La Faïencerie d’Art de Malicorne fonctionne comme une faïencerie du XVIIIe siècle.

La Faïencerie d’Art de Malicorne fonctionne comme une faïencerie du XVIIIe siècle. Le processus de fabrication est celui que l’on retrouve dans la plupart des faïenceries qui existaient dans le temps. On fabrique la terre et les émaux puis on réalise les formes et les moules. Aucune intervention extérieure dans la chaîne de fabrication. Il s’agit de rester fidèle aux techniques traditionnelles de l’époque. La plus jeune des techniques date de la fin du XIXe siècle : c’est l’ajourage. Ce travail long et délicat a fait la réputation des faïences de Malicorne. À l'aide d'un simple "canif", l'ajoureuse découpe patiemment l'argile crue pour donner aux vases, corbeilles ou pieds de lampe une finesse et une légèreté. Les pièces dites "ajourées" sont fabriquées avec de la terre de Malicorne (extraite d’une carrière située à la sortie de Malicorne) ; elle peut être découpée à l’extrême jusqu’à atteindre un niveau suffisant de finesse (la pièce ajourée ne doit pas non plus être trop fragile).

- Après extraction l’argile est brute et impure. Elle est préparée pour pouvoir être utilisée en atelier. C’est la première étape. L’argile est mélangée avec celle de la localité voisine (La Chapelle d’Aligné) puis avec de l’eau. Elle est mise à tremper pendant une semaine dans des bacs. Après avoir été humidifiée, elle est versée dans un malaxeur pour être broyée. Un ajout important d’eau la rend liquide. Un déblayeur permet par ailleurs d’évacuer par un courant d’eau les parties lourdes de l’argile qui tombent dans les bacs. Elle est ensuite tamisée afin de tasser la partie fine. L’eau de cette argile est évacuée dans les bacs qui se situent à l’extérieur de l’atelier. Après une semaine de repos durant laquelle l’excédent d’eau est éliminé par un trop-plein, la terre toujours liquide, alors appelée "barbotine", est versée dans des formes de plâtre. Celles-ci absorbent le surplus d’eau de l’argile pendant deux à quatre jours. Il devient alors possible de récupérer une pâte assez dure. Elle est tassée de sorte à devenir des pains d’argiles qui seront stockés les uns contre les autres en cave pour une durée minimale de deux années. Ce vieillissement en cave a son importance : les matières organiques encore présentes dans l’argile s’éliminent et la terre obtient alors des qualités plastiques idéales pour le façonnage des formes. La Faïencerie d’Art de Malicorne travaille sur une terre qui a passée facilement trois années en cave. Une fois sortie de cave, la terre est désaérée. La machine à désaérer empêche aux bulles d’air de se former dans la terre ce qui ferait éclater la pièce lors de la cuisson. Dans le temps cette pratique se faisait par un ouvrier qui battait la terre toute la journée. Elle était piétinait puis battue à nouveau sans arrêt. Le progrès industriel a permis à la Faïencerie d’Art de Malicorne d’évoluer dans cette pratique sans désaltérer le produit.

- La deuxième étape de la fabrication est l’émail. Il s’agit de la partie vitrifiée qui va recouvrir la terre cuite afin d’y installer une décoration. Elle va rendre la terre
imperméable. Cet émail doit posséder une excellente qualité de vitrification ; son ingrédient principal est la calcine, un mélange d’oxydes de plomb et d'étain dont la qualité sera déterminante pour sa blancheur.

1. Il s’agit tout d’abord de calciner des lingots de plomb et d’étain. À 300°C ils commencent à fondre dans le four à calcination alimenté avec du bois. Les flammes viennent lécher le métal qui rapidement entre en fusion. Le bois apporte un excédent d’oxygène lors de sa combustion. Puis l’on obtient une matière liquide métallique. La porte du four reste ouverte pour permettre à l’air d’entrer et rapidement une couche poudreuse d’oxyde se forme à la surface de cette matière par calcination. On parle de "calcine" qui vient du mot "calcination". Alors la calcine est récupérée parce qu’elle correspond à la poudre d’émail (celle-ci est jaune au départ du feu et devient grise à la fin de la cuisson faute d’oxygène).

2. À cette calcine on lui mélange à part égale du sable de Nevers, du sable et du borax. Puis on ajoute des fondants qui permettront de fondre cette nouvelle matière. Tous ces ingrédients sont déposés dans un four alimenté au charbon. Il faut attendre six heures pour atteindre la température de 1000°C environ afin que la matière entre en fusion et s’écoule dans une fosse telle une pâte de chew-gum. Cette fosse est remplie constamment d’eau afin de créer un choc thermique lors de l’écoulement de la matière. On obtient ainsi des blocs solides d’émail brut (en cailloux) qui sont ensuite récupérées. On constate qu’ils sont d’abord noircis compte tenu des fumées de combustion du charbon. Mais une deuxième cuisson permettra de rendre à l’émail une couleur parfaitement blanche. De nos jours la Faïencerie d’Art de Malicorne ne procède plus à cette étape trop laborieuse. Elle travaille avec un four électrique en achetant une base d’émail qui sera mélangée ensuite aux produits de base.

3. Ces blocs solides d’émail brut obtenus par cette méthode préalablement laborieuse sont finement broyés dans une machine contenant des galets de mers. Ces galets vont user cet émail de sorte à le réduire en poudre pendant quatorze heures. Cette poudre sera mélangée avec de l’eau ce qui donnera le "bain d’émail". Aujourd’hui la faïencerie a racheté un appareil moderne dont les parois du cylindre sont garnies de billes en céramiques inusables qui remplacent les galets de mers (le temps de réduction en poudre est de sept heures avec un bruit moins assourdissant).

- La troisième étape est la fabrication des formes. La Faïencerie d’Art de Malicorne est organisé en ateliers conçus en longueur afin de relier les différents maillons de la chaîne. Une salle de fabrication est consacrée au travail de la forme de la terre. Une autre salle intermédiaire est dédiée à la cuisson aux fours ; les biscuits obtenus seront ensuite rapidement envoyés dans la salle d’émaillage et enfin chez les décorateurs. Trois méthodes interviennent pour fabriquer les formes :

1. Le tournage. Le geste du tourneur imprime à l’argile une courbe régulière, un galbe précis. Il propose des formes rondes et lisses. Après avoir tourné les pièces, les finitions sont réalisées pendant que la pièce est suffisamment humide : on ajoute par exemple des éléments de décoration en terre (feuilles, fleurs, filets, etc.).

2. Le calibrage. Les pièces en série nécessitent une rapidité de fabrication que le tourneur ne peut pas réaliser. Alors les moules permettent de donner une partie de la forme à la terre qui sera ensuite reproduite à l’infini. Parfois une vingtaine de moules sont nécessaires pour la fabrication d’une seule pièce. Ce sont des fabrications complémentaires. Il suffit ensuite de calibrer l’épaisseur de la terre grâce aux calibreuses qui permettent (en fonction des calibres) de calculer des épaisseurs variées de la terre de sorte que celle-ci ne soit pas esthétiquement trop épaisse. Ce calibrage permet de réaliser des modèles ronds comportant des reliefs légers comme des cannelures. Un moule de plâtre s'adapte sur un tour de potier muni d'un bras mécanique articulé. Il suffit de placer une balle de terre au fond du moule et de le faire tourner rapidement. En abaissant le bras mécanique, un gabarit appelé "estèque" pénètre dans le moule et comprime l'argile sur ses parois. Après quelques heures de séchage, il est possible de récupérer la forme. Sachant que les moules sont en plâtre, le plâtre va absorber l’humidité de la terre. Celle-ci se rétrécit et sortira toute seule du moule devenu trop grand pour elle. Puis la pièce est récupérée.

3. L’estampage. Par la méthode de l’estampage, on obtient les autres formes qui ne sont pas arrondies (le tournage ne se fait que pour les formes arrondies). On utilise des moules de plâtre qui se décomposent en plusieurs parties. Chaque élément est garni à la main d'une plaque de terre, puis le moule est recomposé pièce par pièce. Après séchage, le moule est démonté et la forme apparaît avec ses coutures et ses imperfections. Il faudra lisser, ébarber, et parfois ajouter des éléments en relief comme des anses. La terre est laissée au repos. Le moule est en plâtre : absorption, rétrécissement et récupération de la pièce. Une variété de forme peut être ainsi réalisée par estampage.

- Puis l’on passe aux étapes de la cuisson. Les formes terminées sont disposées en cave pour un séchage lent et régulier. Après quelques jours passés en cave pour se raffermir, certaines formes peuvent déjà être ajourées par la technique de l’ajourage. Elles sont ensuite cuites une première fois à 1050°C. Cette cuisson permet à la terre de ne pas dégager de matières toxines qui viennent altérer la pièce après émaillage. La terre devient dure et poreuse, et obtient une couleur brun-rosée. On parle alors de "biscuits". Ils sont prêts à l’émaillage. La poussière est mauvaise pour les biscuits parce qu’elle s’intègre dans les pores (lors de l’émaillage du biscuit, la porosité est essentielle). Le biscuit couleur brun-rosé est plongé dans un bain d’émail blanc (souvent à l’aide de crochets). La répartition de l’émail doit être parfaite en évitant les coulures ce qui nécessite une grande dextérité. La pièce est alors émaillée pour une première cuisson à 950°C. Par la suite le décorateur enlèvera les imperfections de coulures sur la pièce afin de procéder à la décoration. La Faïencerie d’Art de Malicorne livre quelques astuces. Il ne faut pas déposer une pièce entièrement émaillée dans un four parce qu’elle collera sur la plaque du four après cuisson. Elle a pour cela conçu des petites pointes à trois dents qui sont posées sur la plaque afin d’accueillir la pièce. Ainsi après cuisson seule l’empreinte des trois petites dents indique que la pièce a été posée sur le four.

- Vient enfin l’étape de la décoration. Chaque pièce émaillée possède une fiche qui indique au décorateur le type de décoration à faire. Certaines pièces nécessitent de travailler avec un modèle de référence pour s’en rapprocher le plus possible. À l’aide de la barbotine on peut coller de nouveaux motifs de décoration sur la pièce (cette barbotine doit être entièrement absorbée pour ne pas créer des bulles d’air qui casseront la pièce lors de la cuisson finale). Pour les couleurs, elles sont posées à l'aide de pinceaux. Elles sont toutes composées d'oxydes métalliques (cobalt pour le bleu, antimoine pour le jaune par exemple) ; elles doivent entièrement être absorbées par l’émail de sorte à se stabiliser sur la pièce après cuisson. Le travail de l’or supporte une fusion à 690°C ; elle est posée sur la
pièce et recuite pour stabilisation. C'est la seconde cuisson à 920°C qui fixe les couleurs du décor sur l'émail pour rendre ces dessins vifs et inaltérables. Le feu est la dernière étape où tout peut basculer: fêles et autres défauts de cuisson peuvent ruiner le travail de plusieurs semaines.

La Faïencerie d’Art de Malicorne ne rencontre pas de problème de disparition de carrières contrairement à certains céramistes qui évoquent le fait que les carrières françaises sont rachetées par des industriels pour en détenir le monopole. Bien au contraire, elle possède ses propres carrières situées à 1 kilomètre de l’atelier. La terre de Malicorne est alors extraite à environ 1 mètre du sol ; la couche d’argile faisant 1m20 de profondeur. Elle est inépuisable.

La Faïencerie d’Art de Malicorne n’utilise pas de couleurs naturelles pour la décoration des pièces parce qu’elles disparaissent après cuisson. Elle utilise alors des oxydes métalliques qui ont la propriété de fondre à la température exacte de la fusion de l’émail. Ainsi lorsque l’émail arrive à une température optimale de 950°C, la pièce se recouvre d’une pâte molle. A cette température, les oxydes sont liquéfiés. Ils fusionnent en se mélangeant entre eux ce qui permet à la coloration de pénétrer à l’intérieure de la pièce. Ainsi on ne ressent pas les couleurs sur la pièce au toucher ; elles se sont stabilisées sans aspérité. Avec le temps la coloration ne se détériore donc pas.
Toutefois un problème d’approvisionnement en matériaux peut se poser. Étant donné que le nombre de faïenceries se soit réduit considérablement en France, les colorants par exemple peuvent être difficiles à trouver sur le marché. Parce que les fournisseurs ne sont pas intéressés par les besoins d’une poignée de professionnels. Alors ils fournissent des colorants de moindre qualité.
Même si les faïenciers s’adressent aujourd’hui à des distributeurs français, on sait que les colorants proviennent de l’étranger sans connaissance exacte des composants de la matière.

La faïencerie possède une collection de 20 000 moules en plâtre permettant de fabriquer plusieurs modèles de formes de pièces.
Elle possède par ailleurs une variété importante de pinceaux qui correspondent à une application précise de décors selon si l’on réalise une feuille ou un filet par exemple. Certains pinceaux ont une pointe plus fine que les autres. Les décorateurs s’y attachent ; alors, ils sont conservés dans l’atelier.

La plupart des machines ont 80 ans. La faïencerie a souhaité conserver tout l’équipement d’origine compte tenu de leur efficacité et de leur facilité d’utilisation: malaxeur, bassins, séchoirs, calibreuses, etc. Ils se sont équipés parfois de machines plus modernes afin de faire avancer la profession à condition de ne pas altérer le produit final. Les fours de cuisson par exemple sont électriques pour ne pas rendre le travail laborieux.

La faïence décorative ou utilitaire a été pendant longtemps un objet du quotidien. La Faïencerie d’Art de Malicorne ne voit pas l’intérêt des pièces uniques. Bien au contraire, elle veut que cette pièce fasse partie de l’environnement. Elle est riche d’un catalogue de plus de quatre mille références et propose également chaque année une collection contemporaine (une douzaine de création par an). L’atelier s’est consacré à relever le niveau esthétique des produits réalisés en créant des moules de formes qui correspondent aux pièces originales faites à l’époque par les anciennes faïenceries. Elle a développé une gamme de produits en fonction des courants siècle, se caractérise surtout par les pièces de forme telle que coupes, corbeilles et bannettes aux contours tressés, dentelés, ajourés et découpés. L’art animalier s’est également développé comme en témoigne le bestiaire commercialisé par la faïencerie.

Dans la boutique, on peut découvrir la variété de la production de la faïencerie. Il s’agit de produits traditionnels classiques mais aussi des produits classiques transposés de façon plus contemporaine (vases, assiettes décoratives, corbeilles trompe l’œil, cages d’oiseaux, sujets religieux, etc.). Elle propose une gamme de produits dits "ajourées" puis des pièces Arts de la table. Une grande collection d’animaux, surtout les oiseaux. Puis une collection de pots de pharmacie ; la faïencerie a toujours travaillé avec un distributeur de verrines de pots de pharmacie. Ce produit est encore recherché de nos jours parce qu’il est décoratif. Elle collabore avec un grand nombre d’artistes céramistes ce qui permet de repenser la faïence autrement en présentant des approches tout à fait différentes du travail de la céramique tout en s’inscrivant dans une production qui a fait depuis très longtemps la réputation de la région. Victor Deschang exécute la pièce souhaitée pour en faire un modèle de présentation à ses décorateurs ; ces derniers pourront alors se retrouver dans le choix des couleurs par exemple. Ce sont des assiettes de présentation, des plats décoratifs, des vases, etc. Il a par ailleurs collaboré avec le concepteur de la Géode de la Villette qui souhaitait fabriquer une géode en faïencerie avec un éclairage LED. Il s’agissait alors de mener tout un système de triangulation.

La Faïencerie d’Art de Malicorne est installée à Malicorne sur Sarthe depuis 1924. La ville de Malicorne (Ville et Métiers d’Art) est un centre de faïencerie qui est restée un peu à l’écart des développements techniques surtout entre la seconde moitié du XIXe siècle et le premier quart du XXe siècle explique Stéphane Deschang. Les ateliers qui existaient à l’époque ne se sont pas ouverts au progrès contrairement à la Faïencerie d’Art de Malicorne. Elle fonctionne comme au XVIIIe siècle puisqu’elle a été construite selon des modèles de vieilles faïenceries de l’époque. Toutes les structures sont mises en place dans l’atelier pour produire une variété importante de pièces alliant à la fois le traditionnel et le contemporain. Il s’agit de l’une des dernières faïenceries en France à produire ces pièces comme au XVIIIe siècle. D’ailleurs Stéphane Deschang organise les visites guidées de sa faïencerie aux touristes curieux. Il fait la démonstration des étapes de la fabrication de la terre, de l’émail et des pièces décorées. On peut voir les étapes du comprendre aux visiteurs la politique tarifaire de la faïencerie. Ils comprennent alors le temps de travail nécessaire pour la fabrication d’un produit fini réalisée par un personnel de sept salariés hautement qualifié. Puis c’est une façon de sensibiliser les visiteurs (ou les clients) aux savoir-faire de l’atelier. Une boutique présente ensuite la variété de production de la faïencerie tout en conservant l’héritage des faïenceries de Malicorne. Elle se doit de refléter le travail élaboré en atelier.

Les jeunes stagiaires qui ont été reçus à la Faïencerie d’Art de Malicorne ont participé activement au travail de l’atelier avec un matériel adéquat du XVIIIe siècle. Aujourd’hui Stéphane Deschang n’accueille plus de stagiaires parce qu’il n’a pas le temps de les former. Puis c’est un coût pour l’entreprise : le temps consacré à la formation est celui qu’il aurait pu consacrer à la production. Ce coût se répercutera sur son chiffre d’affaires. Par ailleurs il évoque que les formations existantes dans le domaine de la faïencerie sont aujourd’hui inexploitables. Les jeunes ne sont suffisamment formés en atelier pour acquérir les gestes et la dextérité de la main. Les formations sont trop courtes. Ils n’ont pas les bases suffisantes. Cette absence de formation adéquate ne permet pas d’anticiper les départs à la retraite par exemple. Il faut compter un minimum de trois années de pratique pour commencer à maîtriser le tournage ou la décoration sur des pièces basiques ce qui n’est pas la réalité du marché. La plupart des jeunes ne savent pas aujourd’hui utiliser les outils adéquats tels que les pinceaux par exemple. Selon Victor Deschang, ils doivent aujourd’hui répondre à des critères indispensables dans l’exercice de la profession, la rigueur et la précision. Ils doivent exercer tous les jours dans les ateliers pour apprendre à toucher la terre et à appréhender la matière. Pour redynamiser les métiers de la faïencerie Victor Deschang pense qu’il est nécessaire de subventionner les ateliers à former les jeunes par une longue pratique interne. Si le jeune s’en va, alors tant pis pour la faïencerie.
Mais la passion du métier est suffisante pour avoir l’envie de former quelqu’un. Puis cela permet aussi à la faïencerie d’anticiper les départs éventuels de ses salariés qui pourront alors être remplacés.

D'après le Musée de Malicorne -espace Faïences.

L’activité céramique en Sarthe n’est pas due au seul fait du hasard puisqu’il existe deux gisements d’argile dans son sous-sol. Le premier dans le nord de la Sarthe autour de Bonnétable et Prévelles, le second dans le Sud autour de Ligron et Malicorne. Le travail de la terre aux alentours de Malicorne remonte à l’époque gallo-romaine. À proximité de Malicorne sur Sarthe, le village de Ligron a connu une importante production de poterie et subvenait aux besoins locaux, c’est le plus ancien centre de production du Sud de la Sarthe.
Le travail de l’argile à Malicorne commence avec l’arrivée de Jean Loiseau. Né en 1721 en Touraine, cet ouvrier faïencier de Saint Christophe sur le Niais, demande en 1747 l’autorisation d’ouvrir sa propre faïencerie à Malicorne sur Sarthe. Il achète une ancienne auberge "le Plat d’Étain" et commence son activité faïencière qui s’accroît rapidement et l’entreprise familiale emploie une quinzaine d’ouvriers à la fin du XVIIIe siècle. Il faut dire que Malicorne offre bien des avantages : l’argile à proximité, les forêts environnantes pour l’alimentation des fours et la rivière pour l’acheminement des faïences à Nantes via la Loire. Sous l’impulsion de ce jeune homme, Malicorne devient pendant la seconde moitié du XVIIIe siècle un petit centre faïencier très actif. Ce centre fournit aux campagnes environnantes une vaisselle à usage domestique dont les principales qualités sont la blancheur et une bonne résistance au feu. Mais la production n’est pas qu’utilitaire : des formes et des décors essentiellement inspirés de Rouen et de Nevers, sortent des fours de la faïencerie du Plat d’Étain. L’arrivée à Malicorne au cours de cette période de tourneurs et d’un peintre originaires de Nevers contribue au développement d’une fabrication plus élaborée.

Cette lucrative initiative est bien vite imitée par d’autres producteurs qui, à partir du XIXe siècle s’installent eux aussi pour produire de la faïence. Ainsi une nouvelle faïencerie est fondée à Malicorne par Guillaume Rabigot, originaire de Nevers et ancien ouvrier tourneur en faïence de Jean Loiseau. Il est à l’origine de toute une lignée de faïenciers et son fils Victor ouvre en 1842, un second atelier toujours en activité : la faïencerie Bourg-Joly. En 1835, une troisième faïencerie voit le jour dans l’ancien prieuré du village, accolé à l’église, tout au bord de la rivière.
Différents faïenciers se succèdent à la tête de ces faïenceries qui produisent surtout, comme au XVIIIe siècle, une faïence courante et usuelle : Cador, Béatrix, Pouplard, Moreau, Vallée, Maillard, Lecomte, Laze, Tessier, Frénéhard, Guérin ont tour à tour écrit plus de deux cent soixante ans d’histoire et de tradition qui perdurent encore avec les Faïenceries d’Art de Malicorne (Deschang) et de Bourg-Joly (Fouquet). Durant les deux dernières décennies du XIXe siècle, la production de Malicorne va radicalement évoluer sous l’impulsion de deux hommes : André Arondel et Léon Pouplard. Le premier introduit dans la faïencerie Bourg-Joly une dessinerie, véritable atelier de décoration. Il s’inspire essentiellement des majoliques italiennes de la renaissance mais s’intéresse également aux décors de Nevers et de Rouen. Quant à Léon Pouplard, il se marie avec une héritière de la faïencerie du Plat d’Étain et c’est aux côtés de sa belle-mère qu’il travaille dès les années 1888- 1890 pour améliorer une fabrication restée largement tournée vers l’utilitaire. L’évolution de la production de Malicorne est rendue inévitable par l’émergence de produits concurrents tels que le fer émaillé qui remplace peu à peu les ustensiles plus fragiles sortis des fours de Malicorne. Léon Pouplard profite du retour en grâce de la faïence, négligée voire méprisée pendant la majeure partie du XIXe siècle. Il introduit les décors bretons, copiés ou inspirés des faïences de Quimper. L’opération, en dépit de procès avec les fabricants bretons, s’avère fructueuse : la mode est à l’article souvenir et la fabrication de "faïence fantaisie" occupe une place prépondérante dans les ateliers jusqu’à la veille de la Seconde Guerre Mondiale.

La Faïencerie d’Art de Malicorne a été fondée en 1923 par Emile Tessier, un ancien ouvrier de Léon Pouplard. La fabrication est presque exclusivement vouée à la reproduction d’anciens et aux souvenirs. Cet atelier élargit également sa gamme à des faïences ajourées, inspirées des porcelaines du XIXe siècle. Ainsi avec Emile Tessier, la technique de l’ajourage s’impose très rapidement et devient une spécialité de Malicorne. Les décors reprennent les motifs devenus classiques de grandes faïenceries françaises ou européennes du XVIIIe siècle. Il y produit des faïences de grand feu dans la tradition malicornaise et crée ses propres modèles.
L’entreprise prospère (elle emploie jusqu’à cent personnes) et est dirigée par la famille, jusqu’à sa mort en 1972. Sa fille et son gendre lui succèdent, puis son petit-fils Pierre Després. Elle est ensuite rachetée par Victor Deschang en 1984. Après avoir été formé à l’école des Beaux-Arts, il souhaitait s’exprimer artistiquement tout en préservant les anciennes techniques au sein des ateliers crées par Emile Tessier et en conservant une production traditionnelle. Alors il relève le défi de remettre au goût du jour une production qui avait disparue. Il préserve les structures et le patrimoine de la faïencerie en remettant en l’état tout l’outillage traditionnel afin de travailler comme à l’époque. Il crée de nouvelles formes et de nouveaux décors qui s'intègrent parfaitement aux styles de Malicorne. En 2005 son fils Stéphane Deschang décide de reprendre l’activité de son père aujourd’hui à la retraite. Mais dont le regard averti est toujours présent pour superviser l’ensemble du travail et pour créer le modèle de la pièce ensuite reproduite par les salariés.

- Exposition

- Site internet

- Boutique

- Foire / Salon

- Label Entreprise du Patrimoine Vivant

- Réseau de professionnels

- Malicorne Espace Faïence

Stéphane Deschang participe régulièrement à des salons professionnels en France et à l’étranger. Il s’agit du salon "Maison et Objet" et du salon "Gift" à New-York. Cette participation constitue une part importante de son chiffre d’affaires mais elle est un moyen de communication indispensable pour développer la commercialisation de ses produits auprès des particuliers ou professionnels. Stéphane Deschang trouve que les prix des stands sur les salons sont compréhensibles. Il est important selon lui de garder une image de marque. Il travaille également auprès des Musées Nationaux (Louvre, Orsay).

La Faïencerie d’Art de Malicorne est aujourd’hui bien installée sur les marchés étrangers notamment sur le marché américain où la demande est forte. Par contre il est plus difficile pour eux de se positionner sur le marché asiatique en raison d’une différence culturelle (les asiatiques n’appréhendent pas la faïencerie). Quant aux faïenceries qui existent en France, au Portugal, en Italie, au Maghreb et en Turquie, elles ne sont pas positionnées sur le même type de production (la technique de l’ajourage est en effet une pratique locale de Malicorne). Par ailleurs, elle travaille conjointement avec le musée "Malicorne Espace Faïence" en exposant plusieurs œuvres de faïencerie. Ce musée est ouvert depuis 2001 et renferme les faïences qui ont fait la notoriété de la ville. Adresse : Malicorne Espace Faïence. BP 10, rue Victor Hugo - 72270 Malicorne sur Sarthe – Tél. : 02 43 48 07 17.

La Faïencerie d’Art de Malicorne a été labellisée "Entreprise du Patrimoine Vivant" en 2006. Elle est inscrite sur l’Annuaire Officiel des Métiers d’Art de France de la SEMA. Elle est par ailleurs inscrite sur l’inventaire du patrimoine culturel immatériel du Ministère de la Culture.

- Centre de ressources de l’Institut National des Métiers d’Art (INMA)
23, avenue Daumesnil – 75012 Paris. Tél. : 01 55 78 85 85. info@eurosema.com

Ouvrages et documents

- DESCHANG Annie et Victor. Faïencerie d’Art de Malicorne, Catalogue de 45 pages qui propose une sélection des pièces qui ont fait la réputation de la Faïencerie d'Art de Malicorne.

- DESCHANG Stéphane ; KERVELLA Gilles, décembre 2001. Les faïences de Malicorne, éditions La Reinette.

- "Malicorne", in Connaissance des Arts, 2002, 34 pages. Numéro spécial de "Connaissance des arts" consacré à l'histoire de la tradition faïencière de la ville de Malicorne.

Site internet

 

La Faïencerie d’Art de Malicorne est aujourd’hui l’une des seules faïenceries à Malicorne à posséder toutes les structures nécessaires pour fonctionner comme au XVIIIe siècle. Seul un atelier de faïence contemporain continue la production des modèles originaux ou de style emprunté alliant tradition et modernité (La Faïencerie Bourg-Joly). Selon Victor Deschang, le nombre des faïenceries s’est réduit de façon considérable parce que la reprise des ateliers n’a pas été effectuée correctement. Puis il est impossible de travailler en petit nombre dans ces structures ; il faut maîtriser l’intégralité de la chaîne de fabrication. Le problème qui se pose aujourd’hui au niveau de la faïencerie est le manque de moyens financiers suffisants pour dégager les fonds nécessaires qui permettraient de posséder un outillage en parfait état ou de l’entretenir correctement. Les repreneurs des faïenceries ne se sont pas impliqués de la bonne manière selon Victor Deschang. Ils ont souffert d’un manque de matériel adéquat et n’ont pas développé les pièces contemporaines pour accroître la variété de la production traditionnelle. Ils ne sont pas penchés sur la nécessité des petites structures de devenir opérationnelles rapidement puis polyvalentes. L’ensemble de la chaîne de production doit être parfaitement maîtrisé afin de régler les défectuosités ou les problèmes qui surviennent dans les ateliers (pannes de fours, remplacement d’un personnel absent par exemple). Puis la notion de temps de travail a été négligée. Il faut prendre le temps de se consacrer entièrement à son savoirfaire
pour arriver à répondre aux attentes de la clientèle. La fabrication de la pièce peut se révéler un véritable casse-tête selon lui. Parfois il faut mettre en place tout un système de logique pour que la géométrie de la pièce soit parfaitement reproduite sur la terre.
Il faut selon lui avoir le niveau de qualité suffisant pour continuer à exister. Il rajoute qu’il est important d’aider les entreprises qui auraient besoin d’être aidées parce qu’elles peuvent être capables de se tirer vers le haut ; l’image véhiculée par certaines entreprises fait la renommée du patrimoine français.

Par ailleurs, L’Espace Faïence de Malicorne (Sarthe) est né de la volonté des élus de réhabiliter une ancienne manufacture faïencière du territoire, avec pour ambition de constituer un pôle attractif dans le sud de la Sarthe. Après étude de faisabilité, Malicorne Espace Faïence a été conçu comme un équipement touristique culturel, vitrine pour les créations locales, organisé autour d’un système de renvoi vers les boutiques des deux entreprises de faïence. Sur plus de 2000 m², le visiteur y découvre l’argile, l’émail, les couleurs… Animé par une équipe de six personnes (dont un attaché du patrimoine, un attaché de conservation, deux animateurs assistés d’une personne supplémentaire en saison touristique), l’espace assure les fonctions de centre de ressources documentaires lié à la céramique. Il accueille touristes, classes vertes et scolaires (5000 élèves de l’Académie de Nantes en 2005) dans le cadre d’un parcours thématique ludique jalonné d’expositions, de bornes interactives, de démonstrations d’un professionnel et d’ateliers de découverte. Une boutique propose à la vente des productions des professionnels locaux. En 2004, le site a été fréquenté par 18 000 visiteurs, dont 40 % originaires de la Sarthe. L’équipement a été financé dans sa partie investissement par la région. Pour la partie fonctionnement, il bénéficie d’une convention triennale avec le conseil général et la communauté de communes du pays Malicornais. Les retombées économiques sont progressivement perceptibles sur le territoire de Malicorne : la structure d’hébergement de plein air de la commune, classée 3 étoiles depuis 2004, ne désemplit pas durant la période touristique, les restaurateurs témoignent d’une croissance de leur chiffre d’affaires. Les artisans d’art bénéficient des retombées de l’opération. La boutique assure un débouché supplémentaire à leur production et les touristes s’orientent vers leurs ateliers à la suite de la visite. De surcroît, ils estiment que ce projet est un élément moteur de la pérennité de leur activité.

Personne(s) rencontrée(s)

- Stéphane Deschang, dirigeant de la Faïencerie d’Art de Malicorne

- Victor Deschang, son père

Localisation (région, département, municipalité)

Pays de la Loire, Sarthe, Malicorne sur Sarthe

Adresse : 18, rue Bernard Palissy
Ville : Malicorne sur Sarthe
Code postal : 72 270

Téléphone : 02 43 94 81 18
Adresse de courriel : fam.malicorne@wanadoo.fr
Site Web

Dates et lieu(x) de l’enquête : 18 mai 2010, Malicorne sur Sarthe
Date de la fiche d’inventaire : 10 juin 2010
Nom de l'enquêteur ou des enquêteurs : Lamia Gabriel
Nom du rédacteur de la fiche : Lamia Gabriel
Nom du photographe : Faïencerie d’Art de Malicorne

N° d'inventaire Ministère Culture :  2010_67717_INV_PCI_FRANCE_00123
Identifiant ARK : ark:/67717/nvhdhrrvswvk2zc

Comment contribuer à l'inventaire : la méthode : http://pcilab-new.huma-num.fr/contribuer
Accéder à la fiche sur Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Faience_de_Malicorne

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