Les pratiques d’itinérance et de pérégrination au Mont Saint-Michel

La valeur patrimoniale du Mont Saint-Michel

La valeur patrimoniale du Mont Saint-Michel ne peut être restreinte à son histoire, à son architecture ou son inscription remarquable dans le paysage. Il importe de prendre en compte l’existence d’un patrimoine culturel immatériel fait de la perpétuation et de la résilience de pratiques et de représentations par lesquelles ce mont fait sens. Conjuguant lieu et chemin, à l’interface du fixe et du mobile, de l’enceinte et de l’ouverture, ce roc continue d’être une matrice à travers laquelle les hommes renaissent à eux-mêmes.

La valeur patrimoniale du Mont Saint-Michel ne peut être restreinte à son histoire, à son architecture ou son inscription remarquable dans le paysage. Il importe de prendre en compte l’existence d’un patrimoine culturel immatériel fait de la perpétuation et de la résilience de pratiques et de représentations par lesquelles ce mont fait sens. Conjuguant lieu et chemin, à l’interface du fixe et du mobile, de l’enceinte et de l’ouverture, ce roc continue d’être une matrice à travers laquelle les hommes renaissent à eux-mêmes. Il demeure la destination d’itinérances et de pérégrinations qui perpétuent une tradition de pèlerinages née à l’époque médiévale. Héritières d’un mouvement âgé de plus d’un millénaire, les pratiques rituelles associées de nos jours au Mont ont connu d’importantes évolutions, prenant aujourd’hui des formes touristiques, souvent poreuses entre elles, qu’elles soient culturelles, spirituelles, éducatives, écologiques et sportives.

Un pèlerinage au Mont Saint-Michel s’entend, au sens premier, comme une pratique chrétienne. Il concerne des hommes et des femmes qui, cheminant, inscrivent cette démarche dans l’expression de leur foi. Cette pratique mobilise plus largement tous ceux qui les accueillent tout au long de leur périple : religieux, commerçants (restaurateurs, hôteliers, vendeurs d’enseignes), professionnels du tourisme et du patrimoine, guides. De nos jours, les cheminements vers le Mont Saint-Michel se signalent par un dépassement du cadre religieux historique. Des itinérances ne se réclamant pas du christianisme se sont développées au cours du dernier siècle. Derrière l’adjectif « touristique », les pratiques de pèlerinage contemporaines témoignent des relations plus profondes que les hommes continuent d’entretenir avec le Mont ; un rapport désormais mondialisé après avoir été longtemps borné à l’univers européen occidental (Fig.1). Il est significatif que les récents aménagements qui ont visé le rétablissement du caractère maritime du site conduisent aujourd’hui les visiteurs du monde entier (près de 3 millions par an) à marcher (sur quelques centaines de mètres) pour s’y rendre à pied (Fig. 2 à 4). La transformation de cette voie d’accès a restauré à minima la symbolique pèlerine par laquelle le Mont s’est développé au fil des siècles. Étendue très au-delà du seul monde chrétien, la communauté des itinérances et pérégrinations au Mont Saint-Michel semble ainsi, de nos jours, toucher l’humanité dans sa globalité.

Lieu(x) de la pratique en France

 

Les chemins

Les itinérances et pérégrinations vers le Mont Saint-Michel sont polarisées par l’attraction de ce haut lieu localisé au sud de la baie éponyme (Fig. 2). Dans le Mont intra-muros, tout en gravissant la Grande Rue du village, ces cheminements se poursuivent et atteignent le sanctuaire et l’ancienne abbaye qui couronne son sommet (Fig. 3).

Le Mont Saint-Michel et la petite baie concentrent les itinérances, pérégrinations et pèlerinages qui y convergent. Intra-muros, en été, cette concentration peut valoir à la Grande Rue du village d’être engorgée au point de stopper la marche des visiteurs. Lors des journées de forte fréquentation, le pont-passerelle (Fig. 4 et 5) entre la station des navettes et le pied du Mont voit quotidiennement l’arrivée et le départ de plus de 20 000 personnes à pieds sur les derniers 400 m. Dans la baie, la vastitude et l’absence de balisage diluent largement dans l’espace les parcours des traversées vers le Mont Saint-Michel. Les groupes forment de nombreux agglutinements qui évoluent dans un environnement plat, illimité, nu, où, certains jours, il peut être très difficile de différencier les milieux liquide, solide et aérien.

À l’observation, plusieurs échelles spatiales de cheminements peuvent être distinguées, qui correspondent chacune à un certain niveau de mise en relation de l’homme avec son environnement :

− les cheminements courts concernent des visiteurs qui, après leur sortie des navettes motorisées, marchent vers le Mont sur 400 m. Ils ne montent pas toujours jusqu’à l’abbaye, au sommet du rocher. Selon les statistiques de 2014, seule la moitié des visiteurs du Mont Saint-Michel franchit la « douane » du complexe abbatial. La moitié d’entre eux se concentrent dans le village et sur les remparts, fréquentant commerces de souvenirs, cafés et restaurants.

− d’autres visiteurs, en nombre inconnu, font une traversée à pied en empruntant le pont passerelle sur toute sa longueur, durant 30 minutes de marche. Ils se confrontent à l’environnement plat, dénudé, se livrant à une lente approche du mont. Ils évoluent sur un terrain balisé sans avoir de contact physique avec les grèves.

− un autre ensemble de marcheurs s’emploie à atteindre le mont par les grèves, accompagnés de guides, soit par les « herbus » (prés salés) et l’estran sableux en venant de la rive sud ou de l’est, soit depuis le Bec d’Andaine (par le nord) ou l’ouest. Si le nombre de marcheurs franchissant la baie par le nord ou l’ouest peut être connu en s’adressant aux compagnies de guides de la baie, l’effectif de ceux qui traversent seuls les grèves depuis la rive sud est impossible à estimer de façon fiable.

− dans ces deux dernières catégories de marcheurs, une minorité se livre à des itinérances de plus ou moins longue durée, de deux à quatre jours, d’une semaine ou deux, voire un mois. Ces marcheurs revendiquent une démarche culturelle et historique, ou sportive, ou parfois à caractère spirituel, sans raccorder toujours clairement celle-ci au cadre chrétien, ou encore religieuse. Il s’agit le plus souvent d’une conjugaison de l’ensemble de ces éléments. Dans ces cas, ils peuvent être accueillis dans la Maison du Pèlerin, au sein du sanctuaire du Mont Saint-Michel. D’autres sont hébergés dans le prieuré d’Ardevon, situé à quelques kilomètres dans les terres.

En traversant la baie, les cheminements suivent deux principaux parcours (Fig. 2 à 6). Le premier, venant du sud, quitte le continent au lieu-dit « La Caserne » et emprunte le pont-passerelle. Ces trajets se montrent souvent très courts, quand ils ne débutent qu’à la sortie des navettes, appelées « passeurs », qui déposent les visiteurs à quelques centaines de mètres de l’entrée du Mont. Le second parcours, qui vient du nord, couvre en revanche 7 km de vide désertique par les grèves en quittant le littoral du Bec d’Andaine, flèche sableuse d’où partent la majeure partie des traversées encadrées par les guides. Les fortes marées et la présence de sables mouvants rendent ces marches très dangereuses sans encadrement. Selon le choix des guides, ces trajets croisent l’îlot de Tombelaine, tantôt par l’est ou par l’ouest.

Une fois arrivé sur le Mont Saint-Michel, après avoir franchi l’enceinte des remparts et la porte du Roy, le cheminement principal suit la Grande Rue du village selon une trajectoire en vortex épousant la topographie insulaire tout en s’élevant jusqu’à une altitude de 78 m (Fig. 2). À proximité du sommet, ce parcours se prolonge dans l’ensemble abbatial par une série d’escaliers (Grands Degrés extérieurs, puis Grands Degrés intérieurs), puis il opère dans l’édifice un contournement géographique de la partie supérieure du rocher qu’enveloppe la complexité labyrinthique de l’architecture de l’abbaye. Durant ce laps de temps, les visiteurs pénètrent dans les « entrailles » du mont, avant d’en ressortir par ses jardins.

 

Ces traversées du Mont Saint-Michel et de la baie ne constituent, traditionnellement, que l’étape terminale d’itinérances plus longues. Elles étirent la géographie de la pratique très au-delà du mont et de sa baie. Depuis 1998, l’Association des Chemins du Mont Saint-Michel œuvre à la réhabilitation et à la réouverture en itinéraires culturels des anciens chemins de pèlerinages vers le mont. Attestés par des recherches historiques, et labellisés « Itinéraires culturels » par le Conseil de l’Europe, ces chemins (Fig. 9) sont balisés pour offrir aux marcheurs une certaine sécurité et qualité paysagère, selon les termes employés par l’association, et une facilité d’accueil. Les localités traversées, quand elles sont partenaires de l’opération, sont marquées symboliquement par le plantage d’un clou figurant au sol une silhouette du Mont Saint-Michel et un bâton de pèlerin. Une autre association, Les Compagnons du sentier, propose des marches spirituelles plus courtes, de quatre jours, entre Champsecret (Orne) et le Mont Saint-Michel. Elles sillonnent un tronçon historique du chemin d’Alençon au Mont. Ils achèvent leur périple dans l’église du sanctuaire, accueillis par un prêtre. Par-delà les recommandations légitimées par l’histoire, les marcheurs restent cependant libres de cheminer où bon leur semble. Une enquête menée dans la Maison du Pèlerin (lieu d’hébergement des pèlerins dépendant du sanctuaire du Mont Saint-Michel), en 2018-2019, indique à ce propos l’existence de plusieurs trajets préférentiels (Fig. 10).

Les parcours vers le Mont Saint-Michel les plus fréquents viennent de l’est. Ils suivent un axe de Chartres vers Alençon, traversant la Beauce, le Perche, le sud de l’Orne ou le nord de la Mayenne puis le Sud-Manche (surtout le pays de Mortain) vers le Mont Saint-Michel. Ils se déclinent en de nombreuses variantes, chaque marcheur ou groupe réalisant son parcours en suivant tantôt les tracés de livres-guides (comme ceux édités par l’association culturelle des Chemins du Mont Saint-Michel) ou son propre plan.

Deux autres parcours se doivent d’être ici mentionnés quoiqu’ils apparaissent moins empruntés que les précédents. Un premier part du Nord-Cotentin et longe globalement le littoral, bien qu’il passe temporairement vers l’intérieur des terres par Coutances en direction du Sud-Manche. Il suit l’ancien « chemin des Anglais » vers le Mont et Compostelle. Un second arrive du sud, de l’Anjou ou du Pays nantais en traversant la Haute-Bretagne via Rennes ou Fougères, quoique les marcheurs proviennent parfois de contrées plus méridionales, telles les Charentes. Ils cheminent (mais dans le sens opposé) sur l’un des tronçons commun aux chemins de Saint-Jacques. D’autres partent du Mont en direction du sud pour rejoindre Compostelle. Incidemment, on peut dire que ces itinérants donnent chair à l’appartenance du Mont Saint-Michel au bien sériel Unesco des chemins de Saint-Jacques.

À la différence des chemins de Saint-Jacques, les itinérances vers le Mont sont marquées par des cheminements plus courts qui excèdent rarement dix jours (c’est-à-dire environ 250 km). Elles empruntent des parcours à faibles dénivelés (collines de Normandie), des plaines peu vallonnées, voire plates (Beauce). La faiblesse de la fréquentation de ces chemins amène les marcheurs à voyager le plus souvent en solitaire, ou en groupe isolé, sans rencontrer pendant leur périple des itinérants animés du même élan. Ainsi, ce n’est qu’une fois arrivés sur le Mont, dans la Maison du Pèlerin, qu’ils partagent leur expérience avec d’autres. Ces traits ne relèvent pas d’une « tradition ». L’isolement des marcheurs vers le Mont s’explique vraisemblablement par la modestie actuelle de la fréquentation de ces parcours ; laquelle se comprend par l’évolution du Mont au XXe siècle, l’ancien sanctuaire s’étant mué en site patrimonial et touristique. Autrement dit, tandis que l’attraction pour le Mont Saint-Michel s’est accrue, transformée et mondialisée, a contrario les itinérances vers celui-ci se sont trouvées marginalisées. Comme si le Mont en tant que chemin et traversée avait perdu son évidence. Il aura fallu que les travaux de rétablissement du caractère maritime le rappellent aux visiteurs.

 

Sur le Mont, le village et l’abbaye

Abrité au pied du mont et de l’abbaye, le village s’est historiquement développé le long de la « voie sacrée » qui conduit au sommet. Les commerces y accueillaient les pèlerins à l’issue de leur voyage où ils étaient hébergés et nourris. De nombreuses échoppes vendaient des enseignes que les voyageurs emportaient en mémoire de leur périple. Encore aujourd’hui, le village loge les visiteurs, les alimente et leur vend des souvenirs (Fig. 11).

« Dormir au Mont » est une expérience particulièrement recherchée par ses visiteurs. Ce désir procède sans doute en partie du sentiment d’avoir « le Mont pour soi seul » pendant la nuit où celui-ci semble déserté du monde. Mais il est peut-être également lié à l’association inconsciente du Mont-Saint-Michel à un univers onirique, ce qu’exprime d’ailleurs la revelatio, sa légende fondatrice. Bien que la capacité d’accueil hôtelier sur le mont soit très limitée et les nuits coûteuses, les hébergements du sanctuaire (« Maison du Pèlerin ») et les logis des Fraternités de Jérusalem restent réservés aux pèlerins (qui attestent cette qualité) ainsi qu’aux retraitants à des montants près de dix fois moins élevés (il s’agit d’offrandes) que ceux des hôtelleries touristiques. Autrement dit, sur le plan de l’hébergement, se manifeste encore sur le Mont Saint-Michel un certain bénéfice accordé à une approche spirituelle du lieu.

 

Pratique similaire en France et/ou à l’étranger

Sans objet

Les itinérances, pérégrinations et pèlerinages au Mont Saint-Michel désignent les cheminements pédestres par lesquels on se rend sur le Mont Saint-Michel. Héritiers des grands pèlerinages chrétiens par lesquels le Mont s’est développé pendant près de douze siècles, ils comprennent de nos jours des manifestations très diversifiées qui sortent de l’unique cadre chrétien et associent à divers degrés des motivations touristiques, culturelles, spirituelles et cultuelles. Derrière ces pratiques, parfois triviales en apparence, se niche un champ imaginaire et symbolique complexe. Surtout, ces manifestations se révèlent indissociables d’un lieu sacré, le Mont Saint-Michel, que les marcheurs aspirent à atteindre par leurs propres forces. Leur cheminement, qui implique à la fois une traversée géographique et la mise en relation de leur intériorité psychique avec le milieu, traduit un dépassement ontologique.

 

Approche de la symbolique contemporaine du Mont Saint-Michel

Les reconnaissances patrimoniales du Mont Saint-Michel ont reposé jusqu’ici, pour l’esssentiel, sur une célébration du caractère remarquable de son architecture des XIe au XVe siècle ainsi que sur les spécificités géo-esthétiques du site. Inscrit par l’Unesco en 1979, l’intérêt des experts s’est d’abord centré sur la magnificence de son abbatiale et sur son village fortifié. C’est au titre de haut-lieu de la civilisation chrétienne médiévale que son caractère monumental a été mis en lumière. Pourtant, bien qu’offrant un témoignage du passé médiéval, l’histoire et l’architecture ne peuvent seules recouvrir l’intérêt patrimonial du site. Sans évoquer ici ses circonstances politiques, la fondation du Mont Saint-Michel est indissociable d’un récit légendaire, la revelatio, selon lequel saint Michel serait apparu en 709 à l’évêque d’Avranches, Aubert ; l’archange insistant dans trois de ses songes pour qu’il fonde un sanctuaire sur un îlot rocheux appelé le « mont Tombe ». La relique supposée de l’évêque, un trou sur le crâne d’Aubert censé marquer l’empreinte du doigt de saint Michel et la réalité de son injonction apparue en rêve soulignent l’origine du sanctuaire.La création du lieu est donc liée à l’accomplissement de manifestations oniriques et divines. Elles ont fait du Mont du Xe siècle jusqu’à la Révolution française une destination majeure de pèlerinages en Europe. L’espace religieux et le village y furent voués. Le Mont en porte les marques architecturales, reconnues par son inscription par l’Unesco en 1979. Il en garde aussi des traces vivantes : une communauté bénédictine (la précédente ayant été chassée en 1790) a été rétablie dans l’abbaye en 1966. Une communauté des Fraternités monastiques de Jérusalem lui a succédé en 2001. Le sanctuaire du Mont Saint-Michel assure encore l’accueil de pèlerins. Quant au village, loin d’être une excroissance marchande étrangère à l’identité du lieu, il assure depuis le Moyen-Âge une fonction hôtelière, de restauration et de commerce d’objets variés associés aux visites du Mont. Son développement est anciennement lié aux pèlerins cherchant à se loger, se nourrir et garder un souvenir de leur venue.

Il serait toutefois réducteur de ne considérer le Mont Saint-Michel que sous le prisme de sa tradition religieuse chrétienne. Car, selon toute vraisemblance, ce lieu cultuel n’a pas toujours été chrétien. Des travaux en mythologie et des données archéologiques (Déceneux, 1997) indiquent en effet que le mont Tombe a été le siège de pratiques cultuelles dès les âges les plus reculés. Bien que la revelatio n’ait livré que le récit de la fondation du sanctuaire par l’évêque d’Avranches, ce site aurait été un haut-lieu mégalithique avant d’être réapproprié par les Celtes puis les Gallo-Romains. La figure de l’archange sur ce rocher a ainsi pu traduire des croyances païennes recréées par la religion chrétienne. De sorte, la relation des hommes à ce lieu a perduré, en ayant évolué, sur une séquence de temps plurimillénaire.

 

Le Mont Saint-Michel, un rocher toujours sacré

Comme si cela renvoyait à l’époque mégalithique, il semble que le « rocher » du Mont Saint-Michel fasse toujours l’objet d’une certaine vénération. Visitant l’abbaye, les visiteurs en effleurent les pierres. Ils les touchent pour s’en imprégner. Le granit apparaît en quelques endroits poli par les millions de mains qui l’ont caressé (cf. section IV.4 infra, témoignage 1). Ce caractère se révèle avec d’autant plus de force lorsque survient un nouvel aménagement. Ce fut le cas à l’occasion du percement d’une tranchée pour contourner la porte de l’Avancée régulièrement inondée lors des fortes marées. Creusé dans le granit, cet accès alternatif au Mont a été accueilli avec hostilité par des Montois (habitants du Mont Saint-Michel, ou propriétaires sur le Mont) qui considérèrent l’opération comme une atteinte à l’intégrité du rocher. Elle fut vécue comme un « sacrilège », soulevant des manifestations [entretien avec le maire du Mont Saint-Michel, 21 septembre 2017].

Ce rapport au Mont traduit une identification et un sentiment d’appartenance, au point où l’on « fait corps » avec lui. Il manifeste une « envie d’en être » qui, lorsqu’on observe le phénomène, concerne beaucoup de visiteurs. Leurs corps éprouvent ce lieu. Ils se mettent avec lui en relation physique. Il est dévoré des regards qui se posent partout, scrutent les anfractuosités des ruelles comme celles du roc. La moindre porte ou fenêtre provoque l’intrusion d’une tête, si bien qu’il arrive que des Montois trouvent dans leur propriété des hôtes imprévus. Tout se passe comme s’il existait une incorporation du Mont Saint-Michel chez ceux qui se mettent à son contact (cf. section IV.4 infra, témoignage 3). Être auprès d’eux et avec eux, les écouter et les entendre, reviendrait à se sentir proche de cet endroit extraordinaire dont ces Montois seraient des prolongements, des extensions symboliques. En somme, tout se passe comme s’il existait une incorporation du Mont chez ceux qui évoluent à son contact. Un guide conférencier de l’abbaye ne dit pas autre chose quand il reconnaît s’être longtemps habillé de « la couleur du granit » (cf. section IV.4 infra, témoignage 4). Ainsi, l’attraction pour le Mont procèderait d’une identification qui finirait par prendre totalement les Hommes. Ce Mont, si attractif, opèrerait à la manière d’un matériau hors du commun qui, tout à la fois, absorbe et se diffuse.

 

Faire corps avec le rocher, puis dépasser et sublimer sa corporéité minérale

« Faire corps » avec cette éminence aussi prenante conduit à éprouver un enfermement. C’est ce qu’expriment les témoignages recueillis auprès des commerçants, des hôteliers et des religieux du Mont. L’hôtelière de l’auberge Saint-Pierre rapporte des cas de visiteurs qui, bien qu’ayant réservé une chambre dans son établissement, ont décidé d’en partir rapidement. Ses clients se sentaient « étouffer » à l’intérieur de l’enceinte montoise (cf. section IV.4 infra, témoignage 5).

Ce sentiment est confirmé par une ancienne libraire du sanctuaire, qui évoque une « énergie des pierres », un univers clos, replié sur soi (cf. section IV.4 infra, témoignage 6). Cette pesanteur que font éprouver les « blocs énormes » et l’épaisseur des murs est perçue de la même manière par le prieur des Fraternités monastiques de Jérusalem, qui confirme les angoisses d’emprisonnement qu’expriment parfois les retraitants lors de leur séjour dans l’abbaye (cf. section IV.4 infra, témoignage 7). L’enfermement apparaît comme une composante importante du lieu. On peut d’ailleurs se demander jusqu’où la transformation du mont en prison à la Révolution, après que les bénédictins en ont été chassés, n’aurait pas exploité une symbolique carcérale préexistante. Les propos du prieur sont signifiants quand il souligne à quel point la présence actuelle des Fraternités donnerait une âme et un sens au Mont qui, sinon, ne serait plus que « majestueux et imposant. » En d’autres termes, il ne resterait de ce lieu que son caractère minéral et oppressant si moines et moniales n’y perçaient plus de porte vers l’Esprit. On peut ici identifier la figure symbolique du « cloître » ; celle que rappelle l’ancienne libraire quand elle évoque une force qui pousse « vers le haut ».

Deux mouvements paraissent ainsi s’imprimer sur le Mont Saint-Michel. Un premier relève de l’incorporation dans cette architecture rocheuse ; laquelle forme une « cavité ». Cet enfermement est temporaire, si on excepte ce que serait l’enterrement comme inhumation symbolique renvoyant à un imaginaire funéraire (le mont « Tombe » était indissociable d’une symbolique mortuaire). Cependant, un second mouvement pousse en direction de l’extérieur de cette cavité, vers le ciel et la lumière, telle une renaissance ou un éveil. Le lien au rocher pourrait ainsi se référer à une vie intérieure, ou au sommeil comparé à une petite mort. La fascination pour le Mont-Saint-Michel s’exprime d’ailleurs le plus souvent à travers un souhait « d’y dormir ». Le lien du mont avec le sommeil est présent dans le récit légendaire de la fondation du sanctuaire, via les rêves d’Aubert. L’association des deux mouvements, l’intériorisation-incorporation puis l’extériorisation, l’enfermement dans la cavité suivie d’une libération de celle-ci, pourrait être assimilée à une traversée liée à une recréation. Elle s’exprime dans la visite du mont (Fig. 18). Cette dernière débute en effet par une pénétration (via les remparts) de l’enceinte du mont (par la cour de l’Avancée). Elle se poursuit par une montée de la Grande Rue, sillon dans le mont, et par une déambulation dans les voies labyrinthiques du village. La moitié des visiteurs gravissent les Grands Degrés extérieurs puis intérieurs, entrent dans l’abbaye et accèdent à son église où, après un tour du cloître, ils initient une plongée vers le cœur du monument. Accomplissant dans l’abbaye une révolution autour du sommet du rocher, accompagnés d’un guide-conférencier muni d’un trousseau de gardien, ils descendent jusque dans Notre-Dame-sous-Terre. Là, ils peuvent toucher de leur main les pierres de l’enceinte présumée du premier sanctuaire (cf. section IV.4 infra, témoignage 8). Leur visite continue par celle des cachots de l’ancienne prison dans lesquels les plus jeunes sont invités à entrer et ressortir. Traversant le labyrinthe abbatial, les visiteurs finissent par parcourir ses jardins avant de quitter leur enceinte et retrouver les Grands Degrés les reconduisant au village. À cet instant, ils sourdent des anfractuosités de la matrice granitique.

 

Cheminer vers le Mont Saint-Michel, le sens d’un départ

Les cheminements vers le Mont Saint-Michel se distinguent selon leur échelle géographique. Les plus courts impliquent une relation minimale au milieu, par une simple marche contrainte sur le pont-passerelle entre la station de la navette, dite « passeur », et l’entrée du Mont. Les parcours intermédiaires mettent en jeu une marche d’une rive à l’autre de la baie. Les plus longs amènent les marcheurs à parcourir plusieurs dizaines et centaines de kilomètres avant d’atteindre le mont. Ils sont souvent accomplis dans une démarche religieuse assumée. En fin de compte, ces échelles se différencient eu regard de ce qu’elles procurent comme intensité de la « traversée ». Appréhender le cheminement sous l’angle du patrimoine culturel immatériel implique ainsi de chercher à saisir les significations de ces « traversées », le mont étant lui-même le « lieu d’une traversée ».

Pourquoi s’engage-t-on dans une itinérance vers le Mont Saint-Michel ? Aucune réponse à ce sujet ne peut être simple, ni exhaustive. De plus, elle est nécessairement évolutive tant les motivations s’expriment relativement à une époque donnée. Dans le futur, les éléments de cette fiche devront donc nécessairement être complétés par de nouvelles enquêtes, mais également par d’autres investigations menées dans des conditions différentes de celles qui ont été les nôtres entre 2017 et 2019. Les connaissances que nous apportons procèdent en effet de nos sessions de terrain sur le mont, au contact des commerçants, guides, religieux, mais aussi de nos multiples séjours au sein du Sanctuaire auprès de marcheurs qui s’identifient « pèlerins ». Des travaux complémentaires seraient judicieux à engager sur les chemins, aussi bien dans la baie lors des traversées, que sur les routes des« miquelots » dans la mesure où ceux-ci se revendiquent volontiers plus « culturels » que « cultuels ».

 

S’inscrire dans une filiation

L’inscription dans une filiation apparaît comme l’une des significations saillantes. Elle se manifeste de bien des manières. La première, qui passe aujourd’hui rarement par une longue itinérance, est celle consistant à venir avec ses enfants. C’est ce dont a témoigné l’un des guides de l’abbaye qui remarque que « tous les gamins viennent enfants, avant leurs parents, puis ils reviennent parents avec leurs enfants » [témoignage de François Saint-James, 24 novembre 2017]. Nombre de traversées de la baie sont d’ailleurs effectuées dans le cadre scolaire. Il est fréquent de rencontrer sur le mont des groupes de jeunes, encadrés par leurs professeurs et des guides, qui gravissent la Grande Rue après avoir arpenté les grèves. La filiation ne renvoie pas en effet ici seulement à une relation entre parents directs. Elle renvoie aussi à l’appartenance à des groupes sociaux plus larges : la localité, la nation, une religion, voire l’humanité. S’y inscrire revient à grandir en devenant un des maillons de l’ensemble. S’accomplissant par une « traversée » symbolique que certains n’hésitent pas à comparer au « rite de passage » des jeunes Spartiates de l’antiquité grecque (cf. section IV.4 infra, témoignage 9), cette manifestation n’est pas sans rappeler les pèlerinages médiévaux d’adolescents vers le mont (dits, « pèlerinages des pastoureaux ») très répandus du XVe au XVIIe siècle.

La prégnance de la filiation dans la venue sur le Mont Saint-Michel concerne autant les enfants que les adultes. Il est intéressant de souligner que les enfants montois, jusque dans les années 1970, à l’adolescence, partaient s’isoler en groupe et sans confort à Tombelaine pendant plusieurs jours. Il leur fallait expérimenter ce passage où ils devenaient « grands », non sur le mont, mais en se rendant sur l’îlot sauvage qui lui fait face. S’agissant des marcheurs adultes d’aujourd’hui, ceux-ci cherchent à poser leurs pas sur des chemins foulés depuis des siècles par beaucoup d’autres hommes et de femmes animés du même objectif de rejoindre le Mont (cf. section IV.4 infra, témoignage 10). On retrouve dans cette aspiration le sens de l’action de l’Association des Chemins du Mont-Saint-Michel qui réhabilite et valorise un certain nombre de sentiers sur la base de travaux historiques. Tout se passe comme si parcourir ces chemins et leurs lieux reliaient les hommes entre eux ; comme si les marcheurs étaient traversés, via leurs pieds, par le flux de la grande histoire humaine passant par leur corps. Dans le même temps, chacun pose et marque ce chemin d’une empreinte Ces éléments, présents dans tous les témoignages recueillis au cours de l’enquête d’inventaire, indiquent une relation entre ces marches vers le Mont Saint-Michel et la sauvegarde d’un sentiment de continuité d’existence.

 

Sauvegarder un sentiment de continuité d’existence

Le sentiment de continuité renvoie à une sécurité ontologique intérieure qui procède de l’idée d’être toujours « le même », malgré des changements internes et externes (Pireyre, 2011, p. 55). Cette notion engage plus loin, si on y intègre les précieux apports du psychanalyste Donald Winnicott (1969) (Fedon, 2017, p. 8-9), pour qui le « sentiment de continuité d’existence » se construit à partir d’interactions ritualisées avec l’environnement (lesquelles relèvent en premier lieu, concernant les enfants, de la relation d’attachement initial avec leur mère), permettant de sortir d’une situation de dépendance pour accéder à une autonomie plus grande. Le sentiment de continuité va de pair, pour l’être, avec la construction d’une limite entre son univers intérieur et son univers extérieur. De ce fait, il a également à voir avec la construction d’un sentiment d’identité qui correspond à l’appartenance à un ensemble social. Si on suit ces réflexions, les adaptant aux marches vers le Mont Saint-Michel en tant que patrimoine culturel immatériel, on peut considérer que ces manifestations permettent de raccommoder les déchirures du temps (la continuité temporelle) et de l’espace (la relation que les hommes entretiennent avec leur territoire et leur environnement) tenant compte des mouvements du monde.

Les itinérances et pérégrinations vers le Mont peuvent être considérées en tant que relations ritualisées à l’environnement. Quittant leur domicile, territoire connu et familier, les marcheurs progressent dans une géographie autant qu’ils en sont traversés. Ils éprouvent la topographie les lieux, les paysages fermés et ouverts, pleins et vides, les contrées habitées ou désertes (cf. section IV.4 infra, témoignage 11). Ce rapport avec le milieu s’inscrit dans une quête d’évolution personnelle où, à mesure des pas qui se succèdent, l’intimité psychique finit par entrer en résonance avec l’environnement. Ainsi, la géographie du chemin rejoint l’univers intérieur du marcheur. Elle sert au « miquelot » à se dépasser, mourir pour enfin renaître (cf. section IV.4 infra, témoignage 12). Ce cycle symbolique se poursuit quotidiennement jusqu’à son arrivée sur le mont, lieu qui, comme une apothéose, après une traversée du vide de la baie, met en scène un enfoncement oppressif, granitique, suivi d’un mouvement libérateur vers le haut. Il signe le retour du marcheur dans le monde des hommes après la « retraite » de son itinérance.

Toutes les langues peuvent être utilisées dans les pratiques d’itinérance vers le Mont Saint-Michel.

Patrimoine bâti

 

Le patrimoine bâti associé à cette pratique est principalement constitué par le Mont Saint-Michel, inscrit sur la liste du Patrimoine mondial (Unesco, 1979), au sein du périmètre protégé de la baie du Mont Saint-Michel (cf. le rapport de l’Icomos).

● Base nationale Mérimée (patrimoine architectural), entrée « Mont-Saint-Michel » (451 résultats) (consulté le 1er mars 2020) : https://www.pop.culture.gouv.fr/search/mosaic?base=%5B%22Patrimoine%20architectural%20%28M%C3%A9rim%C3%A9e%29%22%5D&image=%5B%22oui%22%5D&mainSearch=%22mont%20saint-michel%22

 

Objets, outils, matériaux supports

 

Outre les attributs ordinaires des marcheurs (chaussures et vêtements adaptés, bâtons de marche), il n’existe pas d’outils ou d’objets qui soient spécifiques à cette pratique. Les pèlerins utilisent une créanciale, qui atteste leur cheminement et ses différentes étapes. Les miquelots laïcs peuvent se munir d’un « carnet du Miquelot » faisant le même office. D’une manière générale, les marcheurs voyagent le moins lourdement possible pour limiter les charges qui entraveraient leur progression. C’est également pour eux une façon de cheminer dans la plus grande simplicité au contact du milieu, tout en comptant parfois sur la solidarité des habitants des contrées traversées.

● Base nationale Palissy (patrimoine mobilier), entrée « Mont Saint-Michel » (84 résultats) (consulté le 1er mars 2020) :

https://www.pop.culture.gouv.fr/search/mosaic?base=%5B%22Patrimoine%20mobilier%20%28Palissy%29%22%5D&image=%5B%22oui%22%5D&mainSearch=%22Mont%20Saint-Michel%22

Les modalités de transmission de cette pratique seraient un champ d’étude à approfondir. La perpétuation des marches vers le Mont Saint-Michel a longtemps relevé de la tradition religieuse chrétienne, à travers l’image de l’archange saint Michel. Les itinérances vers le mont ont alors été perturbées par la Révolution au point où les pèlerinages ont cessé entre la fin du XVIIIe siècle et les premières du XIXe siècle. Ils ont ensuite repris timidement sans jamais atteindre leur niveau antérieur (cf. section III.1 infra). Au XXe siècle, les pratiques et les représentations du Mont Saint-Michel se sont renouvelées sous l’effet de la patrimonialisation du lieu et du tourisme.

Les organisations et personnes impliquées dans la transmission de ces pratiques et représentations sont extrêmement diverses : elles concernent tous ceux qui œuvrent à une valorisation culturelle du lieu, des chemins qui y mènent à l’accueil des visiteurs. Il peut s’agir d’institutions patrimoniales régionales (de Normandie ou de Bretagne), nationales (ministère de la Culture, Centre des Monuments nationaux), internationales (Unesco), de collectivités locales et territoriales (communes et communautés d’agglomération, Départements, Régions), d’institutions religieuses (sanctuaire du Mont Saint-Michel, communauté monastique), d’organisations professionnelles (guides), d’associations (Les Chemins du Mont Saint-Michel, Amis du Mont Saint-Michel, Robert de Torigni).

Origines légendaires chrétiennes : la figure de l’archange saint Michel

 

Les itinérances vers le Mont Saint-Michel trouvent leurs origines légendaires au VIIIe siècle. Après que l’évêque d’Avranches, Aubert, reçut en songe une injonction de l’archange Michel de bâtir sur le mont Tombe un sanctuaire pour l’honorer. Le site, une éminence granitique jusqu’ici occupée par quelques ermites dans une contrée païenne, devint durant le haut Moyen Âge la destination de pèlerinages d’importance croissante à l’échelle de la chrétienté occidentale. Des chiffres viennent témoigner de l’ampleur de ce phénomène. Durant l’année 1368-1369, l’hôpital Saint-Jacques à Paris accueillit par exemple à lui seul près de 16 690 pèlerins qui, faisant route vers le Mont-Saint-Michel, traversaient la cité (Decaëns, 2010, p. 65). Une part significative de ces voyageurs empruntait un chemin venant de l’est et des pays rhénans, où le culte de saint Michel était particulièrement répandu.

D’après les données historiques et archéologiques, le culte de saint Michel trouve ses origines en Égypte et Asie mineure autour du IVe siècle. Le plus ancien sanctuaire attesté est situé à Chonai, en Phrygie, à l’ouest de l’actuelle Anatolie (Decaëns, 2010, p. 21). Ce culte s’est ensuite diffusé dans l’Empire byzantin jusqu’en Italie du Sud, avec la fondation du sanctuaire du Monte Gargano (vers 492) aux Ve et VIe siècles, avant d’atteindre Rome et de progresser jusqu’en Gaule entre le VIe et le VIIIe siècle. Ainsi, la fondation du Mont-Saint-Michel en 709 s’est inscrite dans un mouvement de progression vers l’ouest des dévotions à saint Michel. La progression de ce culte s’est traduite par la formation de récits légendaires contant des faits miraculeux imputés à l’archange. À Chonai, saint Michel aurait arrêté les eaux d’un torrent qui menaçait la chapelle d’un ermite. Pour cela, il aurait fendu une falaise afin que les eaux tumultueuses s’engouffrent dans l’abîme (Decaëns, 2010, p. 21). On reconnaît là un lien entre l’archange et la maîtrise des forces naturelles, en particulier de l’eau, indispensable à la vie : en Égypte, l’archange saint Michel était le protecteur du Nil et de sa navigation (Decaëns, 2010, p. 22), mais dont les impétuosités peuvent présenter un caractère dévastateur. Au Mont Saint-Michel, une légende assure que l’archange aurait sauvé une mère accouchant et son enfant qui, bien que piégés par la marée, n’auraient pas été emportés par les flots (Decaëns, 2010, p. 60). La croix des Grèves, depuis engloutie par les sables, aurait longtemps marqué l’emplacement du prodige.

Peut-être parce que l’archange saint Michel (en hébreux, « qui est comme Dieu ») exprime une maîtrise des éléments naturels et qu’il paraît assurer un passage entre la puissance surnaturelle et celle des hommes, il fut souvent représenté en combattant et parfois associé à des pouvoirs souverains ou impériaux. Ainsi, à Constantinople, l’archange était considéré comme le protecteur de l’armée impériale ; d’anciennes représentations lui donnaient l’apparence d’un haut dignitaire byzantin (Bouet, 2010, p. 23 et 39). Sans doute se manifestait ici une alliance entre les forces célestes et la puissance terrestre. Plus tard, cette relation avec saint Michel fut cultivée par le pouvoir carolingien et les Plantagenêts. Pendant la guerre de Cent Ans, lorsqu’il s’avéra que les Anglais avaient échoué à prendre le Mont Saint-Michel, une ferveur particulière se renouvela autour de l’archange au sein du royaume de France (Bouet, 2010, p. 49). Jeanne d’Arc elle-même aurait arboré l’archange Michel sur son étendard.

Ces remarques conduisent sur la voie d’un saint étroitement lié à la protection contre les envahissements transgressifs et destructeurs. Saint Michel serait le gardien des limites sacralisées, celles qui différencient et resituent l’homme dans son environnement naturel, qui marquent l’étendue d’un pouvoir souverain ou impérial, mais aussi qui, au-delà, sauvegardent la vie des hommes face à la menace de mort. C’est ce que suggère le miracle à l’origine de la création, à Rome, du château Saint-Ange sur l’ex-mausolée de l’empereur Hadrien. Tandis que le pape Grégoire le Grand organisait vers l’an 590 une procession pour obtenir l’arrêt d’une épidémie de peste, il aurait aperçu au-dessus du monument l’archange Michel essuyant son épée avant de la remettre à son fourreau. Il perçut le signe que la peste était vaincue et que la ville de Rome était sauvée (Bouet, 2010, p. 33).

 

Du lieu païen aux pèlerinages chrétiens, jusqu’aux itinérances contemporaines

 

Bien qu’aucune date ni dénombrement ne puisse être fourni, les recherches historiques ont montré que la fréquentation du Mont Saint-Michel en tant que lieu de pèlerinage aurait débuté tôt après la création du sanctuaire (Decaëns, 2010, p.56). Les pèlerins y affluaient pour manifester leur dévotion à l’archange. Parmi eux, certains effectuaient un pèlerinage en guise de pénitence après avoir été condamnés par un tribunal. Il s’y exprimait une représentation de l’archange Michel en tant qu’ange du jugement (Bouet, 2010, p. 33). On peut aussi y déceler un lien avec l’image traditionnelle de saint Michel terrassant un dragon, un reptile (Bouet, 2010, p. 40), celui qui vainc « la bête en chaque homme ».

Un essor des pèlerinages fut observé durant les Xe et XIe siècles. Des travaux d’historiens évoquent pour cette période l’importance du rayonnement du sanctuaire à l’échelle d’une partie de l’Europe (France, Flandre, Italie, Alémanie et Bavière) en plus des régions proches du Mont (Decaëns, 2010, p. 58). La survenue de faits miraculeux, avant ou pendant le pèlerinage, entretenait la sacralité du site. L’archange se manifestait auprès de ceux qui l’avaient offensé, qui lui avaient manqué de respect ou qui avaient violé un interdit dans le sanctuaire. Ainsi en allait-il de la contemplation des reliques, de la soustraction d’une pierre du mont sans l’autorisation des moines ou du fait d’avoir dormi la nuit dans l’enceinte sacrée. Ces sacrilèges pouvaient être sanctionnés par la cécité, la paralysie, ou la mort. Le flux des pèlerins vers le Mont se serait accru au cours des XIIe et XIIIe siècles. Parmi eux, se serait manifestée une fréquentation de plus en plus remarquée de nobles et de princes européens (Decaëns, 2010, p. 62-63), accueillis dans la salle des hôtes de l’ensemble abbatial, tandis que le commun des pèlerins était dirigé vers une pièce moins richement dotée. Ainsi Henri II Plantagenêt vint-il en pèlerinage au Mont, de même que (pour ne citer que ces seuls souverains) le roi Louis IX, futur saint Louis (Pâques 1256), puis son fils Philippe II le Hardi, qui remercia saint Michel de l’avoir épargné de la peste. Aux considérations religieuses se mêlèrent alors souvent des préoccupations diplomatiques et stratégiques.

Les sources historiques témoignent que les pèlerinages auraient poursuivi leur croissance aux XIVe et XVe siècles. Cette période présente surtout la particularité d’avoir connu un afflux de jeunes pèlerins (Decaëns, 2010, p. 65), qui partaient généralement vers le mont en petits groupes, parfois depuis des contrées fort lointaines (Hans-Collas, 2002).

Tout au long de ces siècles, les pèlerinages à saint Michel ont fini par dessiner un vaste réseau de chemins convergeant vers le Mont (Juhel, 2010). Cependant, dès 1790, la Révolution française a marqué une coupure radicale. L’abbaye devint un « bien national » et fut transformée en prison, ce qu’elle resta jusqu’en 1863 (Juhel, 2010, p. 84). Quant aux pèlerinages, ils cessèrent plusieurs années avant de renaître timidement après la signature du Concordat en 1801, puis, plus sûrement, après 1867, lorsque l’archiconfrérie Saint-Michel entreprit des actions pour les encourager. Ne pouvant encore accéder à l’abbaye, les « miquelots » furent accueillis dans l’église paroissiale Saint-Pierre, qui demeure aujourd’hui le siège des pèlerinages.

De fait, les mutations sociales et politiques de la fin du XVIIIe et du XIXe siècle n’ont pas mis un terme à l’existence du sanctuaire michaélique. La renaissance des pèlerinages dans un contexte global radicalement nouveau indique que la sacralité du lieu s’est maintenue par-delà la séparation, souvent conflictuelle, entre le pouvoir terrestre et le pouvoir spirituel. Le Mont Saint-Michel a concouru à articuler ces deux dimensions. Le XXe siècle a pu connaître à ce sujet quelques apaisements, dont témoignent des événements. En 1919, peu après la fin du premier conflit mondial, le ministre de l’Intérieur autorisa une messe d’action de grâces dans l’église abbatiale. En 1922, il fut décidé que cette même église pourrait être désormais utilisée pour accueillir les pèlerinages. En 1946, le curé de Genêts (Manche), renouant avec les marches d’autrefois, organisa une traversée des grèves. En 1966, en commémoration du millénaire monastique, des moines bénédictins purent à nouveau vivre sur le mont. Ceci précéda la reprise permanente de la vie monastique à partir de 1969 (Decaëns, 2010, p. 94).

Le rapport au Mont a été marqué au cours du XXe siècle et jusqu’aujourd’hui par une diversification de son système de pratiques et de représentations, conjuguée à un dépassement du cadre religieux chrétien historique, bien que ce dernier demeure encore vivant. Malgré une évolution des pratiques vers des itinérances touristiques patrimoniales et culturelles, le sens du lieu s’est perpétué en s’adaptant au monde contemporain.

Vitalité

La vitalité des pratiques d’itinérance et de pérégrination vers le Mont Saint-Michel varie en fonction de l’attraction exercée par ce lieu.

 

Menaces et risques

Une menace pour ces pratiques réside dans la banalisation touristique. La lutte contre cette banalisation passe par l’étude du sens des pratiques du Mont Saint-Michel, le sens de l’itinérance, et leur valorisation auprès du public.

Modes de sauvegarde et de valorisation

 

● Sauvegarde et valorisation des chemins du Mont Saint-Michel par l’Association des Chemins du Mont Saint-Michel (recherches historiques, publications, colloques, organisation de marches).

● Recherche et valorisation du patrimoine culturel immatériel du Mont Saint-Michel réalisé par l’ethnopôle La Fabrique de patrimoines en Normandie.

 

Actions de valorisation à signaler

 

● « Presqu’insulaires », restitution d’une recherche menée par l’ethnopôle La Fabrique de patrimoine en Normandie auprès des Montois en 2018.

● « Le Mont, patrimoine vivant », exposition proposée et coordonnée par l’ethnopôle La Fabrique de patrimoines en Normandie, avec la collaboration du Service régional de l’Inventaire général du patrimoine culturel de Normandie.

 

Modes de reconnaissance publique

 

Non renseigné

 

Mesures de sauvegarde envisagées

 

L’opération de recherche sur la valorisation du patrimoine culturel immatériel du Mont Saint-Michel se poursuivra après la remise de la fiche d’inventaire au ministère de la Culture.

Récits liés à la pratique et à la tradition

 

● Publications sur l’histoire des pèlerinages, par l’Association des Chemins du Mont Saint-Michel

● Témoignages d’itinérants et de pèlerins recueillis par Yann Leborgne, série d’entretiens audio et vidéo réalisés par l’ethnopôle La Fabrique de patrimoines (2017-2019), « Imaginaire et symbolique contemporaine du Mont Saint-Michel » :

1) Faire corps avec le granit : « Certains visiteurs éprouvent le besoin de se coller au rocher, d’y coller leur peau. Ils ont cette envie charnelle de faire corps avec les lieux. Il y a une partie que l’on voit dans le promenoir des moines ; le rocher affleure et c’est complètement lisse. C’est presque patiné par les mains des visiteurs qui passent là et qui veulent le toucher. » [témoignage d’Anne-Flore Marziou, adjointe de l’administrateur de l’abbaye du Mont-Saint-Michel et du château de Carrouges, Centre des monuments nationaux, 25 novembre 2017].

 

2) Ne pas profaner le rocher sacré : « Lorsque les grands travaux ont été réalisés, pour des raisons de sécurité [lorsque la marée empêche de sortir du Mont], il a fallu faire un passage dans le rocher. (…) C’était obligatoire, mais tout juste si on ne m’aurait pas décapité parce que je tapais dans le rocher du Mont-Saint-Michel ! (…) Il y a eu de grandes affiches "Le Mont-Saint-Michel, ne touchez pas au rocher sacré !" » [témoignage de Yan Galton, maire du Mont-Saint-Michel, 21 septembre 2017].

 

3) Appartenir au Mont : « Le fait d’avoir été institutrice sur le Mont Saint-Michel, c’est incroyable, "l’aura" que cela peut me donner. Une fois, mon mari et moi étions à Dubrovnik, nous visitions les remparts. Un groupe de Japonais arrivant là, nous avons parlé un peu. Ils revenaient justement du Mont ! Bien sûr, je n’ai pu m’empêcher de leur dire que j’y avais vécu. Alors, aussitôt, ce furent des prises de photos… ! C’est tout juste s’ils ne m’auraient pas invité à manger avec eux ! » [témoignage de Nicole Tutrel, ancienne institutrice de la petite école du Mont-Saint-Michel, 20 novembre 2017].

 

4) S’incorporer à l’éminence rocheuse : « C’est comme une sorte d’identification. Quand je dis que "j’ai la couleur du granit", on le vit, réellement. » [témoignage de François Saint-James, Centre des monuments nationaux, 24 novembre 2017].

 

5) Se sentir étouffer à l’intérieur : « Il y a un très fort ressenti vis-à-vis du Mont-Saint-Michel. (…) Quand ils sont sous le charme, les visiteurs reviennent dix fois dans leur vie. Cependant, pour d’autres, il n’y a rien à faire : ils veulent s’en aller. Ils ne sentent enfermés, ils ne vont pas bien. Ils réservent une chambre dans notre établissement, ils arrivent et nous disent : "Nous ne pouvons pas rester là, ce n’est pas possible". Pas plus tard qu’hier, des gens qui sont restés une heure et ils nous ont dit : "Ça ne nous va pas, on repart. Nous étouffons dans les petites rues". » [témoignage de Christine Gaulois, hôtelière-restauratrice sur le Mont-Saint-Michel, 14 mars 2017].

 

6) Le Mont, un cloître : « Je n’ai pas beaucoup d’expérience ici, mais elle est suffisante pour ressentir quelque chose comme un univers clos, refermé sur soi. Je n’ai pas envie d’être ésotérique, car ce serait mal venu, mais il y a comme une énergie des pierres, du lieu…, d’une force vers le haut, de cloître, en fait. » [témoignage, anonyme, d’une ancienne libraire sur le Mont Saint-Michel, 14 mai 2017].

 

7) Une porte ouverte vers le ciel : « Ce sont des blocs de granit énormes. Les murs sont épais. À l’époque où le Mont Saint-Michel était une prison, au XIXe siècle, cela devait être terrible. D’ailleurs, les commerçants et les gens que l’on croise nous le disent parfois : "Si vous n’étiez pas là, il manquerait ici quelque chose". Il manquerait la dimension pour laquelle le Mont existe, ce pourquoi il a été créé et une explication de la construction de l’abbaye : la recherche de Dieu et d’une vie spirituelle qui donne une âme. Le Mont Saint-Michel n’est pas simplement un lieu majestueux et imposant. Sa flèche le signifie : il conduit quelque part. Si on s’en tient au Mont dans son caractère physique, on se sent enfermé. Il y a une forme d’oppression. Cependant, notre vie de prière nous donne une ouverture. Elle nous permet de relativiser et de vivre ce lieu d’une autre manière. Ce n’est pas une prison, c’est une porte ouverte sur le ciel. » [témoignage du frère Fabien-Marie, prieur de la communauté des Fraternités monastiques de Jérusalem, 14 mai 2017].

 

8) Propos d’un guide. Le lieu d’une renaissance : « Depuis la nuit des temps, ce lieu évoque l’idée du passage. Alors, qu’est-ce qu’il reste de cela aujourd’hui, pour le touriste qui visite ? Je pense qu’il en reste quelque chose. (…) Il y a quelque chose qui se joue sur le Mont. (…) Tous les gamins viennent enfants, avant leurs parents, puis reviennent parents avec leurs enfants, ou dans le cadre de voyages scolaires. Je pourrais aussi te sortir un article sur les pèlerinages d’enfants. Tu as sans doute lu la prose de Vincent [Juhel] à propos des anciens pèlerinages d’enfants où ils venaient sous la conduite d’un aîné. D’ailleurs, auparavant, les scouts venaient également tous au Mont. Le rite initiatique, c’est le sens du lieu. (…) Dans Notre-Dame-Sous-Terre, je joue de cette idée du passage. Je ferme les portes, les gens sont dans le noir, puis j’allume la lumière. (…) C’est comme une oasis. Quand tu es dans les Grands Degrés, ça hurle de partout. Or, tout d’un coup, ils entrent, ils plongent dans le noir et tu fermes la porte. Les bruits de l’extérieur restent à l’extérieur. Les gens deviennent réceptifs et prêts à écouter. » [témoignage de François Saint-James, Centre des monuments nationaux, 24 novembre 2017].

 

9) Un rite de passage : « Je repense aux fois où je venais à l’abbaye avec le groupe de catéchèse avec lequel je travaillais à Caen. Nous venions passer quelques jours ici, au Mont. C’était en plein mois de janvier, sans chauffage. Nous logions dans le logis abbatial, dans la bibliothèque. Pour tout lit, nous n’avions qu’une planche avec un petit matelas dessus. Nous étions au milieu des livres, des pierres et des murs. D’un point de vue historique, ça me rappelle le rite de passage dans la Grèce antique. Chez les Spartiates, dans le passage de l’enfance à l’âge adulte, le jeune devait partir tout seul. Il devait vivre, chasser, manger. Et lorsqu’il revenait il était un adulte. Le Mont Saint-Michel, toute proportion gardée, c’était aussi un rite de passage. C’était se poser un défi : vais-je être capable de le faire ? capable de dormir dans mon duvet, sans chauffage, en plein hiver, malgré le froid ? (…) C’est aussi comme cela qu’on apprécie les lieux et qu’on vit au plus profond les choses. (…) C’est la même chose aujourd’hui, quand les gens traversent la baie. C’est un effort (…). Ils ont une motivation qui les aide à surmonter la fatigue, les douleurs, l’inconfort des traversées des cours d’eau et des zones plus ou moins vaseuses. À l’arrivée, c’est une grande satisfaction de l’avoir réussi, de s’être surpassé et d’avoir franchi une étape dans sa vie. » [témoignage de E. B., anonyme, 4 août 2017].

 

10) Le chemin d’une filiation ininterrompue : « Ce lieu est chargé de toute la mémoire de ceux qui sont venus y prier avant moi. C’est aussi cela que j’aime dans les lieux de pèlerinage, c’est que cela rattache ce que nous vivons à ce qui a été vécu depuis des siècles, par des gens de diverses époques et de diverses cultures. » [témoignage de M. D., anonyme, 14 mai 2017].

 

11) Entrer en résonnance avec le milieu : « La marche est une expérience d’absoluité. À chaque seconde, on sent tout son corps et on sent ce sur quoi on marche. Dans l’Orne, dans la Manche, puis dans la baie, on sent les odeurs forestières, on sent la pluie qui arrive, on sent l’air marin. On sent le vent… » [témoignage de N. L., anonyme, 27 février 2019].

 

12) Mourir pour renaître à soi-même : « Nous avons la tête dans le ciel et les pieds dans la terre. Nous avons donc cette verticalité de foi avec ce que cela implique de difficultés, de joies, de bonheur…, et aussi parfois de désespérance, parce que parfois on a mal. On ressent la souffrance, que ce soit par les pieds ou les tendons. Dans ces cas-là, on se connecte au corps. Il n’est plus question de prier. On ne pense plus à Pierre, Paul ou Jacques. Je n’arrive pas à prier quand je suis dans la douleur. Cela fait partie des ombres. On doit les terrasser. (…) Pour moi, le chemin de saint Michel, c’est mettre à distance nos ombres comme saint Michel terrasse le dragon. En avançant, j’essaie de les mettre à distance. En chemin, il y a des ombres…, parce qu’il y a de la chaleur, de la fatigue… et pas mal de choses qui interviennent. » [témoignage de M. P., anonyme, 25 juin 2017].

 

Inventaires réalisés liés à la pratique

 

● Recherche libre de Yann Leborgne, « Imaginaire et symbolique contemporaine du Mont Saint-Michel », Caen, La Fabrique de patrimoines en Normandie, 2017.

● Étude du Service régional de l’Inventaire de Normandie : « Baie du Mont Saint-Michel »

La Région Normandie mène, à compter de 2019, une étude d’inventaire du patrimoine sur le village du Mont-Saint-Michel, quarante ans après l’inscription du bien sur la liste du Patrimoine mondial (Unesco). Cette étude, décidée en concertation avec l’État et les collectivités locales, s’inscrit dans le développement touristique du Sud Manche au travers du contrat de destination « Le Mont Saint-Michel et sa baie » (consulté le 1er mars 2020) :

https://www.normandie.fr/baie-du-mont-saint-michel

 

Bibliographie sommaire

 

Bély (Lucien), Le Mont-Saint-Michel, monastère et citadelle, préf. Jean Favier, Éditions Ouest-France, 1994, 249 p.

Bouet (Pierre), Decaëns (Henri), Hervieu (Juliane), Juhel (Vincent), La Brosse (Gaële de), Le Jeune (Thérèse), Les Chemins du Mont-Saint-Michel. En marche vers l’Archange, préf. Emmanuel Le Roy Ladurie, Pèlerin / Desclée de Brouwer (coll. « Chemins de pèlerinage »), 2010, 239 p.

Coll., Chemins et pèlerins [actes des 2es Rencontres historiques d’Ardevon, 2002], Caen, Association Les Chemins du Mont-Saint-Michel / Conseil Régional de Basse-Normandie, 2002, 269 p.

Coll., Les pèlerinages au Mont-Saint-Michel dans la littérature et dans les textes [actes des 4es Rencontres historiques d’Ardevon, 2004], Caen, Association Les Chemins du Mont-Saint-Michel / Conseil Régional de Basse-Normandie, 2004, 126 p.

Coll., Récits et mémoire. Pèlerinage et voyage à Saint-Michel des origines à la Révolution [actes des Rencontres historiques d’Ardevon, 2010], Caen, Association Les Chemins du Mont-Saint-Michel / Conseil Régional de Basse-Normandie, 2010, 124 p.

Decaëns (Henri), « Les miquelots à travers l’histoire », dans Les Chemins du Mont-Saint-Michel. En marche vers l’Archange, Pèlerin/Desclée de Brouwer (coll. « Chemins de pèlerinage »), 2010, p. 55-95.

Déceneux (Marc), Mont-Saint-Michel, histoire d’un mythe , Éditions Ouest-France, 1997, 270 p.

Hans-Collas (Ilona), « Les pèlerinages d’enfants vers le Mont-Saint-Michel au XVe siècle, analyse des chroniques allemandes », dans WLes Pèlerinages au Mont-Saint-Michel dans la littérature et dans les textes [actes des 2es Rencontres historiques d’Ardevon], Caen, Association Les Chemins du Mont-Saint-Michel / Conseil Régional de Basse-Normandie, 2002, p. 151-188.

Juhel (Vincent), « Les chemins du Mont-Saint-Michel de l’an Mil à nos jours », dans Les Chemins du Mont Saint-Michel. En marche vers l’Archange, Pèlerin/Desclée de Brouwer (coll. « Chemins de pèlerinage »), 2010, p. 97-133.

Juhel (Vincent), Hervieu (Juliane),

Itinéraires de pèlerins, Les chemins des ducs de Normandie, de Caen et de Rouen au Mont-Saint-Michel, Association Les Chemins du Mont-Saint-Michel, 2004, 119 p.

 

Filmographie sommaire

Non renseigné

 

Sitographie sommaire

● Abbaye du Mont Saint-Michel, Centre des monuments nationaux

http://www.abbaye-mont-saint-michel.fr/ b

● Association des Chemins du Mont Saint-Michel

https://www.lescheminsdumontsaintmichel.com/spip/index.php

● Fraternités monastiques de Jérusalem

http://jerusalem.cef.fr/mont-saint-michel-abbatiale

● Sanctuaire du Mont Saint-Michel

https://www.pelerin-montsaintmichel.org/le-sanctuaire-mont-saint-michel

● Association Le Sentier

https://www.lesentier.org/

● Association des Amis du Mont Saint-Michel https://www.lesamisdumontsaintmichel.com/

Seuls sont mentionnés ici les contributeurs qui ont accepté la divulgation de leur identité.

 

AUVRAY Paul-Noël, commerçant sur le Mont Saint-Michel

BAILLY Xavier, administrateur de l’abbaye du Mont Saint-Michel (2014-2019), Centre des monuments nationaux

BOSSARD Gabriel, membre de la Filiation montoise

COBAC Jean-Marc, guide à l’abbaye du Mont Saint-Michel

COLAS DES FRANCS Étienne, retraitant dans l’abbaye du Mont Saint-Michel

CONAN Emmanuel, commerçant sur le Mont Saint-Michel

FAGUAIS Géraldine, commerçante sur le Mont Saint-Michel

FOURNIER André, recteur du sanctuaire du Mont Saint-Michel

GALTON Yan, maire du Mont-Saint-Michel

GAULOIS Christine, hôtelière restauratrice sur le Mont Saint-Michel

GAULOIS Patrick, hôtelier restaurateur sur le Mont Saint-Michel

HAMON Annick, membre de la Filiation montoise, habitante du Mont Saint-Michel

LE BREC Jean-Yves, artiste, habitant du Mont Saint-Michel LAMBERT Alain, restaurateur sur le Mont Saint-Michel

LOCHET Jean-Yves, membre de la Filiation montoise

LUTHEREAU Noé, pèlerin au Mont Saint-Michel

MALBEUF Luce, pèlerine au Mont Saint-Michel

MARCHAND Guy, pèlerin au Mont Saint-Michel

MARZIOU Anne-Flore, administratrice adjointe de l’abbaye du Mont Saint-Michel, Centre des monuments nationaux

NEFF Fabien (frère Fabien Marie), prieur de la communauté des Fraternités monastiques de Jérusalem, abbaye du Mont Saint-Michel

PEYRAUBE Christophe, pèlerin au Mont Saint-Michel

PEYRAUBE Maÿne, pèlerine au Mont Saint-Michel

POIGNANT Dominique, membre de la Filiation montoise

POIGNANT Noëlle, commerçante sur le Mont Saint-Michel

RIDEL Jacques, membre de la Filiation montoise

RIDEL Julien, membre de la Filiation montoise

RIO Yann, guide à l’abbaye du Mont Saint-Michel

SAINT-JAMES François, chargé d’action culturelle à l’abbaye du Mont Saint-Michel, Centre des monuments nationaux

SAUVE Catherine, membre de la Filiation montoise

SAUVE Yves, membre de la Filiation montoise

TOROSSIAN Elodie, libraire au sanctuaire du Mont Saint-Michel

TUTREL Nicole, ancienne institutrice de la Petite École du Mont-Saint-Michel

VILAIN Emmanuel, Office de tourisme du Mont-Saint-Michel

Par ailleurs, les travaux réalisés par l’Association des chemins du Mont-Saint-Michel, ainsi que leurs ressources cartographiques, ont été extrêmement utiles dans la constitution de cette fiche d’inventaire.

Les soutiens et consentements reçus durant la démarche de préparation de la fiche d’inventaire du patrimoine culturel immatériel ont été remis, avec le rapport de recherche, au département du Pilotage de la recherche (Ministère de la Culture, direction générale des Patrimoines).

Rédacteur(s) de la fiche

 

LEBORGNE Yann, chargé de recherche et de valorisation du patrimoine culturel immatériel, Ethnopôle de Normandie, EPCC « La Fabrique de patrimoines en Normandie », yann.leborgne@lafabriquedepatrimoines.fr

 

Enquêteur(s) ou chercheur(s) associés ou membre(s) de l’éventuel comité scientifique instauré

 

BOUET Pierre, historien médiéviste

COCAIGN Jean-Yves, anthropologue, Écomusée de la baie du Mont Saint-Michel

DECAËNS Henry, historien du Mont Saint-Michel

JUHEL Vincent, historien des chemins du Mont Saint-Michel

MATTHIAS Jean-Pierre, conteur

SCHMIT Pierre, directeur de la Fabrique de patrimoines en Normandie

 

Lieux(x) et date/période de l’enquête

 

Le Mont Saint-Michel (Manche), 2017-2019

 

Données d’enregistrement

 

Date de remise de la fiche : 29 septembre 2019

Année d’inclusion à l’inventaire : 2020

N° de la fiche : 2020_67717_INV_PCI_FRANCE_00460

Identifiant ARKH : ark:/67717/nvhdhrrvswvk25f

Comment contribuer à l'inventaire : la méthode : http://pcilab-new.huma-num.fr/contribuer

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