Le chistera est un gant en osier de forme courbe et allongée, dont l’extrémité arrondie est appelée punta (la pointe)
Le chistera est fait à partir de bois de châtaigner, d'osier tressé et de cuir. La connaissance parfaite de trois métiers bien distincts est indispensable à la confection d’un chistera car c’est un seul et même artisan qui en assure toutes les étapes. Il s’agit de l'ébénisterie, pour le travail du châtaigner qui forme l'ossature et les côtes ; de la vannerie pour le tressage de l'osier sur l’armature, et enfin de la couture pour la confection du gant.
Description de l’objet
Le chistera est un gant en osier de forme courbe et allongée, dont l’extrémité arrondie est appelée punta (la pointe).
Le « squelette » du chistera est composé d’un cerceau de châtaignier, fixé par un contre bois et sur lequel treize côtes sont liées par une vannerie pour former la cavité ou poche. Un doigtier en cuir est cousu sur l’osier. Cet instrument mesure en moyenne 70 centimètres de longueur, 17 centimètres de largeur et 30 centimètres de profondeur.
Le chistera est fait à partir de bois de châtaigner, d'osier tressé et de cuir. La connaissance parfaite de trois métiers bien distincts est indispensable à la confection d’un chistera car c’est un seul et même artisan qui en assure toutes les étapes. Il s’agit de l'ébénisterie, pour le travail du châtaigner qui forme l'ossature et les côtes ; de la vannerie pour le tressage de l'osier sur l’armature, et enfin de la couture pour la confection du gant.
Description de la fabrication en trois étapes
Chaque chistera est unique car fait sur mesure, pour être parfaitement adapté à la main, à la taille, à la force et au style du pelotari (d’où une variation relative des dimensions et de la courbure).
1) Première étape : l’armature
La constitution de l’armature est la première étape de la fabrication proprement dite du chistera. En hiver les artisans vont en forêt couper des châtaigniers de cinq à dix ans, qu’ils ramènent à l’atelier. Les troncs (de deux mètres maximum) sont coupés en quatre. L’écorce et le cœur sont ôtés pour ne conserver que l’aubier. L’aubier est ensuite équarri pour prendre la forme d’une tige droite. Cette tige est pliée en deux, puis courbée et attachée, et enfin laissée à sécher pendant au minimum un mois.
« […] on courbe au maximum pour tester le bois. S’il casse ? Au feu ! Si ça plie ? C’est très bon. Sur un kilo de châtaignier qui rentre dans l’atelier, il n’y a que trente grammes de bon. Tout le reste est à jeter. »1
Une fois sec, le bois est redressé. « Et quand le joueur nous demande telle courbure, on prépare un cerceau. On le prépare à sa demande. »
Une fois cette phase de séchage terminée, les deux extrémités sont reliées par deux clous à un contre bois en frêne appelé « taco. »
Une dizaine de gabarits en fer, en forme de « u », sont fixés sur l’arceau pour supporter treize côtes en châtaignier, ayant chacune une courbure différente en fonction de sa position.
« Si le joueur me demande un peu moins de poche, je lui mettrais un gabarit plus bas. S’il me demande un peu plus de poche, je vais le lui mettre un petit peu plus. Ça c’est à la demande. Et là c’est pareil, un peu plus ou un peu moins. Et on va faire si vous voulez, une sorte de demi-tour et sur ces gabarits en fer, sur la dizaine que je mets on va étaler treize côtes, c'est-à-dire qu’il y a un côté qui est symétrique, donc ça va par paire. La deuxième est un peu grande et un peu plus courbe vous l’avez ici, un deux trois quatre cinq six, six côtes de courbure différente mais vous avez le double ici et il y en a une au milieu qui sépare les deux côtés. Ça c’est disons le squelette. C’est un petit peu / ça reflète si vous voulez le corps humain. Parce que vous avez des côtes principales qui sont au milieu, qui sont attachées ici et ici. Voyez ? Et on a les côtes flottantes et là c’est pareil, les quatre côtes de chaque côté viennent ici et meurent ici. Elles ne s’accrochent pas. »
Enfin, une fois la forme voulue obtenue, les gabarits de fer sont retirés et le travail de vannerie peut commencer.
2) Deuxième étape : le tressage de la poche
Au préalable, l’artisan égalise une à une les éclisses d’osier, en largeur et en épaisseur, à l’aide de deux rabots de «fabrication maison», appelés calibreurs (composés chacun de deux lames entre lesquelles on fait glisser l’éclisse).
Après avoir été trempés dans de l’eau pour être assouplis, les brins sont tissés, « un pris, un sauté » et serrés à l’aide d’un poinçon. Cette étape est la plus longue. Elle dure approximativement neuf heures et demie pour un petit chistera et treize à quatorze heures pour un grand chistera, car l’artisan a respectivement une centaine et 140 à 150 éclisses d’osier à calibrer et tresser.
« Là on a des patrons, alors y a des grandes mains, y a des petites mains, y a des gauchers, y a des droitiers. Tout ça c’est sur mesure. Et ça fait un petit peu le patron, comme la forme d’un fronton. Sauf qu’il y a des rayures dans ce sens-là. On met le patron sur le cuir et avec un tranchet ou un cutter et on fait quatre fentes. Et quand vous enlevez le morceau de cuir ça donne ça. Et avec la machine Singer qui date d’une centaine d’années, on va coudre quatre morceaux de tissu, quatre soufflets autour des fentes. Un, deux, trois, quatre. Mettez la main dans le chistera. Ça fait, disons, un gant, c’est pour ça qu’on dit petit chistera ou petit gant, grand chistera ou grand gant. Vu intérieurement ça donne ça. Là on enfile le panier comme ça, on va coudre à la main tout autour et on va coudre à travers les fentes, à travers le panier, c’est pour ça que vous voyez qu’il y a des nœuds comme ça, pour faire la séparation des doigts. »
Usage de l’objet2
Le chistera est à la fois le nom d’une des spécialités de la pelote basque et de l’instrument sollicité. Sa taille, sa forme et son maniement varient selon la discipline pratiquée :
1. Toutes les citations sont extraites d’un entretien réalisé avec Jean-Louis Gonzalez en avril 2013, à Anglet.
2. Voir la fiche «Pilota/ La pelote basque ».
3. Voir la fiche « Le rebot ».
Le bois
C'est en décembre que les châtaigniers sont coupés en forêt ; ils ont entre cinq et dix ans, sont droits, réguliers, et ne mesurent pas plus de deux mètres, limitant ainsi les risques de bois fragile, cassant ou possédant trop de nœuds. Les troncs sont coupés à la main et ensuite coupés en quatre, l'écorce et le cœur du tronc (trop craquant) sont enlevés pour ne conserver que l'aubier.
L’osier
L’osier provient d’Andalousie (Espagne). L’atelier Gonzalez se fournit auprès d’un des huit fabricants de chistera installés au Pays basque espagnol, qui à l’aide d’une machine dégrossit l’osier et lui vend en botte de mille éclisses.
Le cuir
Le cuir est le matériau le plus cher du chistera. Il est généralement acheté dans une tannerie à Espelette (64). L’atelier Gonzalez utilise majoritairement de la vachette et un peu de cuir de mouton.
Les chistera décrits ci-dessus.
L’atelier aujourd'hui situé à Anglet est le dernier atelier de fabrication de chistera en France. Huit autre existent encore en Espagne. Quelques autres personnes savent encore fabriquer ou réparer les chistera mais sans en faire une activité professionnelle à part entière.
L’apprentissage et la transmission de ce savoir-faire se confondent avec l’historique de l’atelier.
Le grand-père de Jean-Louis était maréchal-ferrant et voisin de palier d’un fabricant de chistera qu’il aidait le soir avant de fonder son propre atelier en 1887.
Il transmis son savoir-faire à trois de ses fils, dont le père de Jean-Louis.
« Mon père a eu quatre fils. Sur les quatre fils il y en a deux qui ont fabriqué des chistera : mon frère [Pierre] et moi. Mon frère a arrêté. Et moi j’ai eu quatre fils et sur les quatre fils il y en a un qui a continué. Donc vous voyez à chaque génération il y a eu de la casse comme on dit. »
Pour se faire un peu d’argent de poche, les fils de Jean-Louis pouvaient l’aider à l’atelier, à partir de treize ou quatorze ans, notamment en égalisant les éclisses d’osier à l’aide des rabots « calibreurs ». Un seul d’entre eux, Pierre, a appris le métier, après avoir joué deux ans comme professionnel de cesta punta au Mexique, puis après avoir exercé, de retour en France, divers « petits métiers ».
« Il a fabriqué son chistera à l’âge de treize ans, son premier. Mais il voulait le faire lui-même,tout. Et il a joué avec. Il était pas joli, pas joli. Mais il voulait le garder et c’est son professeur de violon qui lui a dit « dis donc ton père est fabricant, tu pourrais pas me fabriquer un chistera ? » Et il en avait un et il lui a offert.
- Donc en fait il a appris le métier quand il est revenu adulte vers vous ?
- Oui. Et il a joué. Et quand il était au Mexique, il fallait se réparer les chistera. Et comme c’était les Mexicains qui réparaient, coup-ci, coup-ça, bon parce que eux c’était pour le pognon, il s’est réparé le chistera lui-même, et il réparait les chistera des copains, ils lui donnaient une pièce et… le goût est arrivé je pense là. Et après quand j’ai eu la retraite, il est arrivé juste à ce moment-là.
« Je te laisse l’atelier, tu te débrouilles. Je te donne un coup de main mais tu te débrouilles. ». Après je lui ai appris certaines choses évidemment. Et maintenant il est son patron. »
Historique général :
Voir la fiche « Pilota/ La pelote basque ».
Historique particulier de l'entreprise, de la personne ou de l'organisme, de la forme d'expression ou de l'espace culturel faisant l’objet de la fiche :
L’invention du chistera est attribuée à Jean Dithurbide - dit Gantchik i- qui, en 1857, aurait eu l'idée de transformer un panier d'osier en instrument de jeu. Ce gant s’avéra plus léger que celui en cuir, sollicitant beaucoup moins le bras et permettait enfin d'envoyer la pelote beaucoup plus loin. C’est grâce à cela que le jeu indirect pris de l’ampleur malgré l’interdiction peinte sur les murs de rebot. En 1887, un joueur basque espagnol, Melchor Guruceaga aurait augmenté la profondeur de son chistera pour compenser une blessure, donnant ainsi naissance au « grand chistera».
L’entreprise Onena a quant à elle été fondée à Bayonne en 1887 par le grand-père de Jean-Louis Gonzalez.
Jean-Louis Gonzalez propose une visite commentée de l’atelier tous les lundis, mercredis et vendredis à 17h ou sur rendez-vous pour les groupes.
Chaque année, plusieurs reportages sur l’atelier dans la presse écrite et des journaux télévisés, aux niveaux local, régional et national.
Au Musée Basque et de l’Histoire de Bayonne, ainsi qu’à l'écomusée de la Pelote et du Chistera Pilotari (à Saint-Pée-sur-Nivelle), un écran diffuse des films sur la fabrication du chistera tournés dans l’atelier des Gonzalez.
Voir la fiche « Pilota / Pelote basque ».
Nom et rôle et/ou fonction de la personne rencontrée :
Jean-Louis et Pierre Gonzalez, fabricants de chistera.
Municipalité, vallée, pays, communauté de communes, lieu-dit… :
Anglet
Dates et lieu(x) de l’enquête : du 1e rmars au 30 juin 2013.
Date de la fiche d’inventaire : 30 juin 2013.
Nom de l'enquêteur ou des enquêteurs : Cendrine Lagoueyte, Laboratoire ITEM, EA 3002.
Nom du rédacteur de la fiche : Cendrine Lagoueyte, Laboratoire ITEM, EA 3002, programme de recherches « Inventaire du Patrimoine Culturel Immatériel en Aquitaine », Université de Pau et des Pays de l’Adour.
N° d'inventaire Ministère Culture : 2013_67717_INV_PCI_FRANCE_00299
Identifiant ARK : ark:/67717/nvhdhrrvswvk2dp
Comment contribuer à l'inventaire : la méthode : http://pcilab-new.huma-num.fr/contribuer
Accéder à la fiche sur Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pelote_basque
Généré depuis Wikidata