essor de cette industrie grâce à des techniques de chauffe plus élaborées et adaptées à de plus grandes quantités. D’importantes exportations vers l’Angleterre, dépassant 2 400 000 kg de confiseries, sont observées en 1932, avec 11 usines et 600 ouvriers confiseurs comptabilisés à Apt [André Noséda, 1935]. Au XIXe siècle, de grands confiseurs aptésiens s’imposent : Jaumard, Rambaud, Marliagues, puis Barrielle, Bardouin, Reboulin, Piton, Gay, Vial, Blanc… La confiserie prend son essor avec l’arrivée du sucre de betterave. Grâce à l’évolution des techniques, le « confisage » se développe parallèlement à l’étranger délaissant peu à peu la production aptésienne.

Afin de relancer le développement international des fruits confits d’Apt, six artisans confiseurs indépendants se regroupent pour créer en 1962, l’usine Aptunion, qui sera reprise par plusieurs propriétaires jusqu’en 2012, tout en assurant l’essor de cette industrie et en redonnant leurs lettres de noblesse aux fruits confits d’Apt. Elle emploie actuellement avec 250 personnes dans ses trois usines. De même, la fabrique Marliagues, confiserie familiale depuis 1873, poursuit son essor depuis cinq générations, et s’est installée en zone industrielle en 1985, faisant place, sur son site en centre-ville, au musée de l’Aventure industrielle du Pays d’Apt instauré par la Ville d’Apt. La Maison Marliagues emploie actuellement 20 personnes. À leurs côtés, trois maîtres confiseurs et un maître confiturier exercent encore leur métier dans les boutiques du centre-ville en produisant des fruits confits et des confitures.

Parmi les plus anciennes traditions provençales, la présentation des treize desserts de Noël est toujours perpétuée ; ils doivent rester sur la table jusqu’au 27 décembre. Les fruits confits font partie intégrante de la liste, qui peut différer d’une commune à l’autre, mais comprend notamment :

- trois mendiants : amandes, noisettes et noix, figues sèches et dattes ;

- les raisins de Noël, ou « passarilles », conservés au grenier sur des claies, tels que le raisin Chasselas de Moissac ;

- le melon, conservé à la cave dans de la paille ;

- des fruits confits à Apt, des ananas et des oranges à Marseille.

Selon la coutume, pour la Pentecôte, est servi le colombier, « gâteau de Pentecôte ». Fabriqué à Marseille avec des fruits confits et du kirsch, de forme ovale, il est préparé avec des amandes, des fruits confits et une fève en forme de colombe. Sur le gâteau était inscrit « Qui la colombe trouvera, dans l’année se mariera », en référence à une légende de Marseille selon laquelle, à l’arrivée des Grecs, le marin Protis épousa la fille du roi de Marseille après avoir trouvé une pierre blanche dans un gâteau donné en offrande.

Les modes d’alimentation

 

La consommation des fruits confits et le métier de confiseur continuent de se raréfier dans le contexte d’industrialisation de l’alimentation. D’innombrables confiseries industrielles ont remplacé les confiseries artisanales. Celles-ci constituent un marché de niche : consommées localement selon la coutume, elles représentent un produit d’attractivité du territoire, attirant les consommateurs gastronomes avertis ou originaires de pays amateurs de ces sucreries au goût traditionnel rare.

Seulement trois confiseurs, un confiturier et deux industriels sont encore en activité sur le territoire : confiserie Le Coulon, confiserie Marcel Richaud à Apt, confiserie Saint-Denis aux Beaumettes, Maison Octave, confiturier à Gargas, usines Aptunion et Maison Marliagues.

 

 

L’absence de formation

 

La transmission est essentiellement familiale ou expérientielle ; elle se développe cependant par l’intermédiaire d’autres professions (pâtissiers ou chocolatiers). Les confituriers dont la profession est voisine de la confiserie peuvent transmettre ce savoir-faire en interne.

Modes de sauvegarde et de valorisation

 

Le musée de l’Aventure industrielle du Pays d’Apt : installé dans l’ancienne usine de fruits confits Marliagues, le musée présente les outillages, matériel, contenants, étiquettes, utilisés pour la fabrication et le conditionnement des fruits confits au XIXe siècle ; il est également consacré aux savoir-faire associés du Pays d’Apt : l’ocre et la faïence dont la spécificité est la terre vernissée ou la terre mêlée.

L’office du tourisme du Pays Apt Lubéron sensibilise les hébergeurs aux produits locaux, édite et diffuse des brochures sur le fruit confit.

L’association des Sites Remarquables du Goût (SRG) d’Apt a rejoint le réseau des SRG dès leur création en 1994 et mène des actions de commercialisation dans

les Salons des SRG organisés en France. Elle valorise les fruits confits avec les restaurateurs et les tables d’hôtes proposant des menus du terroir dédiés aux fruits confits d’Apt.

La confrérie du Fruit confit, créée en 1992, a pour mission de promouvoir et défendre le fruit confit. Elle intronise des personnalités connues qui deviennent des ambassadeurs du fruits confit en France.

 

 

Actions de valorisation à signaler

 

La fête du Fruit confit est organisée en juillet par la confrérie du Fruit confit et les commerçants d’Apt. Elle présente les savoir-faire de fabrication du fruit confit, tel le « glaçage du confiseur Marcel Richaud », et des recettes spéciales, telles l’omelette aux oranges confites ou le lapin aux figues confites.

Des visites touristiques sont organisées par l’office du tourisme du Pays Apt Luberon et par l’usine Aptunion.

La création du gâteau Galapian, en 1994, par le syndicat du Bigarreau valorise la cerise bigarreau du terroir aptésien. À la suite du concours lancé, le pâtissier aptésien Alain Bouchard a gagné et fourni la recette du gâteau appelé « Galapian ». Un ruban distribué par la confrérie du Fruit confit à tous les pâtissiers atteste l’authenticité du Galapian.

 

 

Bibliographie sommaire

 

EYMONY (Robert), Autour des fruits confits, Éditions Equinoxe, 2014.

GAILLARD (Elie-Marcel),

Les Fruits confits d’Apt : histoire et technique,

Avignon, Éditions A. Barthélemy, 1996 [en ligne : http://www.sudoc.fr/076734005 ].

NOSEDA (André), L'Industrie des fruits confits dans la ville d'Apt, thèse de doctorat, Université Aix-Marseille, faculté de droit d'Aix, 1935 [en ligne : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9796438p.r=Les%20Fruits%20confits?rk=64378;0]

OUVR. COLL., La Pâtisserie française illustrée, Paris, Presse corporative française, 1936-1989.

Le Journal des confiseurs-pâtissiers, chocolatiers, fabricants de biscuits, confitures, fruits confits, sirops, liqueurs, conserves : organe mensuel, technique, professionnel pour ces industries et celles qui s'y rattachent, dir. Fernand Barthélemy et Pierre Lacan, 1890-1896 [exemplaires à la Bibl. nat. France].

 

 

Filmographie sommaire

 

Les Fruits confits d’Apt, prod. : Midi en France-France 3, 2014 [en ligne : https://vimeo.com/84669182 ].

 

 

Sitographie sommaire

 

Les Fruits confits, artisanat provençal

http://www.notreprovence.fr/artisanat_fruits-confits.php

Les Fruits confits (Apt)

http://www.luberon-apt.fr/index.php/fr/decouvrir/le-gout/fruits-confits/item/fruits-confits

AILLARD Jean

Premier adjoint de la Ville d’Apt, vice-président de la communauté de communes du Pays d’Apt en charge du Développement économique, ancien confiseur

BOUCHARD Alain

Pâtissier-chocolatier, trésorier de la confrérie des Fruits confits, trésorier de l’association locale des Sites remarquables du goût, organisateur de la fête de la Gastronomie à Bonnieux

BUSSI Nathalie

Ingénieur agronome, conseillère de la coopérative Coopfruit Luberon auprès des agriculteurs de la vallée du Calavon (Sorgues à Apt) / Le boisset de Caseneuve, 84750 Caseneuve

Madame CECCON

Artisan confiseur, confiserie Le Coulon à Apt

Madame RICHAUD

Artisan confiseur, confiserie Marcel Richaud

EYMONY Robert

Grand-maître de la confrérie des Fruits confits, auteur de l’ouvrage Autour des Fruits confits, ancien chef cuisinier et enseignants en cuisine / La Haute Burlière, 84750 Viens

LEGUINEL David

Directeur de l’office du tourisme et opération Grand Site, communauté de communes du Pays d’Apt Luberon

OLIVIER Charles

Directeur d’Aptunion industrie du fruit confit, communes du Pays d’Apt

SACCO Frédéric

Conseiller municipal de la Ville d’Apt, vice-président de la communauté de communes du Pays d’Apt en charge du Tourisme et de l’opération Grand Site

POVALSKI Sandra

Directrice du musée de l'Aventure industrielle aptésienne

DICCICO Martine

Chargée de relations presse, office de tourisme du Pays d’Apt Luberon

ROCCA Christian

Coordinateur du réseau des Sites remarquables du goût

Rédacteur de la fiche

 

Nom

Catherine VIRASSAMY

Fonctions

Architecte spécialisée en patrimoine culturel matériel et immatériel, association greenandcraft, le comptoir des savoir-faire, pour la Fédération des Sites remarquables du goût

Coordonnées

catherinevirassami@gmail.com

 

Enquêteur(s), chercheur(s) ou membre(s) du comité scientifique associé

Nom(s)

Catherine VIRASSAMY

Fonctions

Voir supra.

 

 

Lieux(x) et date/période de l’enquête

 

Enquête : 29-30 août 2017 à Apt

Rédaction de la fiche : décembre 2017-février 2018

 

 

Données d’enregistrement

 

Date de remise de la fiche : 29 octobre 2018

Année d’inclusion à l’inventaire : 2018

N° de la fiche : 2018_67717_INV_PCI_FRANCE_00409

Identifiant ARKH ark:/67717/nvhdhrrvswvk2h5

Comment contribuer à l'inventaire : la méthode : https://www.pci-lab.fr/images/pdf/Tutoriel.pdf

Contribuer Accéder à la fiche sur Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Fruits_confits_d'Apt

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